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Leona Winter (Drag Race France) en interview : "Mon expérience peut faire peur aux autres"

Par Yohann RUELLE | Journaliste
Branché en permanence sur ses playlists, il sait aussi bien parler du dernier album de Kim Petras que du set de techno underground berlinois qu'il a regardé hier soir sur TikTok. Sa collection de peluches et figurines témoigne de son amour pour les grandes icônes de la pop culture.
"Drag Race France" saison 3, c'est parti ! Pendant deux mois, dix reines vont rivaliser de talent et de glamour dans l'émission la plus queer du PAF. Déjà passée par "The Voice", la drag queen Leona Winter livre ses impressions sur ce nouveau défi de taille : "J'ai envie qu'on me découvre sous mon vrai jour".
Crédits photo : Jean Ranobrac
Propos recueillis par Yohann Ruelle.

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Le grand public t'a découverte dans "The Voice" en 2019, et te voici de retour dans "Drag Race France" saison 3. Que s'est-il passé pour toi entre temps ?
Oh bah c'est simple, comme pour tout le monde, il y a eu un Covid. (Rires) J'ai profité de cette période pour continuer de travailler sur mon drag, pour essayer d'être moins dans la féminisation de mon personnage mais aller plus dans l'extravagance, des choses que l'on pourrait presque qualifier de plus drag : tester de nouveaux maquillages, oser davantage de perruques plus travaillées, plus volumineuses... J'ai vraiment travaillé sur l'esthétique et l'apparence de Leona. Evidemment, je n'ai pas cessé de chanter, c'est une passion qui continue de m'habiter. Pendant le Covid, je suis tombée sur un casting pour intégrer "Queen of the Universe", c'était en 2021 et j'ai eu l'opportunité de représenter la France dans cette émission internationale de drag tournée à Londres, dans laquelle tout était chanté en live. Et puis voilà ! Mon chemin se poursuit et il me mène aujourd'hui vers "Drag Race France". (Sourire) C'est mon destin.

Les drag queens n'ont pas à être reléguées au second plan !
Dans "The Voice", tu t'étais présentée comme une diva glamour. Est-ce qu'on va découvrir une autre Leona ?
Oui ! On va véritablement découvrir une nouvelle Leona. Il y a toujours ce côté élégant, glamour et sophistiqué qui fait toujours partie de mon ADN, mais justement, l'un de mes défis dans cette nouvelle émission était moi aussi de me redécouvrir, d'aller au delà de mes limites, de mes barrières. Et donc d'oser autre chose, en lâchant prise sur mon control freak comme je l'appelle. C'est vrai que j'ai tendance à vouloir tout contrôler, à trop contrôler, ce qui fait que je peux paraître un peu inaccessible. J'ai envie qu'on me découvre sous mon vrai jour, en tout cas sous ma forme la plus simple.

Penses-tu avoir ouvert des portes pour la représentation des drag queens à la télé, à une époque où le phénomène autour de "Drag Race France" n'existait pas encore ?
Oh, ce serait vraiment prétentieux de le penser... Je ne crois pas avoir ouvert des portes. La preuve, si moi j'ai pu être dans "The Voice", c'est qu'elles l'étaient déjà. Maintenant c'est vrai que j'ai eu l'opportunité d'être une des premières à apparaître à la télévision, notamment dans "The Voice" où j'ai été la première drag queen à concourir. J'ai eu l'occasion de porter haut et avec fierté mon art, qui est le drag, tout en chantant, en essayant de le faire comprendre, d'éduquer les gens, pour montrer qu'on est des artistes à part entière. Nous n'avons pas à être reléguées au second plan ! Au contraire, le drag est un art extrêmement complet, extrêmement difficile et complexe à maîtriser, et il est difficile d'en vivre. A l'époque, j'ai essayé d'apporter à mon juste niveau un coup de projecteur dessus. Aujourd'hui heureusement, le drag s'est beaucoup plus démocratisé. Il y a encore beaucoup de chemin à faire pour qu'il soit reconnu comme un art commun - parce que je n'aime pas le mot "normal" - et sans a priori, mais "Drag Race" est là pour ça.

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"Drag Race France", c'est un nouveau challenge corsé. Pourquoi s'être inscrite ?
J'ai décidé de faire "Drag Race France" parce que je voulais apprendre, encore et toujours plus. L'avantage de faire des compétitions, en tout cas moi ce qui me motive, c'est d'être confrontée déjà à soi, ses limites, mais aussi aux autres. Pour moi, ça a toujours été très inspirant de voir comment font les autres, de comparer ce que je peux avoir en moins, en plus, et m'en inspirer pour étoffer mon propre personnage, ma propre essence, pour me permettre de grandir, d'aller plus loin et de m'améliorer.

C'est une force de savoir se remettre en question
Tu n'étais pas réticente à l'idée de te remettre dans un environnement de compétition télévisée ?
Non pas du tout, au contraire ! Faire une compétition c'est se remettre en question, et cette remise en question est légitime. J'ai toujours pensé que si on n'évoluait plus, c'est qu'il y avait un problème, et je me remets en question en permanence au quotidien. C'est une force de savoir se remettre en question, dépasser ses acquis. C'est même primordial dans tout art.

Quels sont tes principaux atouts dans la compétition ?
Premièrement, mon expérience. C'est même quelque chose qui peut faire peur aux autres. Alors attention, je ne connais pas ce format-là, je ne l'ai jamais fait auparavant. Je suis sur le même pied d'égalité que n'importe quelle queen qui découvrirait et qui ferait pour la première fois de la télé ! Cela dit, je suis peut-être plus authentique face à la caméra, dans le sens où j'ai moins peur de livrer mes émotions, de parler sans filtre, de dire ce que je ressens. J'ai un côté sans fard, mais toujours dans la douceur et la bienveillance. Ça, pour moi, c'est un point fort parce que ça permet aussi aux gens de s'identifier à mes craintes, mes peurs, mes états d'âme. Ensuite, je dirais mon bagage artistique certainement. Ça fait 12 ans que je fais du drag, 20 ans que je prends des cours de chant, j'ai fait de la danse pendant 8 à 10 ans... J'ai aussi fait du théâtre pendant quelques années. Tout ça fait de moi une artiste assez complète. Bon, il y a certaines choses que je ne sais pas faire aussi ! (Rires) Je ne sais pas coudre, l'humour n'est pas mon fort... J'ai aussi mes défauts. Mais je suis intéressée, inspirée par tout et ça peut être un point fort.

Retrouver Jenifer m'a mis une sacrée pression
Dans le premier épisode, tu vas sceller tes retrouvailles avec Jenifer, ton ancienne coach, qui endossera le rôle de jurée. Qu'as-tu ressenti en la voyant ?
Ni l'une ni l'autre ne savions que nous allions nous retrouver sur cette occasion incroyable. Ce que j'ai ressenti en la voyant ? Premièrement : "Wow, je suis trop contente". Une énorme fierté de la revoir à nouveau. Pour moi c'est un petit peu ma marraine, c'est celle qui a toujours été présente sur mon parcours de télé et en dehors. C'était une joie indescriptible... mais ça m'a aussi mis une sacrée pression ! Comme elle me connaît, elle connaît mes capacités et avec moi, elle a cette exigence qui me pousse à montrer ce que je sais faire. Je me suis énormément mis la pression et ça a été un gros coup de stress. Je ne voulais pas la décevoir. Mais c'est toujours un vrai plaisir de la voir, elle est toujours aussi belle et gentille. C'est une personne sincèrement bienveillante.

Vous étiez restées en contact ?
Après "The Voice", on s'était croisées et on était restées un peu en contact. Mais c'est vrai que le Covid est passé... Il a mis de la distance entre toutes les relations, et dernièrement on n'était plus du tout en contact, ni sur les réseaux sociaux ni rien. Mais il y avait toujours des petits likes, des petits commentaires, comme des apparitions pour dire "j'existe et je te regarde". Le lien que j'ai créé avec elle dans "The Voice", où j'étais arrivée jusqu'en demi-finale quand même, le fait de me mettre vraiment mis à nu devant elle, et qu'elle aussi me fasse part de qui elle est dans la vie privée... Il n'y a pas d'explication. C'est un lien qui sera à jamais indéfectible et qui existera toujours.




On arrive toutes avec le couteau entre les dents !
Parmi le casting de "Drag Race France" saison 3, de quelle concurrente te méfies-tu le plus ?
Olala... (Elle bafouille) Un peu toutes à vrai dire, parce que je sais à quel point dans ce genre d'émission on arrive avec le couteau entre les dents. (Rires) On a toutes envie de se battre, toutes envie de réussir. Cette motivation me fait peur chez tout le monde. Après, peut-être que la fougue et la jeunesse de Perseo pourraient m'inquiéter... Les outsiders, ça fait toujours des ravages. L'humour ravageur de Ruby On The Nail et de Le Filip peut aussi me faire peur, parce que c'est peut-être justement la qualité qui est la moins forte chez moi. Mais l'univers de Lula Strega, la dramaturgie d'Edeha Noire, l'énergie solaire d'Afrodite Amour... Toutes les concurrentes ont des arguments à offrir. La compétition, elle est surtout envers moi-même. C'est à moi de me battre pour me surpasser.

Nous sommes en pleine période électorale. Tu penses que les drags queens peuvent porter une parole politique dans notre société ?
Le drag est politique. On n'a même pas besoin de porter de message en soi : d'être nous, d'exister, d'être en télé, c'est déjà politique. Moi personnellement, comme je suis quelqu'un de très pacifique, j'essaie toujours de comprendre tout et son contraire. Je n'ai jamais trop voulu faire part de mes opinions, si tant est que j'en ai réellement. La seule chose que j'ai en tant que véritable opinion politique, c'est qu'il faut qu'on existe. Il faut qu'être soi, il faut avoir le droit d'être soi, il faut se sentir libre. Je suis fière de voir des drag queens à la télévision, dans notre société, sur les scènes de la capitale comme de la province. Le drag touche tous les âges. C'est le plus beau combat à mener et je suis ravie de pouvoir y participer.

On veut tous avancer dans le même sens
T'es-tu préparée aux critiques qui vont inévitablement fleurir sur les réseaux sociaux, avec cette nouvelle médiatisation?
Oui bien sûr. La haine, je l'ai déjà vécue à l'époque de "The Voice" quand j'ai été extrêmement exposée. Les haters sur les réseaux sociaux, ça existera toujours ! Les plus difficiles, ce sont peut-être les haters au sein de notre propre communauté. Parce qu'on veut tous une seule chose : avancer dans le même sens, faire front commun pour une cause commune, qui est l'acceptation des autres. Au même titre que je demande la tolérance pour ce que je suis et ce que je fais, je tolère ceux qui pourraient ne pas comprendre. C'est notre rôle aujourd'hui, en tant que drag queens, de faire ce travail d'éducation et de porter cette visibilité, pour que les gens, petit à petit, n'aient plus peur et ne se sentent plus agresser par cette forme d'art qui est la nôtre.

Côté musique, tu as déjà sorti plusieurs singles. Quelle est la suite de tes projets musicaux ?
J'ai très envie de créer un spectacle qui va tourner un peu partout en France. Ce sera un petit peu comme Lady Gaga à Las Vegas, avec un piano pour le côté jazz mais sans délaisser le côté pop ! J'ai envie vraiment de créer un concert assez complet. Pour parler de musique plus précisément, là, dernièrement, je n'ai encore rien enregistré mais peut-être que par la suite, je m'abandonnerai à la création. Mais pour l'instant, je ne suis pas là-dedans. J'ai envie de vivre pleinement cette expérience "Drag Race". Advienne que pourra ! Je ne fixe pas de limites à mes rêves. Comme je le dis souvent, je vise la lune pour échapper de retomber dans les étoiles. (Sourire) Si ça m'amène à l'Eurovision tant mieux, si ça m'amène à Las Vegas, tant mieux. Il y a des tas de rêves que je ne pensais jamais réaliser qui se sont concrétisés, donc je me laisse guider par mon destin.



L'Eurovision m'a toujours fait rêver
Représenter la France à l'Eurovision, ça, ça te plairait ?
Enormément ! L'Eurovision m'a toujours fait rêver. Tout ce qui me fait aller encore plus haut, encore plus loin, je signe ! Au delà de tous les débats politiques qui entachent un peu le concours, je trouve que l'art universel qui traverse les frontières est beau. C'est le plus gros show au monde ! Rien que ça... D'être dans les traces de Conchita Wurst, Bilal Hassani... Tout ce qu'ils ont fait, c'est incroyable. L'Eurovision, c'est aussi une scène pour pouvoir s'exprimer. Peut-être qu'à l'avenir, j'aurais envie de crier sur tous les toits certains messages.

Un dernier mot sur la tournée "Drag Race France", qui démarrera en septembre ?
On a hâte ! On se prépare mentalement et physiquement, parce qu'un spectacle de cette envergure, il faut des mois pour le travailler. Pour l'instant, je ne me mets pas de pression. La première envie, c'est de rencontrer le public, vibrer avec eux. Pour avoir vu les deux premiers shows, il y a un côté très galvanisant. Les gens sont fédérés par les artistes qu'ils voient sur scène, il y a une euphorie dingue ! Ça, j'ai vraiment hâte de le vivre.

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