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samedi 27 janvier 2018 12:38
Coeur de Pirate en interview : les critiques, "Nouvelle Star", la pression...
Par
Julien GONCALVES
| Rédacteur en chef
Enfant des années 80 et ex-collectionneur de CD 2 titres, il se passionne très tôt pour la musique, notamment la pop anglaise et la chanson française dont il est devenu un expert.
A l'occasion de ses 10 ans de carrière, et alors qu'elle revient avec le titre "Prémonition" avant un nouvel album, Coeur de Pirate fait le bilan. Dans notre première partie d'interview, la chanteuse évoque le succès et la notoriété, les hommes dans l'industrie musicale, les réseaux sociaux, l'aventure "Nouvelle Star", son envie de tout arrêter et les critiques. Entretien avec une artiste brute.
Crédits photo : Mayxme G Delisle
Propos recueillis par Julien Gonçalves. Tu te souviens du jour où tu t'es dit : "Je veux faire de la musique, je veux devenir chanteuse" ? Le déclic s'est fait un peu par accident. Au début, j'ai écrit des chansons et des mélodies dessus, et j'ai mis ça sur MySpace car ma mère m'a dit : "C'est cool, tu devrais le faire !". Je pensais vendre 1.000 disques du premier album, on était au Québec, donc ça aurait été déjà très cool. Finalement, on en a vendu vachement plus et c'est très bien. Je me suis retrouvée en France très rapidement et ça a pris son envol. Je me suis rendue compte que des gens s'intéressaient à ce que je fais. C'était pas du tout ton ambition à la base ? Ah non, c'était vraiment juste pour le plaisir. Je me rappelle, je travaillais dans un bar, j'étais DJ, je demandais à mon patron si je pouvais jouer. Il y avait un vieux piano. J'avais invité des gens de MySpace, c'était cool. C'était le début quoi ! Il faut toujours que je me réinvente 10 ans plus tard, on arrive à garder cette naïveté-là, cette approche quand on fait de la musique ?Ce n'est pas une question de garder une naïveté, c'est se dire que tout peut s'arrêter demain. Il faut toujours se dire que rien n'est gagné. C'est comme ça que je vois les choses. Il faut toujours que je me réinvente. Il y a toujours de nouveaux artistes qui arrivent donc comment tu fais pour rester pertinent ? Alors que tout change, la musique change, la façon de la consommer aussi. Je suis arrivée quand on achetait encore des disques. Donc faut voir comment survivre dans tout ça. Ça change ta vision de créer, tu es plus libre vu que tu te dis que l'on vend moins ? Non, je ne pense pas que ça a changé quelque chose. Avant, je me fermais beaucoup à la musique nouvelle pour ne pas me laisser inspirer. C'est important aujourd'hui d'écouter ce qui se fait. Mais je reste la personne que je suis. Le nouvel album n'est pas ultra moderne non plus ! "Prémonition" l'est un peu mais le reste pas trop. Je me suis ouverte à la musique urbaine Tu t'es ouverte à quoi musicalement alors ?Plus de la musique urbaine. Il y a une émancipation dans ce genre de musique-là, je n'y connais pas grand-chose mais j'en écoute aussi. Et c'est bien qu'on laisse la place à des gens vachement plus jeunes. C'est cool de voir ce qu'ils peuvent apporter à la musique aujourd'hui. Ils sont très forts. Ça me met un coup de vieux forcément car ça fait dix ans que je fais ça ! C'est vrai qu'ils ont une autre approche de la musique, et j'avoue que les vrais instruments me manquent un peu. Ce n'est pas que c'est fake mais il y a beaucoup de samples. Ça me manque de voir quelqu'un avec une guitare ! (Rires) En urbain, tu écoutes quoi ? Il y a un rappeur québécois que j'adore qui s'appelle Loud. Il va faire des concerts en France là, donc c'est important d'en parler. J'aime beaucoup les classiques sinon, comme Orelsan, Damso, et Angèle aussi, même si ce n'est pas vraiment de l'urbain. Quand ça a commencé à marcher pour toi, tu te voyais là où tu en es aujourd'hui ? Je ne pensais pas être encore sous les projecteurs 10 ans plus tard. Je pensais que j'écrirais plus pour d'autres. C'est quelque chose que j'aimerais faire éventuellement. J'adore écrire des chansons. C'est ce côté-là qui me fait vibrer. C'est très bizarre de se dire qu'une femme peut tout faire toute seule Mais on doit te solliciter, non ?Bah non parce qu'en fait, c'est très drôle mais les gens ne captent pas que c'est moi qui écrit et qui fait tout. Pourquoi à ton avis ? Le patriarcat. (Sourire) C'est con mais c'est un peu ça. C'est dans les clichés, en fait. J'en ai parlé longuement avec d'autres journalistes, mais aujourd'hui c'est très bizarre de se dire qu'une femme peut tout faire toute seule. Donc c'est important de le souligner. Encore aujourd'hui, on pense que les artistes femmes ont toujours besoin de producteurs masculins, d'hommes autour de soi ? Exactement ! Regardez le clip "Premonition" de Coeur de Pirate : Quel conseil tu aurais aimé qu'on te donne il y a dix ans quand tu démarrais ? De ne pas trop m'en faire avec les critiques négatives. Au début, ça m'a bien miné, j'étais super affectée. On disait que je ne serais qu'une saveur de l'été. Mais du coup, je suis encore là ! (Rires) Je me trouve très chanceuse, même s'il y a beaucoup de travail aussi. Quel est le meilleur souvenir de ta carrière ? J'en ai beaucoup mais j'ai fait les Francofolies de la Rochelle en 2010. J'étais programmée quand le soleil se couchait. J'étais sur une immense scène, c'est dur de faire ça quand tu n'as qu'un album car tu n'as pas beaucoup de chansons. Je me suis laissée porter par la foule, et il y avait les remparts de la Rochelle, le soleil. C'était magnifique. C'était incroyable. J'ai réalisé à ce moment-là que ce qui m'arrivait c'était fou ! Au début, je crois que j'en ai trop fait La chose la plus difficile à gérer quand tu deviens célèbre ?(Elle réfléchit) Les voyages. J'étais trop partout, je ne m'en rendais pas compte. Je me suis un peu brûlée... Je crois que j'en ai trop fait, mais quand tu démarres, c'est normal, tu as envie de tout faire. On ne pense pas souvent à dire aux jeunes artistes qu'il faut planifier et se ménager. La notoriété, ça a été quelque chose de compliqué à gérer pour toi ? Je ne m'attendais pas du tout à ça. Par exemple, quand j'ai commencé, j'étais l'une des premières artistes sur Twitter. Je trouvais ça très drôle, je prenais tout au septième degré. Mais depuis dix ans, les choses ont changé... Ma façon de communiquer a changé sur les réseaux sociaux, j'en dis vachement moins. Quand je parle ça vient du coeur mais je ne partage plus autant. Mais ce que j'aimerais dire à mes fans, ça sert à faire des clics pour les médias. Et je dénonce ça. C'est très difficile. C'est-à-dire ? Par exemple, le dernier clip "Prémonition", après un post sur Instagram où je présente la vidéo, certains sites ont dit que je parlais de la violence conjugale et que j'avais vécu ça. Alors que rien à voir. On en est là quoi ! Ça me sidère. Au début, j'avais la paix. Mais il faut s'adapter. Aujourd'hui, par exemple, les autographes sont devenus les selfies ! J'ai fait un genre de crash monumental C'est vrai que tu partageais beaucoup de choses sur ta vie privée à un moment sur les réseaux sociaux. Tu ne te rendais pas compte de l'impact de tes publications ?Non... Dans ma tête, je suis une femme de 28 ans. Je suis un être humain. Souvent, il se passe des trucs dans ma vie, parfois c'est très drôle, parfois c'est pas drôle du tout. Il y a des gens qui peuvent se retrouver là-dedans mais du coup je ne peux plus trop le faire. C'est dommage. Après, je peux en avoir marre aussi. Cet été, j'ai fait un mois sans Instagram et ça m'a fait beaucoup de bien. Tu as évoqué le fait que tu as souvent eu envie de tout arrêter. D'où venaient les doutes ? C'est le modèle de la tournée. Tout dépend d'une seule personne, et de sa santé. J'avais 250 concerts en un an, sur trois à quatre continents. Parfois, dans des pays où je suis moins connue, tu le fais dans des conditions différentes, plus roots, dans un van, avec beaucoup de route. J'ai fait un genre de crash monumental. Tu fais des concerts, tu es à fond et quand ça s'arrête tu retombes dans la solitude. Ce n'est pas bon pour ton état psychologique et physique. Je fais de l'asthme, et j'ai fait des pneumonies à répétition. Je crachais du sang. Je l'expliquais en concert d'ailleurs. Mais tu n'as pas le choix. Il y a le public, et si tu ne le fais pas, il y a des gens qui ne travaillent pas, les musiciens, et il y a les assurances... Trop de responsabilités sur les épaules... A un moment, ça pèse. En plus, je ne voyais pas ma fille. Donc je me suis dit que je ne suis peut-être pas faite pour ça. Finalement, j'ai juste pas assez bien géré les trucs. Ça demande une meilleure gestion du modèle de tournée. Là, du coup, je vais en faire moins. Et rester sur deux continents. Tu ne peux pas tout faire. Tu me parlais des critiques tout à l'heure. Dans "Nouvelle Star", tu as répondu sur Twitter à ceux qui te reprochaient de trop pleurer par exemple ou qui critiquaient l'image que tu renvoies. C'est encore difficile à vivre ? Là, il y a une différence entre critiques et trolls ! C'est n'importe quoi, ce sont juste des rageux. Sur Twitter, c'est tellement facile... Au début, je répondais, je trouvais ça drôle, mais plus tu réponds plus ils te répondent, ça ne s'arrête plus. Mais à un moment donné tu n'en peux plus, donc stop, c'est bon ! "Nouvelle Star" ? Peut-être que je n'ai pas assez d'expérience Comment tu as vécu la période "Nouvelle Star" ?Je l'ai prise au premier degré, comme un show. J'ai vu des jeunes qui avaient énormément de talent. Et tu les vois progresser donc c'est génial. Mais peut-être que je n'ai pas assez d'expérience aujourd'hui pour refaire ce genre de programme. Mon truc, c'est la musique. Je me vois mal redonner des conseils à des gens. J'avais l'impression que je pouvais le faire mais finalement peut-être que je ne suis pas trop dans mon élément. Tu es encore en contact avec des candidats ? Tu travailles avec certains peut-être sur leurs projets ? Non, non... Je parle à Yadam, je sais qu'il travaille sur des trucs. Mais je ne suis pas en contact avec les candidats. Vu que tu me disais vouloir écrire pour d'autres, tu aurais pu proposer tes services à un artiste pour qui tu as eu un coup de coeur... S'ils me le demandent avec plaisir. Mais je ne vais pas m'imposer non plus ! Dans la deuxième partie de notre interview avec Coeur de Pirate, la chanteuse se confiera sur l'histoire de son nouveau single "Prémonition", l'arrivée de son prochain album ou encore l'affaire Weinstein. Publication la semaine prochaine !
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