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Petit Biscuit en interview : "Il n'y a pas de talent, simplement du travail"

Par Yohann RUELLE | Journaliste
Branché en permanence sur ses playlists, il sait aussi bien parler du dernier album de Kim Petras que du set de techno underground berlinois qu'il a regardé hier soir sur TikTok. Sa collection de peluches et figurines témoigne de son amour pour les grandes icônes de la pop culture.
Révélation électro de l'année, Petit Biscuit fête son 18ème anniversaire avec la parution de son premier album "Presence". Pour Pure Charts, le jeune prodige raconte son parcours, ses inspirations, sa nouvelle vie et son rêve de travailler avec Drake.
Crédits photo : Ashley Parango
Propos recueillis par Yohann Ruelle.

Tu as fêté tes 18 ans vendredi dernier et sorti ton premier album "Presence" le même jour. La fête devait être belle !
C'est assez fou ! Ça représente l'aboutissement de plein de choses et en même temps, c'est juste un joli cadeau que je me fais. (Rires)

Depuis comment de temps tu bosses dessus ?
Un an et demi à peu près. J'essaie de suivre des cours en même temps mais c'est assez compliqué. Je t'avoue que là je me consacre surtout à la musique, ça prend énormément de place dans ma vie. Mais c'est que du bon ! C'est exactement ce que je veux faire : voyager, rencontrer des gens... Même de gérer mon projet, c'est une partie ultra intéressante. J'ai créé mon propre label pour pouvoir être propriétaire de mes masters alors même s'il y a une partie un peu administrative, je suis content. Sauf que ça prend du temps, peut-être 90% de mes journées !

J'ai appris le violoncelle à 5 ans
Devenir artiste, sortir un album... C'est un rêve de gosse ?
Pas vraiment car c'est inimaginable ! Tu ne peux pas te projeter aussi loin quand tu débutes. C'est surtout quand j'ai vu que "Sunset Lover" commençait à décoller que je me suis vraiment dit que j'aimerais en faire plus que ma passion.

Quel est ton premier souvenir en rapport avec la musique ?
Je n'ai pas vraiment de souvenir précis. En fait j'ai commencé très tôt la musique quand j'avais 5 ans, avec le violoncelle. Je faisais aussi pas mal de peinture avec mes parents. J'aimais peindre des tableaux improbables et jouer des morceaux un peu singuliers... donc j'ai toujours été très créatif. Mais quand tu es gosse, c'est difficile de se faire vraiment une opinion. Tu ne sais pas vraiment ce que tu aimes ou non ! Ensuite j'ai appris la guitare et le piano en autodidacte.

Comment tu as basculé dans la musique électronique ?
J'ai une formation classique mais très vite, j'ai voulu désapprendre ce qu'on m'a enseigné. Parce que parfois ça me portait préjudice dans la musique que je faisais, qui était souvent un peu trop technique, un peu trop carré. C'est pourquoi j'ai voulu sortir de ça. Je me suis attaché à proposer quelque chose de plus créatif et moins imparfait. Plus humain, au final. La musique électro est un genre différent mais pas tant que ça. Vers 9-10 ans, je commençais déjà à traîner sur Soundcloud. J'y ai découvert des groupes comme Bonobo, Tame Impala ou Phoenix... Ce genre de sons qui m'ont fait kiffer ! J'me suis dit qu'il y avait un délire, quelque chose de plus direct dans l'approche du son. C'était un mélange parfait entre pop, rock, électro, musiques du monde et influences hip-hop. Du coup, la transition s'est faite totalement naturellement pour moi. C'est ce que j'avais toujours aimé mais sans avoir eu l'occasion de le découvrir avant.

Regardez le clip "Sunset Lover" de Petit Biscuit :



Ton premier choc musical, c'était donc... ?
"Black Sands" de Bonobo, en 2010. Surtout le titre "Kiara", mi-orchestre mi-hip-hop. C'est un morceau qui a révélé une nouvelle touche de fraîcheur dans le milieu électro. Encore aujourd'hui, ça fait sept ans et c'est encore ultra moderne !

Il n'y a pas de talent, simplement du travail
"Sunset Lover" a été le déclic pour toi ? Ce moment où tu as réalisé que ça devenait du sérieux ?
Non pas vraiment, je t'avoue que je ne suis pas très attaché aux statistiques donc je ne me suis pas trop rendu compte de l'ampleur que le titre prenait. C'est quand j'ai commencé à partir en tournée. Voir autant de gens d'un coup, qui viennent me voir... Il y a un cap supplémentaire à franchir : il faut que tu t'achètes ton billet pour venir écouter un artiste que tu apprécies. Il y a un côté beaucoup plus "sacré" dans ce procédé.

Justement la scène, c'est un exercice dans lequel tu te sens à l'aise ?
Ça s'apprend ! Ça s'apprend beaucoup, comme le reste. Il n'y a pas de talent, c'est simplement du travail. Au début j'étais très attaché au côté technique car je voulais maîtriser de A à Z le show. Il m'a fallu deux mois avant d'aller chercher le public, pour être en contact avec les gens et les faire réagir. J'ai construit mon nouveau show autour de ça. Je suis super fier de ce qu'on va montrer au Zénith de Paris ce mois-ci. C'est réfléchi à 100% pour le live, y'aura plein de surprises. J'ai rebossé tous les anciens morceaux, j'ai même rebossé les nouvelles tracks qui ne sont pas encore sorties ! Tout est mélangé et tu retrouves des petits gimmicks de certains titres dans d'autres morceaux, tout en proposant une certaine ampleur. Le but c'est de faire réagir les gens sur ce qu'ils connaissent plus ou moins. J'ai vraiment hâte, surtout qu'il s'en est passé des choses en un an ! La dernière fois que j'ai fait un concert à Paris, c'était à l'Élysée Montmartre et je n'avais pas d'écran, pas toutes ces lumières... Au début de la tournée, on voyageait à l'arrache ! Je prenais le train avec mes instruments, après j'ai eu un van, puis un tour bus. Les choses s'agrandissent au fur et à mesure. Et aujourd'hui, j'ai une grosse scéno, y'a des camions qui nous suivent derrière et je me suis dit que c'est assez fou qu'autant de matériel et de personnes soient mobilisés pour un show. Ça rend la chose encore plus excitante.

J'ai pensé l'album pour le live
J'imagine que la sélection des morceaux qui ont atterri sur "Presence" n'a pas été facile. Sur quels critères as-tu fait ton choix ?
C'est une histoire de feeling. Sur l'album, il n'y a que 10% de ce que j'ai fait en un an et demi ! Je n'ai gardé que "Sunset Lover" de l'EP. Je dirais qu'il faut que ce soit un morceau assez unique, pour avoir un album assez varié, mais en même temps qu'il s'adapte dans une espèce de scénario et de cohérence générale. C'est toute la complexité de la chose. Il faut aussi des titres qui possèdent cette "patte" Petit Biscuit et vont là où les gens ne t'attendent pas. Moi cet album, je l'ai pensé pour le live donc les chansons sont plus dynamiques et plus percutantes que ce que j'ai pu proposer avant. C'est de l'électronique vraiment plus assumée dans sa construction.

Ecoutez "Gravitation" de Petit Biscuit, Møme et Isaac Delusion :



Il y a pas mal de collaborations sur le disque : Bipolar Sunshine, Møme, Isaac Delusion... Comment sont-elles nées ?
C'est une histoire différente avec chaque personne. Møme, c'était mon pote de tournée : on a fait à peu près les mêmes dates cet été, on se croisait très souvent et on a bien sympathisé. Et puis un soir, on est allé dans mon tour-bus et on a commencé à faire du son... Ça a mis un peu de temps à se mettre en place et à aboutir à "Graviation", une track dont on est fier tous les deux. Le résultat est stellaire, comme on le voulait ! Isaac Delusion s'est rajouté dessus après en proposant des paroles qui collaient parfaitement. Pour Lido, on s'est rencontré tous les deux à Paris en tant que producteurs. Je lui ai fait écouter des démos et il y a en a une qu'il a adoré. Il m'a dit : "Ça te dit que je chante un peu dessus ?". J'ai halluciné parce que je ne savais pas qu'il chantait aussi. Une semaine plus tard, il m'a renvoyé une bande exceptionnelle avec une voix R&B qui épousait très bien le côté funk du morceau. Ça a donné "Problems". C'était marrant d'avoir un feat vocal avec un mec qui est producteur de base !

Drake et The Weeknd m'inspirent
Ça veut dire que toi aussi, on pourra t'entendre un jour sur tes morceaux ?
En fait, y'a deux tracks dans l'album où je chante ! "On The Road" et "Forever Being". Bon, j'ai mis six mois à enregistrer une minute ou deux minutes de paroles (Rires) Avec la voix, tu n'as pas de filtre. J'ai beaucoup travaillé car s'il y a un côté que tu n'assumes pas, ça va s'entendre direct. Et pour s'assumer, il faut bosser tout simplement. C'était des paroles d'adolescent un peu naïf que j'avais écrites en découvrant des paysages magnifiques et j'me suis dit que le mieux était que je le raconte moi-même. Ça collait bien avec le personnage Petit Biscuit. Donc je me suis lancé, ça m'a pris énormément de temps mais je suis plutôt fier du résultat. Y'a encore un accent français très fort qui s'entend et au début, ça me gênait un peu. Mais j'trouve que ça apporte aussi un petit charme. Dès que je parle en concert, les gens crient, ils adorent le Français ! Surtout aux Etats-Unis. Donc je me suis dit : "Vas-y, assume".

Avec quel artiste rêverais-tu de collaborer dans le futur ?
Y'a deux gars que je trouve ultra intéressants dans ce qu'ils proposent, c'est Drake et The Weeknd. Les deux ont l'air très pro et complètement en phase avec leurs personnages, dans ce qu'ils dégagent, dans la proposition mélodique, le débit... Tout. Ils ont vraiment un univers propre à eux. C'est inspirant.

Crédits photo : Charles Lopez .
Retrouvez Petit Biscuit sur son compte Soundcloud et sa page Facebook.
Écoutez et/ou téléchargez les titres de Petit Biscuit sur Pure Charts !

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