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vendredi 02 décembre 2011 16:00

Laurent Voulzy en interview

Dix ans ! Dix ans que Laurent Voulzy n'avait pas sorti de disque de chansons inédites. Depuis "Avril", il n'a pas chômé pour autant puisque il a enregistré un album de reprises "La septième vague" et modernisé son tube Rockcollection pour son "Recollection". Laurent Voulzy fait donc un vrai retour en publiant cette semaine "Lys And Love", un album tourné vers le Moyen-Age où s'opposent ciel et terre, Angleterre et France, passion et raison. Ce disque est une pépite musicale dans laquelle il n'est pas facile d'entrer. Passé l'étonnement de la première écoute, il s'avère particulièrement envoûtant. Laurent Voulzy prend des risques, bouscule les a-priori et enregistre même un titre de plus de 14 minutes. Rencontre avec un artiste enthousiaste, amoureux du Moyen-Age, de la musique tout simplement. Il nous parle d'enfance, d'Alain Souchon, de Nolwenn Leroy, d'enfance et du travail en studio.
Crédits photo : ABACA

Votre nouvel album "Lys And Love" est sorti cette semaine. 10 ans qu'on l'attend ! Une décennie est passée depuis la sortie de votre dernier disque de chansons inédites "Avril". Certes, vous avez sorti "La septième vague" (disque de reprises) et "Recollection", mais vous n'avez pas ressenti de frustration pendant ces dix années ? (Steven Bellery, journaliste)
Laurent Voulzy : Non pas du tout… J'ai eu beaucoup de plaisir à faire les deux albums précédents. Je fais toujours des choses que j'aime. Dans l'absolu, je serais frustré de ne pas pouvoir faire tout ce j'ai envie de faire. Cet album est arrivé au moment où il devait arriver. Cette décennie ne m'a pas parue longue, courte même.

Ce disque, vous y travaillez depuis des années ?
Non. Depuis seulement deux ans. L'aventure de "Lys And Love" a commencé au moment où je suis entré en studio il y a deux ans, c'est la première fois que ça m'arrivait. Je n'avais qu'une demie-musique d'écrite.

"Lys And Love" n'est pas le titre d'une des chansons de cet album. Qu'est-ce qui se cache derrière ?
Au départ je voulais l'appeler "Lys" tout court. J'ai toujours adoré cette fleur qui évoque pour moi l'Histoire. Cet album s'inspire du Moyen-Age. Mais autour de moi, on me disait "c'est extrêmement royaliste comme titre" ! J'ai cherché d'autres noms… Et un ami journaliste est venu écouter quelques débuts d'enregistrement. Et il m'a proposé "Lys And Love". J'ai gardé l'idée en tête et finalement j'ai appelé le disque comme ça !

Cet album nous emmène dans un univers onirique, moyenâgeux entre France et Angleterre. Est-ce que cette idée, vous l'aviez dès le début ou l'univers s'est installé progressivement ?
Non dès le début. Je savais que le fil conducteur allait être le Moyen-Age. L'idée de la France et de l'Angleterre est arrivée après…

Il y a un fil conducteur plus qu'un concept
Est-ce qu'on peut parler d'album-concept ou le mot vous gêne ?
Je ne sais même pas ce que c'est ! (rires). Il y a un fil conducteur plus qu'un concept. C'est une corde tendue que j'ai suivie d'un bout à l'autre. Cette corde va d'aujourd'hui au Moyen-Âge en évitant les autres périodes. On est entre l'amour courtois, les légendes et le Moyen-âge. Est-ce un concept je l'ignore ?

Mais d'où vient cette passion ?
De l'enfance ! J'avais 8 ou 10 ans et ma Maman m'a offert un château fort. Et ça été une révélation. L'époque m'a attiré. Je pense que j'étais prédisposé à aimer cette époque. Le château fort a été le catalyseur.

Vous avez relu Chrétien de Troyes et les Chevaliers de la Table ronde ? Vous avez fait un travail de recherche pendant l'enregistrement ?
Oui et non. Je me suis entouré de tous les livres que j'avais depuis longtemps. Je me suis créé un univers d'images autour de moi, j'ai mis une tapisserie de fleurs dans le studio, des bougies. J'ai soigné le livret du disque aussi. Je trouvais ça important. Les textes sont traduits en Anglais et en Français.

Vous voulez sortir cet album en Angleterre ?
Je ne sais pas encore. Peut-être…

"Jeanne", le premier single qu'on a découvert en septembre évoque un tableau. Existe-t-il vraiment ?
Non ! Il n'existe pas. J'ai vu sur Internet que certains se posaient la question. En fait "Jeanne" c'est comme un conte. Je ne savais pas comment appeler la chanson. Une nuit je travaillais, je me suis endormi sur mon ordinateur, en me réveillant j'étais persuadé d'avoir entendu le prénom "Jeanne". Comme Jeanne d'Arc entendait des voix (rires)… J'étais alors persuadé que la chanson devait s'appeler comme ça…

Regardez le clip de "Jeanne"


Vous avez demandé à votre ami Alain Souchon d'écrire la chanson…
Oui j'ai travaillé pendant deux ou trois semaines sur ce texte et j'avais l'impression de tourner en rond. J'ai donc demandé l'aide d'Alain…

"Je chante ma peine l'âme pleine de mélancolie", chantez-vous dans "Jeanne". Rassurez-nous tout va bien ? Il y a une part de tristesse dans ce disque ?
Ah je ne crois pas… Faudrait que je réécoute l'album de façon globale… Je ne l'ai jamais fait ! J'ai terminé le disque le 14 novembre à midi et je n'ai même pas eu le temps…

La mélancolie et la tristesse peuvent être des turbos
Il faut une part de mélancolie pour composer ? C'est possible de composer tout en étant heureux ?
Bien sûr même si la mélancolie et la tristesse peuvent être des turbos… Les émotions, l'amour, une rupture peuvent être des turbos… Tout ce qui remue, ça aide. J'ai l'impression que c'est plus facile de composer quand on est triste qu'heureux quand même…

Vous nous emmenez ensuite à "Glastonbury", premier titre de ce disque en anglais, langue que vous adorez. Cette ville est l'un des berceaux de la légende arthurienne. On dit même que le Roi Arthur y a été enterré. C'est le point de départ de vos aventures musicales ?
C'est un endroit qui m'attire oui… J'ai appelé cette chanson comme ça parce qu'on y est. On entend des chevaux, des chevaliers, une bataille. C'est un endroit magique, mystique, légendaire lié au Graal et à Arthur. On est dans le domaine du rêve, c'est légèrement irrationnel. En fait, c'est une chanson sur le silence. Dans le silence, on entend des bruits qu'on ne peut pas entendre autrement. Ça amène des bruits d'une autre dimension…

Le morceau suivant s'appelle "En regardant vers le pays de France". Titre dont vous signez les paroles. Est-ce une chanson sur le mal du pays, vous qui vivez en Angleterre une grande partie de l'année ?
Un tout petit peu ! "En regardant vers le pays de France", c'est le premier vers d'un poème de Charles d'Orléans. J'ai trouvé cette phrase très jolie. Dans cette chanson je raconte que je ne suis pas prisonnier par la guerre – ce qui était le cas de Charles d'Orléans – mais prisonnier par l'amour. Je voulais dire en filigrane que j'aime de plus en plus l'Angleterre et aussi la France. Je suis très heureux d'être en Angleterre. Et quand je suis en France, je suis en manque de ma famille qui vit en Angleterre. Ce sont deux pays qui ont une histoire extrêmement liée d'amour et de guerre…

Un titre où on entend la voix de Nolwenn Leroy avec qui vous aviez déjà travaillé… C'est maintenant elle qui vient sur votre disque, un retour d’ascenseur ?
Oui (rires), j'avais envie qu'elle soit là. Surtout sur ce titre à consonance celtique. Je voulais qu'elle soit sur cet album… Sa voix devait être fondue dans les chœurs. Puis, j'ai oublié de faire enregistrer les chœurs à un endroit. De fil en anguille, sa voix se retrouve toute seule à un moment et c'est très joli !

On connait votre amour pour la Bretagne, qu'avez-vous pensé de son disque de reprises "Bretonne" ?
J'ai trouvé que c'était une bonne idée, totalement en adéquation avec elle. On en avait parlé il y a des années. C'était tellement naturel, tellement elle, que les gens s'y sont retrouvés et l'ont probablement ressentis. J'étais super content qu'elle le fasse !

Retravailler avec Nolwenn Leroy ? Ça se fera peut-être !
Vous lui aviez offert l'album "Histoires Naturelles" notamment. Est-ce que vous aimeriez retravailler avec elle sur un nouvel album ?
Oui bien sûr. Ça se fera peut-être ! On en a parlé il n'y a pas très longtemps. Alors peut-être ? Je ne sais pas sous quelle forme ça se ferait. Je ne pourrais faire que deux chansons. Ou alors avoir une idée globale de l'album avec elle et la travailler… Je sais pas ! En tout cas, "Histoires naturelles" c'est un joli souvenir, c'était une belle aventure, pas toujours facile ! Elle a un sacré caractère et c'est ça qui est formidable. Elle est vraiment marrante, elle a des idées, elle est têtue mais ouverte, elle a du goût. Alors on ne s'ennuie pas !

Justement dans votre chanson "Blackdone", vous terminez pas ces mots "You'll find your way in your own". Vous aussi vous êtes plutôt du genre à vous écouter quand vous faîtes un album, non ?
Oui !!! Au bout du compte je suis seul avec moi-même, même si on travaille en équipe. Prendre des décisions, ça ne m'effraie pas trop. Il faut assumer. Une grande partie du travail se fait avec le réalisateur. Mais quand j'écoute mes mixes, je suis seul.

Vous êtes quand même un ultra-perfectionniste… Vous prenez votre temps.
Ça n'est pas tout à fait cela. Je recherche l'émotion. A chaque instant de la chanson, je recherche l'émotion. Il faut que rien n'accroche, que tout ait l'air simple et plein d'émotions. Et pour cela, il faut qu'à l'intérieur, ce soit chargé d'une horlogerie complexe. Pour que ça touche le cœur, il faut que le boulet soit bien rond. Quand je fais un disque, c'est presque une quête spirituelle. Mais je ne peux pas dire que je suis perfectionniste…

Je ne peux pas dire que je suis perfectionniste
Vous parlez beaucoup de la nuit, des rêves notamment dans "C'était déjà toi" ou "La nuit", deux morceaux écrits par Alain Souchon. Vous tenez compte de rêves ?
Les rêves me fascinent. Depuis 1980, je note mes rêves dans des cahiers. Un peu moins en ce moment mais faut que je m'y remette. Mais je rêve moins en ce moment, je m'en souviens moins en tout cas.

"Le ciel et la Terre", morceau quasi-instrumental. Deux phrases seulement s'entrechoquent. L'idée c'était que ces deux phrases se suffisaient à elles-mêmes ?
Exactement. Les chœurs plus une rythmique dance, ça devient de la nitroglycérine. Au départ, je voulais appeler ce titre "La tentation de Saint-Antoine". Il a toujours été tiraillé entre ses démons et une vie ascétique. Et en fait c'est ma vie ce titre. J'ai une attirance pour la spiritualité et toutes les belles choses qu'on a sur Terre, ça n'est pas un dur écartèlement, mais ça en est un. On est tous attiré par une vie exemplaire, en tout cas c'est mon cas. Et pourtant, j'ai cinquante guitares, trois ou quatre maisons, j'aime avoir les moyens…

On a l'impression à l'écoute de ce disque très produit, parfois instrumental, avec une chanson de 14 minutes même, que votre travail de musicien, producteur, arrangeur vous a plus amusé que celui de chanteur…
J'ai autant de plaisir à faire les deux… Tout est lié pour moi. J'aime toujours chanter je vous rassure. J'ai autant de plaisir à réaliser un disque pour quelqu'un d'autre, qu'à réaliser les miens et à chanter.

"La Neuvième Croisade", morceau de 14 minutes, avec des ponts en langue arabe, des chœurs baroques. Vous vous êtes fait plaisir là !
Cette chanson, c'est la réunion de l'Orient et de l'Occident. Il y a eu huit croisades, j'ai eu l'idée d'une neuvième. Celle-ci serait celle de la compréhension et de l'harmonie entre Orient et Occident. Dans ce titre on entend une voix arabe qui se mélange à des chœurs baroques. C'est l'idée d'une rencontre…

Laurent Voulzy part en croisade ! Est-ce que vous arriverez à cheval en tenue de chevalier pour votre prochaine tournée ?
(rires). Oui il y a aura probablement une prochaine tournée mais je ne sais pas encore… Je n'ai pas eu le temps d'y réfléchir. J'ai failli ne pas finir mon album avant les fêtes… Maintenant il est sorti. Si tournée il y a ça serait à partir du juin-juillet prochain.

Crédits photo : ABACA
Alain Souchon nous a promis il y a quelques jours - dans une interview à Pure Charts - que son prochain disque, ce sera votre album en duo, à quatre mains. Vous êtes sur la même longueur d'onde ?
Ah oui ! Faut vraiment qu'on le fasse. A chaque fois on se le dit, et ça chaque fois on part sur des projets différents. (il tapote trois fois sur la table comme pour se motiver) Mais là oui !!

Vous avez 4 ou 5 chansons de prêtes c'est ça ?
Quatre oui ! Il y en a deux, c'est sûr on les aime tous les deux. Une je suis déçu de ma musique après l'avoir réécouté. Et une autre, Alain pense avoir raté le texte. Il y a en donc deux à rectifier et deux de sûr. Après on a d'autres idées pour d'autres chansons, on va voir !

Alain Souchon nous disait que ça prendrait du temps, notamment parce que ça n'est pas facile d'écrire des chansons en sachant que ce seront tous des duos...
Je comprends tout à fait… Il amplifie un truc qu'il lui fait un peu peur ! On est tellement dans des univers différents l'un et l'autre. Mais moi ça ne m'inquiète pas du tout. Il m'a toujours dit qu'il aurait pu chanter "Le pouvoir des fleurs" donc ça veut dire qu'on peut chanter à deux. C'est super sympa d'avoir ce challenge. Et dans le lot, peut-être qu'il y aura des chansons où il sera presque seul et je ferai simplement les chœurs derrière et inversement. Mais on envie de chanter à deux, pour deux.

Alain Souchon nous a dit qu'il aurait 97 ans quand il terminera ce disque, vous êtes plus optimiste que lui ?
Je suis un peu plus optimiste oui (rires) !!!
Pour en savoir plus, visitez laurentvoulzy.com et son Facebook officiel.
Écoutez et/ou téléchargez la discographie de Laurent Voulzy sur Pure Charts.

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