"Je m'voyais déjà" v/s "Grease" : laquelle choisir ?

Par Thierry CADET | Rédacteur
Actuellement à Paris, se jouent deux comédies musicales que la rédaction de Charts in France est allée applaudir : "Je m'voyais déjà" sur les chansons de Charles Aznavour, et "Grease" basée sur le film culte. Notre choix est fait, et le vôtre ?
Comment de pas mettre en exergue les deux comédies musicales parisiennes dites "de boulevard" du moment : "Je m'voyais déjà" et "Grease" ? Pour commencer, chacune joue sur une base de chansons déjà populaires, connues du tous. La première sur le répertoire de Charles Aznavour, et la seconde sur celui du film devenu culte. Ensuite, si le spectacle écrit par Laurent Ruquier met en scène (au delà de Diane Tell, Pablo Villafranca et Julie Lemas), de nombreux ex-candidats de télé-réalité musicale (de "Nouvelle Star" à "Star Academy", en passant par "Popstars" ou "Entrée d'artistes"), celui adapté par Stéphane Laporte ("Titanic", "Le Roi Lion"...), fait appel à de nombreux chanteurs découverts dans d'autres comédies musicales (de "Roméo & Juliette" au "Livre de la jungle", en passant par "Cabaret", "Les demoiselles de Rochefort" ou "Les dix commandements").

Si au Théatre du Gymnase ("Je m'voyais déjà"), les tableaux de groupes, avec leur belle énergie et leur fraicheur, semblent nous paraitre les moments les plus intéressants du spectacle, forts réussis à la fois visuellement et vocalement, ceux du Théâtre Comedia ("Grease"), fonctionnent eux aussi à merveille, mais... le reste aussi. Ce qui n'est absolument pas le cas du spectacle sur les chansons de Charles Aznavour, véritablement poussif. Là est toute la différence. La mise en scène, pourtant de Alain Sachs (lauréat de nombreux Molière), assisté de Corinne Jahier, et le livret de Laurent Ruquier, sont très loin d'être à la hauteur de nos espérances et du talent de l'interprète de "La bohème".

Dans ce fourre-tout de vannes plus lourdes les unes que les autres (alors que Laurent Ruquier fait preuve d'un indéniable talent en matière d'improvisation et de réparti, notamment sur les plateaux télé), le tout intégré à un livret aussi maigre qu'un épisode d'"Hélène et les garçons", les artistes font de leur mieux pour s'en sortir et éviter de trop patauger dans la semoule. Ainsi, Jonatan Cerrada s'en sort haut la main, grâce à son gain de maturité depuis sa victoire à "Nouvelle Star" il y a bientôt six ans. Le jeune homme nous est apparu beaucoup plus riche que par le passé (et c'est une performance tellement les dialogues ne l'y aident pas), plus à l'aise dans son corps, osant même la sensualité, toujours aussi bon chanteur, et qui plus est bon comédien. Ce qui n'est malheureusement pas le cas de tous, la palme d'or revenant à Diane Tell, que nous adorons en tant que chanteuse, capable d'imposer de belles émotions (notamment sur "Mourir d'aimer"), mais complètement incapable en revanche de les réitérer avec un texte théâtral.
Pablo Villanfranca sauve également aisément les meubles, grâce à son second degré permanent sur les évènements, sa voix bien sûr, mais également ses talents d'interprète et d'acteur (sa prestation en mexicain basané sur une chanson de Marcel Amont, écrite par Charles Aznavour) étant l'un des clous du spectacle. Le chanteur excelle également dans ses duos musicaux avec Diane Tell qui fonctionnent à merveille (notamment "Tu t'laisses aller"). Nul doute dûs à leur évidente expérience, rappelons que Pablo a tourné des années durant au sein du triomphe "Les dix commandements" (le tube "La peine maximum" en 2000, c'est lui).
Parmi les autres talents, Arno Diem, sortant d'une école de danse et de comédie musicale (l'A.I.D de Nicole Chirpaz), et qui jongle aisément avec les trois disciplines, du chant à la danse, en passant par la comédie, même si le tout nous est apparu encore un peu trop lisse. Arno a bien grandi depuis sa participation à "Star Academy" en 2005, et ça lui va bien. Assurément un bel espoir.
Julie Lemas (à la jolie présence), et St-Cyr (dans une interprétation trop en force et en vibe de "Emmenez-moi") complètent la distribution avec, comment ne pas l'évoquer, Stéfi Celma, qui nous parait être LA révélation du spectacle (parce que jusqu'à présent inconnue du grand public, mis à part de celui de Pascal Sevran puisque la jeune femme est finaliste en 2004 de son émission "Entrée d'artistes" sur France2), avec sa sensuelle voix, faisant d'elle une espèce de Victor Lazlo des années 2000, mais aussi sa présence et son énergie. On est impatient de la découvrir dans son registre personnel. A cela s'ajoute des musiciens live, et la participation au spectacle de Gérard Daguerre, le directeur musical.

"Je m'voyais déjà" n'existe donc que grâce à l'incroyable intensité émotionnelle du répertoire du grand Charles, ainsi qu'à la persuasion et à la fraicheur de ses protagonistes, car pour le reste...

"Grease", en revanche, a non seulement la fraicheur, le répertoire, les interprètes, mais aussi le livret (avec la vulnérabilité avouée de certains personnages, notamment Sandy et Rizzo, sur la seconde partie) et la mise en scène (de Jeanne Deschaux et Olivier Benezech). Alors c'est sûr, la version originale jouée en 1972 à l'Eden Theatre (situé off Broadway), et le film culte de 1978, l'y aide. Mais la mise en scène, façon “musical”, avec ses trouvailles propres à l'adaptation française, des douches aux coiffeuses (une idée cela dit déjà utilisée dans "Ali Baba" en 2000), fonctionnent en plus à merveille ! Dès les premières notes, joués en live également à l'aide de très bons musiciens, c'est un véritable enchantement, dévoilant une Cécilia Cara, idéale de candeur pour le rôle de Sandy (elle l'était déjà il y a huit ans pour celui de Juliette dans la comédie musicale de Gérard Presgurvic), et un Djamel Mehnane, aussi benêt que sexy, comme pouvait l'être John Travolta. Mais, la surprise ne s'arrête pas là, puisque chacun des autres rôles secondaires de la comédie musicale étonne. A en croire les applaudissements, Amélie Munier y fait l'unanimité. Cette dernière, épatante dans la peau de la méchante Rizzo, dévoile une puissante voix, fortement bien maitrisée (comme la plupart des autres bons chanteurs d'ailleurs), mais aussi une énergie et une maitrise du texte excellentes. Aussi bonne comédienne que chanteuse. David Ban, Nino Resende (excellent dans "Mooning"), Caroline Roelands, et Pedro Alves ne sont pas en reste, amenant chacun des personnages forts bien définis, aux grandes personnalités.

Si Stéphane Laporte a choisi d'adapter certaines chansons en français, et nous devons l'avouer, nous avons pris peur en l'apprenant, le résultat est fort réussi. Les textes sonnent, sont drôles, souvent naïfs (mais respectant donc pleinement l'état d'esprit de l'époque), et pas inutilement modernisés. Le vocabulaire utilisé est celui utilisé par la jeunesse des années 50/60, sans fausse note de jeunisme. Et là où Laporte a fait preuve d'intelligence, c'est qu'il a choisi de conserver les tubes de "Grease" (écrits et composés par Jim Jacobs et Warren Casey) en version originale, dans la langue de Shakespeare, de "You're The One That I Want" à "Summer Nights", en passant par "Rock'n'Roll Party Queen", afin que le public puisse les fredonner. Une belle preuve d'humilité.
Seules ombres au tableau, une Cécilia Cara qui gagnerait a y aller beaucoup plus franchement lorsqu'elle se métamorphose en femme fatale à la fin du spectacle (Olivia Newton-Jones, moins timide, faisait preuve de beaucoup plus de sex-apple), et un bal interminable dans la seconde partie.

Pour finir en beauté, le medley de fin, basé en partie sur le hit-single paru il y a dix-sept ans (Top 14 en 1991), est une excellent idée ; le public quittant ainsi la salle le sourire aux lèvres et des étoiles plein les yeux, sur l'air de "We Go Together". En un mot, "Grease", produit par Serge Tapierman et Mathieu Chevalier, est une très belle surprise, renvoyant au rang de spectacle communal "Je m'voyais déjà" de Laurent Ruquier.

Les derniers seront-ils les premiers ? On en prend le pari.

Pour en savoir plus, visitez theatredugymnase.com, et theatrecomedia.com.
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