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Léa Castel en interview : "Se casser la gueule et se relever, c'est le chemin d'une vie"

Par Yohann RUELLE | Journaliste
Branché en permanence sur ses playlists, il sait aussi bien parler du dernier album de Kim Petras que du set de techno underground berlinois qu'il a regardé hier soir sur TikTok. Sa collection de peluches et figurines témoigne de son amour pour les grandes icônes de la pop culture.
Léa Castel fait le grand saut. 13 ans après son premier disque, la chanteuse marseillaise part en "Roue libre" sur un deuxième album en forme de renaissance. L'aventure "Popstars", sa longue absence, ses liens avec le rap, son duo avec Jenifer... L'artiste nous dit tout, avec douceur et franchise.
Crédits photo : Alex Jozeph
Tu sors enfin ton deuxième album, ''Roue libre''. J'imagine que tu dois le vivre comme une forme d'aboutissement personnel puisqu'il arrive 13 ans après ton tout premier disque, ''Pressée de vivre''...
Oui ! C'est la suite et à la fois, c'est totalement un renouveau. Mon premier album est sorti quand j'avais 18 ans et j'ai mis 13 ans pour faire celui-ci. Entre temps, j'ai vécu toute une vie. Je le vois comme la renaissance de quelque chose que je connais déjà. C'est assez excitant mais je garde cette appréhension, forcément. Je vis des sensations incroyables.

Ce retour est une mise à nu
L'an dernier pour Pure Charts, tu expliquais avoir voulu ''prendre le temps de trouver ta place'' durant cette absence. Tes débuts dans la musique n'ont pas été conformes ce que tu espérais, à l'époque ?
Il y a eu des passades compliquées parce qu'à mon époque, quand on sortait quelque chose, on était vite catégorisé. Aujourd'hui, on a des artistes qui sont multiples. Avant, c'est vrai qu'on m'a cantonnée dans ce côté R&B et rap. Alors que moi je suis une passionnée de piano, d'orchestre ! Quand la vague est un peu passée, j'ai eu peur qu'on ne retienne pas ce genre d'éléments. J'étais persuadée que le temps allait être mon allié pour balayer les choses. Et puis, je me suis clairement confortée dans la production pour les autres. C'est génial de produire pour d'autres artistes. Quand tu es derrière, que ça marche ou que ça ne marche pas, ce n'est pas ton problème. J'ai fait ma séance studio, c'était génial, j'ai donné le meilleur de moi-même. En cas d'insuccès, ce n'est pas vraiment la même déception. Là, avec ce retour, je fais vraiment une mise à nu. Totale. Il faut avoir du courage, quand même...

Ton premier album s'est écoulé à 250.000 exemplaires, ''Dernière chance'' a été un tube, tu as participé à la BO du film ''Camp Rock 2'' pour Disney. Pourquoi tu as été coupée dans ton élan ?
C'était vraiment un choix de ma part. Déjà, je ne me retrouvais pas avec ma maison de disques qui voulait très vite ressortir quelque chose qui n'était pas du tout dans mon style. J'ai toujours eu un peu de caractère, dans le sens où je sais ce que je veux. Je suis Marseillaise ! (Rires) Je ne suis pas trop dans le compromis, surtout dans la musique. C'est tellement important pour moi. A l'époque de mon premier album, tout était tout feu tout flamme, je ne connaissais rien et j'ai fait ce qu'il y avait à faire. Quand on m'a laissé le choix, j'ai eu une multitude de choix mais il fallait que je fasse le bon. Ça, ça prend du temps. Et je vais même te dire, ça prend du temps de s'en foutre. De faire les choses tel qu'on le souhaite. Dès que je n'ai plus eu cette appréhension, cette pression d'être attendue, cette pression qu'on me mettait et que je me mettais en retour, j'ai trouvé une liberté.

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C'est un peu le revers de la médaille : se rendre compte qu'on fait de la musique par passion mais qu'il s'agit d'une industrie avec ses enjeux...
Exactement. Ça peut vite devenir très anxiogène. Ça s'associe le business et la musique, mais ce sont deux mondes totalement différents. Comprendre les deux, que l'un ne va pas sans l'autre, faire face aux problèmes que ça engendre...Les gens ne s'en rendent pas forcément compte mais dans la musique, pour qu'un projet puisse aboutir, il faut de bonnes équipes avant tout. Pour la production de l'album, pour la promotion, il faut trouver les bonnes personnes et on ne dirait pas comme ça mais pour quelqu'un qui prend la musique à coeur, comme moi, c'est... Bah c'est 13 ans. (Rires) Une dizaine d'années pour essayer d'aller là où on veut.

Popstars a été une super expérience
Tu penses que l'étiquette ''Popstars'', dont tu étais sortie finaliste, a pu te peser ?
Non, pas vraiment. Quand j'ai accepté de faire cette émission, je leur avais dit que je ne voulais pas être la gagnante. J'étais ok pour participer mais je ne voulais pas porter cette étiquette. Ça a été une super expérience, de mon point de vue. Ça reste un moyen de se faire connaître assez fulgurant. Moi j'ai vu l'avant et l'après : ça a tout changé ! Donc je ne renie pas ça. Après, c'est vrai que l'image de "Popstars", elle n'a jamais été très... comment dire... Ils ne la rendent pas jolie, comme la "Star Academy", comme tous les télé-crochets, à part "The Voice". Je trouve ça dommage alors que l'expérience a été très positive.

A l'époque, tu annonçais travailler sur un deuxième disque intitulé ''Coup de folie'' qui n'a jamais vu le jour. Que s'est-il passé ?
C'est totalement officieux pour le coup. Les équipes avec lesquelles je bossais et moi n'étions pas d'accord sur la ligne directrice alors ça s'est terminé d'un accord commun. J'ai préféré partir plutôt que de faire cet album et ne pas être satisfaite à 100%, tout simplement. Les extraits qui sont sortis, je n'en suis pas satisfaite. Porter un projet dans lequel on ne se retrouve pas, qui ne te ressemble pas totalement, c'est hyper dur. Je n'étais pas capable de le faire.

Quel a été le déclic, finalement, pour que tu acceptes de revenir en pleine lumière ?
Il n'y en a pas eu, justement. (Sourire) J'ai commencé à faire des chansons et puis j'ai continué, j'ai continué... Quand j'ai sorti "Abîmée" il y a cinq ans, quand j'ai fait la BO de "Pattaya", ce n'était pas calculé. Mais je n'étais pas encore prête à sortir un album. J'me suis même dit que j'allais peut-être sortir des one-shots toute ma vie. (Rires) Je n'étais vraiment pas dans ce mood-là, alors que j'avais un contrat d'artiste derrière que j'avais négocié... Tu vois le truc ! Enfin, ils savaient sur qui ils étaient tombés. (Rires) Au fil du temps, je me suis retrouvé avec une dizaine de morceaux et d'un coup j'ai réalisé : y'a un album, là ! Ce n'était pas planifié. Ça s'est fait tellement naturellement... C'est pour ça qu'il s'appelle "Roue libre" d'ailleurs. On ne m'attend pas, j'y vais quand même ! La musique ne ressemble pas forcément à ce qu'on entend sur les radios en ce moment ? On y va, ce n'est pas grave ! D'où l'importance de trouver un producteur qui soit d'accord et qui te suit. Je suis tombée sur une merveille. Les rencontres comme ça, ça marque une vie. Lui n'a jamais voulu dénaturer mon intégrité artistique. On se bat pour quelque chose qui nous ressemble. Evidemment il y a parfois des compromis, parce qu'il faut jouer le jeu. Mais en ce qui concerne la musique, je suis intransigeante et lui a respecté ça. C'est merveilleux. Ça libère.

Le rap m'a tendu les bras
Si tu étais discrète dans les médias, on t'a vu au fil du temps collaborer avec de nombreux rappeurs comme Soprano, L'Algérino, Zifou, Lacrim... La scène hip-hop a toujours été une inspiration ?
C'est même mieux que ça : c'est la scène qui m'a tendu les bras. Et qui me tend les bras encore aujourd'hui. Récemment, j'ai fait une prod pour Soso Maness sur son album qui vient d'être certifié disque d'or. Je suis trop contente pour lui ! Ce sont les personnes qui m'ont tendu la main, qui m'ont dit : "Ok, on y va". Dans le milieu de la musique, c'est compliqué quand tu veux collaborer avec des artistes. Avec les rappeurs, c'est tellement fluide. Et moi je suis pareil qu'eux. Pas de chichi. Et puis à Marseille, je vais te dire, tu baignes dedans. C'est ma culture. Quand j'ai commencé la musique à 14 ans, j'étais avec des rappeurs, j'ai bossé avec les plus gros... Je suis totalement imprégnée de rap.

Justement, tu partages le titre ''Lovely'' avec Jul qui est certainement l'artiste le plus prolifique et demandé de France. Comment s'est faite votre collaboration ?
Très facilement ! On était déjà en contact lui et moi. Je lui ai proposé de collaborer, il m'a dit : "Ok, envoie moi la prod". Il a kiffé et deux jours après, j'ai reçu un a cappella déjà mixé. Il est génial ce mec, c'est une machine. Il est super, il est hyper détente. "Léa c'est le sang", qu'il disait !




Quand on a aimé, c'est pour la vie
Autre duo avec un rappeur : ''Pas tout compris'' avec Gringe, qui raconte la véritable histoire d'amour que vous avez vécue ensemble. Il y a quelque chose de très fort dans ce titre, dans le fait que vous vous retrouvez sur une chanson parlant de votre relation, votre rupture. Comment est-elle née ?
Je l'ai écrite un soir et je lui ai envoyée. Il a trouvé ça magnifique et très juste. Il a tout de suite compris qu'elle parlait de lui. (Sourire) J'avais envie qu'il en fasse partie. Il m'a aidée sur l'écriture du refrain, qu'on interprète en duo. C'est un message, aussi : si on s'est aimé, on peut s'aimer autrement. Il m'a fait rire sur Instagram parce qu'il a mis une photo de nous deux en écrivant : "Mon ex, mon amie, ma soeur". Ça paraît étrange mais c'est tellement ça ! Aujourd'hui, on a une relation fraternelle. C'est magnifique et il est merveilleux parce que j'aurais pu recevoir un refus catégorique de sa part, et j'aurais pu comprendre. Mais non. Quel rappeur fait ça ? Qui accepte de faire les choeurs pour une chanteuse qui a toujours fait les choeurs pour des rappeurs ? (Rires) Qui fait ça à part lui, franchement ?

C'est facile de se mettre à nu de la sorte, en sachant que le public va découvrir un pan intime de votre vie ?
A partir du moment où tu le chantes, il ne t'appartient plus. Bon, déjà parce que les ingés son l'ont écouté et parce que les copines l'ont écouté. (Rires) Mais surtout parce que les gens vont se retrouver dans une partie de l'histoire et en faire la leur, se l'approprier. C'est justement quand j'en parle dans une conversation, comme là avec un journaliste, que je réalise que oui, il s'agit de mon histoire. Mais quand tu la délivres en musique, elle naît autrement finalement. Le cap le plus dur, c'est quand tu décides de mettre une idée à l'écrit. Dans l'album il y a un titre qui s'appelle "Mon plus beau morceau", j'peux te dire que quand je me suis retrouvée en studio, j'ai mis énormément de temps avant de trouver la bonne voix. J'étais très fébrile. Et une fois que je l'ai sorti, ça y est, c'était fini. Il n'y a plus d'appréhension parce ça ne m'appartient plus. Il n'est plus en moi mais dans un ordi, sur un CD, sur Spotify... Il fait son chemin.

Finalement l'album parle énormément d'amour, de différentes sortes d'amour. Notamment pour ton piano, ton instrument fétiche à qui tu dédies la chanson "Amour à la haine". C'est ton refuge ?
C'est mon exutoire. Je le pratique depuis que j'ai 4 ans ! Je suis née avec un piano. Et je pars du principe qu'en amour comme dans la musique, quand on a aimé c'est pour la vie. La musique ça a toujours été tellement précieux pour moi que je voulais qu'elle m'accompagne dans ma vie pro, ma vie perso, et pour ça j'ai toujours eu besoin que ce soit fait avec le coeur. Cette chanson, c'est aussi une lettre à mon public. Il est peut-être passé à autre chose avec les années mais ça ne change rien. Je n'oublie rien. Que le succès soit là ou pas, je le fais à 200% et on verra ce que ça donne. Vivre, se casser la gueule, se relever, c'est le chemin d'une vie.

Jenifer, c'est ma queen !
On te voit très complice avec Jenifer dans le clip de ''Résister''. Sur le papier, votre alliance a pu détonner !
Elle est merveilleuse, c'est ma queen. Elle est géniale cette fille. Je lui ai envoyé un message sur Instagram en lui disant que j'avais un morceau à lui présenter, que je voulais qu'on le fasse ensemble. Elle avait toujours apprécié ce que je faisais et elle n'a pas hésité une seconde avant de me dire oui. Je ne regrette tellement pas de lui avoir envoyé ce DM tout timide ! On s'était rencontrées une fois lors une promo télé mais c'est tout, on n'était pas copines. Maintenant, on ne se lâche plus ! (Rires) Elle déborde de bienveillance. C'est une personne qui te donne de la force. Et puis elle a vécu des choses elle aussi, les gens n'ont pas toujours été très tendres avec elle. Et pourtant, elle est là, elle est encore là. Elle a un parcours qui force l'admiration.

Tu travailles avec elle sur son nouvel album, qu'elle commence à enregistrer ?
Je suis en train, justement ! Avec Mosimann, on est en train de préparer des choses très cool pour elle. C'est sur le feu ! C'est compliqué pour moi parce que j'ai la sortie de l'album en même temps, je cours partout en promo, mais on arrive à se choper deux-trois heures avec Quentin vu qu'on ne vit pas très loin. Quand je peux, je fonce là-bas et on essaye de composer des trucs pour elle en grande partie. Je veux absolument lui faire un titre ou deux.



Tu te verrais tenter ta chance à l'Eurovision en 2022, si on te proposait ?
Ils sont déjà venus me chercher plusieurs fois. Moi je leur ai dit : "Je fais l'Eurovision, il n'y a aucun problème. Le seul truc qui me dérange, c'est le pré-casting". J'adore regarder l'émission pour le coup mais s'ils veulent vraiment me choisir, je n'ai pas envie de passer par cette étape. Avec tout ce que j'ai fait dans ma vie, par rapport à mon parcours, je n'ai pas envie de faire un casting pour défendre ma chanson. Car si je dois faire l'Eurovision, je te le dis, je prépare une chanson de malade ! J'imagine des trucs de fou, avec un piano en feu ! (Rires) J'adorerais. Donc si un jour ils veulent me choisir, je suis là.

Et écrire pour des candidats ?
Ah ça oui, carrément ! Je devais d'ailleurs faire un piano-voix pour Philippine [candidate l'an dernier, ndlr] mais je n'ai pas eu le temps, ça ne s'est pas fait. Composer pour d'autres artistes, j'y vais sans problème.

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