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Le succès de son
dernier album "&" l'a installé haut, très haut dans le coeur des Français. Pour prendre la mesure de l'affection que porte désormais le grand public à Julien Doré, il suffisait simplement de regarder les visages assis dans les gradins hier soir au Zénith de Paris, à l'occasion du dernier des trois concerts qu'il donnait dans la salle de la capitale. Des mamans et des papas, des grands-mères avec leurs petits-enfants, des quadras, des bandes de copines, des trentenaires en baskets et autant d'hommes que de femmes... Parité parfaite : l'artiste de 35 ans séduit toutes les générations. Dès son arrivée sur scène sur les notes sensuelles de
"Porto-Vecchio", les susurrations et les clins d'oeils traduisent cette promiscuité. Oui, Julien Doré assume sa dimension populaire, tout comme ce grain de folie qui le caractérise depuis sa première apparition avec son ukulélé dans "Nouvelle Star". C'était il y a dix ans déjà et depuis, le chanteur s'est construit un répertoire assez hétéroclite, parfois doté d'un humour savoureux, parfois d'une poésie profonde, mais toujours témoin d'un vent de liberté.
La salsa du démon Doré
Pour Julien Doré, c'est donc là que résidait tout le défi : faire cohabiter les multiples facettes de sa personnalité artistique durant un seul et même concert ! Sauf que ce dernier a vite occulté le problème en choisissant de scinder le show... en deux. Ainsi, pendant une heure, une fièvre collective s'est répandue dans le Zénith. Lunaire et monté sur ressorts, Julien Doré n'a pas failli à sa réputation de showman en enchaînant tubes incontournables et pitreries avec une fougue à toute épreuve. On l'a vu railler avec délice des spectatrices survoltées et esquisser quelques pas de danse sur
"Coco Câline" avec un homme déguisé en panda.
La bonne idée ? Avoir intelligemment réorchestré "Beyrouth Plage", l'entêtant
"Le Lac" ou
"Kiss Me Forever" avec une galerie de musiciens expérimentés afin d'en faire de vrais moments de plaisir. Le public, en liesse, ne s'est d'ailleurs pas fait prier pour reprendre à l'unisson le refrain de "Winnipeg" ni pour dégainer une armée de smartphones lorsque le chanteur a soudainement fendu la foule pour chanter dans les gradins son très chouette
"Chou Wasabi". Tout ça au bout d'une demie-heure à peine de concert !
Graver le spleen
Le changement fut alors radical quand Julien Doré, débarrassé de son costume de joyeux luron, a endossé celui du crooner pour interpréter "Romy", magnifique ballade élégiaque en italien. Sans artifice, avec pour compagnon son piano, l'artiste a plongé à corps perdu dans la dimension plus forte de son dernier album : une profonde et belle mélancolie. Difficile de croire qu'on remuait le bassin quelques minutes plus tôt quand la grâce de
"Sublime & silence" vous paralyse sur votre siège. Tout est subtil, d'une justesse sidérante. Silence religieux dans la salle. A ce titre, l'interprétation en rappel de la ballade "Mon apache" arracherait des frissons aux coeurs les plus endurcis. Mais évidemment, Julien Doré n'aime pas trop plomber l'ambiance. Après avoir feinté de quitter la scène à l'issue d'une standing ovation (ses talents d'acteur sont très convaincants), le chanteur est revenu pour trois derniers morceaux : "Caresse", un touchant duo avec Juliette Armanet sur "La carte postale" et
"Paris-Seychelles", scandé à plein poumons en collégial lors d'un glorieux final. Du grand art !