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Zara Larsson en interview : "Je n'ai pas honte de faire de la pop commerciale"

Par Yohann RUELLE | Journaliste
Branché en permanence sur ses playlists, il sait aussi bien parler du dernier album de Kim Petras que du set de techno underground berlinois qu'il a regardé hier soir sur TikTok. Sa collection de peluches et figurines témoigne de son amour pour les grandes icônes de la pop culture.
Nouvelle sensation venue de Suède, Zara Larsson s'apprête enfin à publier son premier album international "So Good", après deux années de tubes. Rencontrée à Paris par une belle journée ensoleillée, la chanteuse de 19 ans revient sur son parcours, donne sa définition de la pop et parle féminisme avec un aplomb mordant. Rencontre !
Crédits photo : TEN / Jive
Propos recueillis par Yohann Ruelle.

Tout le monde ne le sait pas mais tu t'es d'abord fait connaître en remportant le télé-crochet "Incroyable Talent" en Suède. Quels souvenirs en gardes-tu ? Ça devait être très impressionnant comme expérience... Tu n'avais que 10 ans !
Pas tant que ça, en fin de compte ! C'était une opportunité et une aventure incroyables, mais ce n'était que trois shows. Tout s'est passé très rapidement : il y a eu les auditions, les demi-finales et la finale. Du coup j'étais là : "Wow ! C'est déjà fini ?" (Rires). J'ai gagné mais j'en voulais plus ! Ceci dit, je n'ai pas tant de souvenirs que ça car je suis tout de suite retournée à l'école, j'ai retrouvé mes amis, ma famille... Retour à la vie normale !

Chanter a toujours été ton rêve ?
Oui ! Toujours.

Chanter a toujours été mon rêve
Ça te vient d'où ?
Quand j'étais petite, ma mère m'a acheté le best-of de Whitney Houston, celui avec deux CDs. Je suis tombée amoureuse de sa voix ! Puis il y a eu Céline Dion, je me souviens quand mon père m'a montré pour la première fois le clip de "Thriller" aussi... C'était d'un autre monde. Tous ces artistes m'ont énormément inspirée. Mais j'ai toujours voulu chanter. Ma mère m'a raconté qu'à l'âge de 3 ans, je chantais déjà dans le métro et dans le bus pour des vieilles dames qui me trouvaient trop mignonnes ! Je ne m'arrêtais jamais.

Dès la sortie de ton premier single "Uncover", on a très vite comparé ta voix à Rihanna. Ça t'énerve ?
Non, pas du tout ! Je l'adore, je suis complètement fan d'elle. Elle est incroyable ! Après, je n'essaye pas volontairement de sonner comme elle... En vérité, ça m'a même surpris qu'on fasse la comparaison parce que pour moi, nos voix ne se ressemblent pas du tout ! Mais je comprends que les gens aient besoin de prendre des repères et de mettre les artistes dans des cases. On est tous pareil ! C'est notre cerveau qui fonctionne comme ça. La première fois que j'ai entendu Jhené Aiko, je trouvais aussi qu'elle ressemblait à Rihanna. (Rires) Mais maintenant que j'ai découvert d'autres morceaux d'elle, je me dis qu'elle ressemble juste à elle-même. Avec de la chance, après la sortie de mon album, on pensera simplement que je ressemble à Zara Larsson. (Sourire)

Regardez le clip "Uncover" :



C'est difficile de trouver sa propre identité quand il y a autant de popstars sur le marché ?
Oui. Mais je ne saurais même pas dire quel est mon style ni ce qui me rend spéciale. Je chante des chansons que j'aime et qui me plaisent avant tout. Je n'ai pas de "vision", on dit que je suis une artiste pop mais je ne saurais même pas définir mon genre. C'est encore trop tôt, peut-être que quand j'aurais sorti trois albums, je pourrais définir avec certitude qui je suis (Rires). Je suis juste une artiste mainstream ! Aujourd'hui, faire de la pop et faire de la musique populaire, c'est la même chose...

Quelle est ta définition de la pop, justement ?
La pop est un mélange de plein d'influences. Michael Jackson était pop, The Weeknd est pop, Rihanna est pop, Beyoncé est pop, Taylor Swift est de toute évidence pop... Parfois, j'écoute des rappeurs et je me dis : "Ce n'est pas vraiment du hip-hop. C'est de la pop !". Moi j'adore ça. Ce sont des mélodies accrocheuses, des paroles auxquelles il est facile de s'identifier... Je n'ai pas honte de faire du commercial car je veux que ma musique soit écoutée par le plus grand nombre. Mais je ne vendrai jamais mon âme au diable pour autant ! Si je ne sens pas une chanson, si je ne l'aime pas, même si je sais qu'elle sera numéro un, je ne la ferai pas ! Toutes mes chansons sont d'abord des chansons qui me plaisent.

Je ne supporte pas les divas !
La Suède est devenue le nouvel eldorado de la musique pop, avec l'explosion d'artistes comme Icona Pop, Tove Lo, Måns Zelmerlöw, Elliphant... Comment l'expliques-tu ?
La Suède possède une histoire avec la pop. Et ce depuis ABBA ! Nos artistes ont connu tellement de succès que ça nous a rendu plus confiants. Parce qu'on sait qu'on peut réussir. Prenez Roxette, Max Martin, Shellback... Il y a tant de producteurs et d'auteurs-compositeurs doués ! C'est devenu un gage de qualité d'être suédois. (Sourire) On te prend plus au sérieux. J'ai vraiment l'impression que les autres artistes ont tracé la voie pour la future génération. Je me sens très fière et chanceuse !

On peut désormais te considérer comme une valeur montante de la pop mondiale. "Lush Life" a été un énorme tube en Europe, "Never Forget You" a pris d'assaut les charts américains... Tout va très vite et tu n'as que 19 ans. Comment fais-tu pour garder les pieds sur terre ?
Si tu veux mon avis, tout se passe bien trop lentement à mon goût. (Elle éclate de rire) Ça fait si longtemps que je veux ça... aussi loin que je m'en souvienne. Donc 19 ans, c'est sacrément long ! Je travaille à cet objectif depuis que j'ai 10 ans. Je suis signée en label depuis mes 13 ans, j'ai sorti mon premier single à 15... Ça a pris son temps. Donc je suis super excitée. Si au début de ma carrière, j'étais stressée à l'idée de ne pas réussir dans cette voie, aujourd'hui je prends les choses comme elles viennent. Je réussirai tôt ou tard, c'est une question de temps ! Mais j'ai une famille géniale et de très bons amis qui sont là pour m'empêcher de prendre la grosse tête. Je ne crois pas que ce soit difficile, en même temps ! Je veux être une bonne personne, c'est ce que mes parents m'ont apprise. Donc je ne vois pas pourquoi la célébrité me changerait. Je ne comprends pas du tout ces stars qui se transforment en divas. Vraiment pas. Bon évidemment, je dis ça maintenant et s'il faut, dans cinq ans, je serai devenue insupportable et imbuvable. (Rires)

Tu pourras compter sur moi pour ressortir ces déclarations.
(Rires) Alerte dossier !

Regardez le clip "Lush Life" de David Guetta :



L'été dernier, tu as décroché ton premier numéro un en France avec "This One's For You". Comment est née cette collaboration avec David Guetta ?
Je pense qu'il me voulait pour cette chanson, donc c'est son équipe qui a contacté la mienne. Evidemment, j'avais très envie qu'on travaille ensemble ! Il a donc envoyé le morceau en Suède, où j'ai enregistré la partie vocale, puis on lui a renvoyé la démo. Ils l'ont masterisée, l'ont mixée et... voilà ! C'est sorti. La première fois qu'ai rencontré David, c'était donc le jour de la cérémonie d'ouverture de l'Euro ! Il était un peu surpris car il avait cette image de moi très apprêtée, bien coiffée et toujours maquillée, or là j'avais les cheveux en pétard, pas de maquillage et j'étais en jogging (Rires) Il est resté bouchée bée pendant quelques secondes ! Mais il a été génial, je suis très honorée qu'il m'ait choisie.

Beyoncé est mon idole absolue
Peut-on espérer un deuxième duo ?
Oh mais j'adorerais ! Sa manager est adorable, en plus. On ne sait jamais ce qui peut arriver mais je suis carrément partante.

Avec qui rêverais-tu de collaborer ?
Il y en a tellement ! Mais il y a une différence entre les gens dont j'écoute la musique et ceux que j'aimerais avoir sur un titre. Par exemple, je ne pourrais pas collaborer avec Beyoncé. Je suis tellement fan ! Je ne pourrais jamais faire ça, elle me volerait complètement la vedette, je serais ridicule à côté d'elle. (Rires) Donc pas de Beyoncé même si c'est mon idole absolue. J'adorerais travailler avec Nicki Minaj sinon. C'est une rappeuse talentueuse et c'est une femme, elle met à l'amende bon nombre de ses homologues masculins ! Mais pour une chanson qui soit vraiment vraiment cool, parce que je sais que tu peux avoir n'importe quel rappeur sur une chanson en le payant aujourd'hui. (Rires) Je suis fan d'Anderson. Paak aussi, il est incroyable. J'adore le hip-hop de toute façon. C'est pour ça que je suis très contente d'avoir Ty Dolla $ign sur "So Good". Je l'aime, je l'aime tellement ! Tu ne peux pas savoir à quel point j'aime sa musique. Je ne suis pas d'accord avec tout ce qu'il peut dire sur certaines chansons - des trucs de rappeurs sur les femmes - mais c'est mon plaisir coupable. Je l'adore.

As-tu le sentiment que la pop embrasse suffisamment la cause du féminisme ?
Il y a de plus en plus de chansons à ce sujet, et ça c'est cool. Si tu as de l'influence et de nombreuses personnes qui te suivent et écoutent ton discours, je crois que c'est nécessaire de prendre position. Et de joindre le geste à la parole. Quand Nicki Minaj et Ariana Grande expriment leur sexualité dans "Side to Side", je dis "Hell yeah" ! Mais pourquoi mettons-nous toute la responsabilité sur les femmes ? A combien d'hommes demandons-nous d'être des modèles ? Je parlais de Ty Dolla $ign tout à l'heure. Il a une chanson qui s'appelle "Pussy" où il dit « Ta chatte est ma chatte ». Euh non, je crois pas ! (Rires) Mais personne ne lui demande s'il pense vraiment ce qu'il dit. Aucun magazine ne parle de féminisme avec des hommes. Et pendant les élections présidentielles américaines, pourquoi parlait-on des tenues que portaient Hillary Clinton pendant les débats ? En quoi c'est important ?

On ne parle pas assez de féminisme avec les hommes
C'est exactement pareil sur les tapis rouge des cérémonies...
Mais oui ! Aux Oscars, aux Grammy... Pourquoi fait-on ça ? Donc quelque part, je considère que c'est mon devoir de parler de ça à mes fans. Mais personne n'y est obligé. C'est assez hypocrite. On demande beaucoup trop aux femmes ! Je suis un peu fatiguée de voir qu'on leur demande de changer le monde alors que c'est le monde qui doit changer. Chacun devrait faire ce qu'il veut, au final.

Dans le clip de "Ain't My Fault", tu prends justement le contrôle et dévoile un côté plus sensuel. Pour devenir une popstar, doit-on forcément jouer la carte du sexy ?
C'est vrai qu'en découvrant le clip, ma mère était là... (Elle l'imite) « Je n'aime pas trop certains passages. Pourquoi tu fais ça ? » (Rires) En vérité, tu n'as pas besoin de jouer de tes charmes pour séduire un public, il y a des tas d'exemples pour le prouver. Mais si tu as envie, tu devrais avoir le droit de le faire sans qu'on te juge. On demande aux femmes d'être super sexy mais quand elles le sont, on les traite de traînées ! C'est un peu une double punition. Comme si les femmes n'avaient le droit d'exprimer leur féminité que dans les clips de rap ou dans les magazines... Donc si j'ai envie, je le fais ! D'ailleurs, c'est la première vidéo où je me lâche un peu. Aucune de mes autres vidéos n'est comme ça. Je sais que j'ai une belle voix, je sais que je peux chanter, je sais que peux écrire, je sais que j'ai déjà connu le succès donc je sais que ce n'est pas uniquement ça qui fait vendre.

Regardez le clip "Ain't MY Fault" de Zara Larsson :



Que peux-tu me dire sur ton premier album, qui sort la semaine prochaine ?
Je suis très excitée ! Et j'en suis très fière. C'est comme une compilation de ce que je sais faire : il y a de belles ballades, des chansons très rythmées, c'est pop et en même temps éclectique... Je pense que tout le monde aimera au moins une chanson. Enfin je l'espère ! (Sourire) Je suis contente car même si je n'ai pas participé à l'élaboration de toutes les chansons, je me suis beaucoup investie. Sur mon premier album suédois ("1", paru en 2014, nldr), je n'étais pas du tout impliquée donc c'est gratifiant de savoir que je ne suis plus simplement considérée comme une interprète mais comme une artiste à part entière. Là ce sont mes mots, mes chansons. Même si ce n'est pas très profond ! (Rires) Le feeling est différent. Après bien sûr, si quelqu'un me propose un titre que je n'ai pas écrit mais qui s'avère être GÉNIAL, je m'en fiche : je mets mon ego de côté et je le prends !
Pour en savoir plus, visitez son site officiel et la page Facebook de Zara Larsson.
Écoutez et/ou téléchargez les titres de Zara Larsson sur Pure Charts.

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