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mardi 11 juin 2013 0:00
Texas : "On s'est dit que notre heure était passée"
Certains n'espéraient plus entendre le groupe mais huit ans après son dernier album "Red Book", Texas est de retour dans les bacs depuis la fin du mois de mai avec "The Conversation", un album qui constitue un retour aux sources pour le groupe. Dans le cadre d'une session Pure Charts Live, Texas nous a offert son nouveau single, "The Conversation" et son tout premier titre, "I Don't Want a Lover", en coulisses du plateau de "C à vous" dont le groupe était récemment invité. L'occasion aussi de discuter de la musique, du retour de No Doubt et de l'industrie du disque.
Propos recueillis par Charles Decant.
Texas n'a sorti aucun album depuis 2005 mais quand on écoute "The Conversation", on se dit que l'album aurait pu être enregistré juste après. Il y a une certaine continuité dans ce projet... Je pense que c'est un vrai disque de Texas. C'est drôle parce que j'ai l'impression qu'on est retournés plus en arrière que "Red Book", presque jusqu'en 1989, à nos débuts avec "Southside". Mais on ne dirait pas non plus un album fait à cette époque. Il est moderne mais on aurait aussi pu le faire au début de notre carrière. C'est agréable ! C'est drôle. Parfois, on se dit que des choses qui nous avaient échappé reviennent nous rattraper. Vous parlez des sonorités de cet album ? De la musique en général ? De tout, oui. C'est comme si on n'avait pas décidé de faire cet album, en fait. Vous aviez tourné la page Texas ? Non, pas du tout !! A l'époque, on s'est dit qu'on allait prendre du recul, certains ont eu des enfants, on avait fait des disques les uns à la suite des autres, on en avait vendu tellement, on avait tellement de succès... A un moment, on voit que le public se fatigue un peu... ...Ca doit être dur !(Rires) C'est génial ! Il n'y a rien de mieux au monde ! Mais à un moment, on voit que le public se fatigue un peu, qu'il n'y a plus forcément autant de ferveur, ça diminue tout doucement. Le plus important pour nous a toujours été Texas. Donc plutôt que de faire du mal à la marque, comme on dit, on s'est dit qu'il valait mieux la mettre de côté, la laisser reprendre des forces. Et qu'on recommencerait quand le moment serait venu ! Et c'est ce qui s'est passé. On ne pensait pas qu'il y aurait une attente si longue, on pensait prendre un break de trois ans, peut-être. Et qu'est-ce qui s'est passé ? Il y a trois ans, notre guitare Ally McErlaine a eu un anévrisme au cerveau. Donc ça a tout chamboulé. Et c'est pourtant ça qui a relancé la machine Texas, non ? Oui, c'est tout à fait ça. Enfin, oui et non. C'est Ally qui a dit "Je veux qu'on fasse une tournée maintenant". Comme on était ses amis, comme on est un peu une famille, qu'on a grandi ensemble, et qu'on a passé sa vie adulte ensemble en tant que groupe, on a été très touchés par tous ça. Par le fait qu'il a réalisé qu'il était avant tout un guitariste. Que c'était sa vie. Il n'avait jamais vu les choses comme ça avant. Avant, il était plutôt du genre à dire "Je joue de la guitare... C'est un boulot un peu merdique". Enfin, pas un boulot merdique mais pour lui, être guitariste c'était ce qu'il faisait, pas ce qu'il était. Et après l'anévrisme, il a réalisé que c'était ce qu'il était. Et il s'est dit "Il faut qu'on y aille !" Vous en aviez parlé avant son anévrisme, de retourner en studio ? On en avait parlé oui, on faisait des petits trucs à droite, à gauche. Mais quand on a quelque chose qui peut potentiellement disparaître à tout jamais, ce n'est pas du tout pareil. On s'est dit "Merde !". Voilà ce qui s'est passé. Mon premier album solo est arrivé à un moment très difficile de ma vie Et pendant ce break, vous avez sorti deux albums solo. Est-ce qu'ils ont eu un quelconque impact sur ce nouvel album de Texas ?Non. Quand j'ai fait l'album "Melody", c'était pour moi une nécessité. J'avais besoin de faire un disque à une période très difficile de ma vie, parce que je m'étais séparée du père de ma fille. C'était un disque très personnel. J'étais dans un état où je ne voulais pas discuter sur un solo de guitare, sur les paroles d'un refrain, ou sur le nombre de mesures dans un putain de morceau. Je n'avais pas l'énergie. J'avais passé plusieurs années à me battre. Et je ne voulais pas aller en studio et dire "Non, je pense qu'il faut faire ci" ou "Je pense qu'il faut faire ça". Je ne le voulais pas et j'en étais incapable. Il fallait que je le fasse, que je le finisse et puis merci, au revoir ! Il fallait que ça sorte de mon système. J'ai dit les choses que j'avais à dire. Et pour être honnête, si j'avais fait ce disque avec le groupe et qu'ils avaient vu dans quel état de douleur j'étais, ils n'auraient pas su le gérer. Et moi non plus. Donc je ne pouvais pas faire cet album avec Texas. Puis le deuxième, faire un album avec un grand orchestre, reprendre des musiques de films, travailler avec Phil Ramone... C'était juste fun ! Sur "The Conversation", vous retournez à vos débuts alors qu'avec "Red Book", vous vous étiez dirigés vers un son plus moderne. Cette fois, vous êtes un peu plus rétro. C'était une décision avant de rentrer en studio ou c'est arrivé comme ça ? Il n'y a eu aucune décision. Mais il n'y en a jamais. Enfin, on est toujours plus ou moins inspiré par un courant musical ou un autre, on veut aller dans telle ou telle direction, sachant où on est déjà allé. Mais ce disque, on s'est juste dit "Faisons un disque" ! On n'avait pas de deadline, pas de maison de disques... Personne sauf nous. On ne savait pas trop si on allait resigner avec Universal, ni si on allait avoir l'opportunité de sortir un album, pour être complètement honnête. On ne se posait même pas ces questions. On s'est juste dit qu'on allait faire un album parce qu'on en avait envie. Cet été-là, on a fait quelques concerts, parce qu'Ally voulait vraiment en faire, et on a reçu un super accueil. On a eu des tourneurs qui ont pris contact avec nous... On s'est dit "Tiens, des gens veulent que Texas revienne ? C'est étonnant ! C'est bien, mais c'est étonnant"... On se disait qu'on était plus forcément à la mode Mais vous en doutiez ?Non, on n'en doutait pas. Mais on se dit qu'on n'est plus forcément à la mode. Ca ne nous fait pas douter de ce qu'on fait ou de ce qu'on a fait. Parce que quand on était au sommet, on se disait "On a vendu 35 millions de disques, donc si on ne sort plus d'album, eh bien tant pis, on a vécu un truc super". On se disait qu'on pourrait vivre une vie incroyable après avoir eu autant de succès. Et c'était un besoin pour nous de faire un nouvel album. Et les choses changent. Quand tu es au sommet, les gens t'envoient des cadeaux, ils veulent que tu ailles partout et puis, petit à petit, ça s'essouffle et ça s'essouffle et ça s'essouffle. On ne se dit pas "Personne ne nous aime" mais on se dit que notre heure est passée, qu'il faut laisser la place aux jeunes ! Vous avez mis deux ans à le faire, cet album. Pourquoi est-ce que ça a pris si longtemps ? On a commencé à enregistrer des titres, puis on a fait des concerts, et puis on est revenus, Johnny et moi on a écrit, puis on est à nouveau repartis sur plusieurs dates de concerts. L'an dernier, on avait des chansons comme "Dry Your Eyes", "Detroit City", on les a jouées en concert, on les a un peu arrangées, on a réfléchi. Ca prend du temps ! Et il y a huit mois, on l'a enfin fini. Et après, il a fallu décider ce qu'on allait en faire ! Vous parlez du label ? Oui, il a fallu qu'on réfléchisse. Est-ce qu'on allait retourner chez Universal, qu'on connaît bien, qui a les droits sur notre catalogue, où on connaît tout le monde ? C'était confortable, rassurant. Mais est-ce que ce n'était pas trop rassurant ? Notre contrat était arrivé à son terme et on a rencontré les gens de PIAS et je ne sais pas, il y a eu un déclic. On s'est dit qu'il était temps de changer, d'avancer. D'essayer ailleurs. Mais on a mis longtemps à se décider ! Le retour de No Doubt ? Je me suis dit "Quelle chanson de merde !" L'année dernière a été riche pour des groupes qui ont marché à la même époque que vous, emmenés par des artistes féminines, et qui ont tenté un retour. C'est le cas des Cranberries mais aussi de No Doubt. Vous avez suivi un peu leur retour ?Vous voulez la vérité ? Je ne savais pas que les Cranberries avaient sorti un nouvel album. Je n'en ai pas du tout entendu parler. Je savais que No Doubt avait sorti un album en revanche, je les ai vus faire de la promo. Ils en ont fait beaucoup. Et je me suis dit "Quelle chanson de merde !". J'étais perdue. Ce n'était pas une bonne chanson de No Doubt ! Les bonnes chansons de No Doubt, on met les mains en l'air (elle se met à chanter) « Don't speaaak, I know what you're thinking »... Mais je ne peux pas vous chanter la chanson qu'ils ont interprétée quand je les ai vus à la télé. Il n'y avait pas de mélodie ! Pour moi, cet album de No Doubt donnait vraiment l'impression d'un groupe qui a vieilli et qui veut se faire passer pour jeune. Et c'est précisément ce que vous ne vouliez pas faire avec "The Conversation"... Oui, exactement. Merde, quoi ! A un moment, tu as 45 ans, tu n'es plus jeune, tu es vieux ! Donc tu fais un disque qui te ressemble et ne va pas te demander avec quel producteur super cool tu peux bosser ou quel jeune musicien tu peux embaucher ! Et si tu n'en vends qu'un exemplaire... Tant pis ! Je me dirais que c'est dommage, mais je pourrais toujours dire que j'ai fait un super album. Que j'ai fait un album honnête et que je n'ai pas essayé de courir après le public. C'est un peu le reproche que certains font à Madonna, qu'elle essaie sans cesse de rester jeune en trouvant des producteurs tendance... C'est compliqué... Je pense que Texas est un peu passé par là, c'est ce qui nous est arrivé avec "Red Book". On a eu cette période de doute. On n'était pas si vieux que ça mais on s'est dit qu'il fallait qu'on reste dans le coup. Et puis quand ça ne marche pas trop, on se dit que peut-être ce n'est pas comme ça qu'il faut réfléchir. Qu'on fait un disque pour de mauvaises raisons. Vous n'êtes pas satisfaite de l'album "Red Book" ? Non, ce n'est pas ça. Je trouve que "Red Book" est un très bon album. Mais, pour moi, la production sur ce disque, par endroit, est très datée. Parce qu'on cherchait quelque chose, on courait après un son particulier, qui marchait à ce moment-là. Les chansons sont très bonnes mais pas la production. La récession va impliquer le retour de l'album Vous pensez que l'industrie du disque est trop obsédée par la jeunesse ? Ou par la tendance ?Les grandes maisons de disques, oui. Et je pense que c'est un problème parce qu'on a besoin des groupes plus anciens pour faire marcher les labels, et permettre ensuite aux jeunes de démarrer. Nous, quand on a commencé, on a fait les premières parties de la terre entière ! On a chanté avec Fleetwood Mac, Bryan Adams, et je parle d'artistes qui remplissaient des stades. Personne n'en avait rien à foutre de qui était Texas, mais on montait sur scène chaque soir, sur ces grandes scènes, et on apprenait concert après concert. On voyait ces artistes, comment ils travaillaient, leurs chansons... On a besoin de ça pour lancer les jeunes artistes, leur permettre de faire leurs armes sur scène. Sans concert, ils ne peuvent pas survivre parce qu'ils ne vendent pas assez de disques. Comme ça, ils peuvent accroître leur auditoire. Et puis il y a des gens qui viennent te voir en concert, mais qui n'achètent pas tes disques... Il n'y a plus grand-monde qui achète encore des disques... Exactement ! Il faut que l'industrie réfléchisse un peu plus, qu'il y ait un fonctionnement plus logique ! Et le public plus âgé est aussi celui qui achète encore des disques... ! Je pense que ça va changer, que le format de l'album va revenir. On a une génération qui est habituée à acheter des chansons à l'unité. J'ai toujours dit que quand quelqu'un achetait un album il disait toujours "Putain mais la chanson 5 est nule !". Et trois semaines plus tard, la même personne adore la chanson 5. Et l'artiste peut alors partir en tournée, et jouer les chansons de l'album. On ne peut pas jouer juste deux singles en concert. Et pour le reste, on fait quoi ? Des reprises ? Dans ce cas ce sont des gens comme nous qui se font des sous parce que ce sont nos chansons qui sont reprises... L'album va revenir ! Vous le pensez vraiment ? Oui ! Surtout en période récession. Les gens vont apprécier à nouveau des choses simples. Parce qu'ils n'ont plus l'argent d'apprécier d'autres choses. Etre gâté, c'est fini. Les luxes qu'on se permettait vont disparaître. Et je crois que la musique, c'est l'évasion, et elle ne coûte pas trop cher pour 1h ou 1h30 d'évasion... Les chansons pop ne devraient pas durer plus de 3 minutes Puisqu'on parle de durée, justement, "The Conversation" est un album très court et dure 35 minutes... Certains titres durent 2m30 à peine...C'est comme ça qu'on écrit ! Je peux remplir 5 minutes de musique, mais nous, on écrit de la pop. Les chansons pop ne devraient pas durer plus de 3 minutes... C'est marrant, parce qu'on avait 15 chansons, mais on ne voulait pas en mettre 15. On aurait pu en mettre 25, mais on ne voulait pas. On aurait juste rempli l'album avec des titres juste corrects, et ce n'était pas ce qu'on cherchait ! On voulait que les gens écoutent l'album et disent "Wow ! C'est déjà fini ? Je peux le remettre ?". C'est ça un album, pour moi. Ce n'est pas la position de Justin Timberlake, qui est revenu cette année lui aussi avec un album, de dix titres, mais qui durent entre 6 et 10 minutes... ! Une chanson de dix minutes ? C'est plutôt un album concept alors... Putain, mais tu es qui ? Pink Floyd ? Je n'ai écouté que le premier single, "Suit & Tie". Je trouve le titre correct. Moi, les nouveautés que j'aime, c'est Haim par exemple. Quand je l'entends, je veux savoir qui chante, j'ai envie d'écouter encore. Justin Timberlake, ça me passe au dessus. Mais attention, j'ai des titres de Justin Timberlake sur mon téléphone ! Mais les titres de lui que j'ai, c'est "Cry Me a River", "Rock Your Body". J'adore ces titres ! C'est groovy, ça se chante, je connais les paroles, ça évoque un visuel... J'entends un tout. C'est un voyage. "Cry Me a River", ce n'est pas mon histoire, mais je m'y identifie. Mais "Suit & Tie" ? Ca ne m'évoquait rien, ça ne me faisait rien ressentir. Haim, ces trois filles qui chantent, j'aime ! J'ai envie de mettre ces titres dans ma cuisine. Podcast
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