Véronique Sanson

C'est souvent avec un mélange de désir et d'appréhension qu'on se rend à une première de Véronique Sanson. C'est sans aucun doute aussi une partie de ce qu'elle pouvait ressentir avant le rendez-vous tant attendu par plusieurs générations de fidèles qui la suivent depuis bientôt 40 ans pour les plus anciens ! Elle n'avait pas caché son trac immense dans diverses interviews ces derniers jours. Trac décuplé par ce pouce droit blessé lors d'un grave accident domestique qui risquait de compromettre les parenthèses piano-voix du show tant appréciées du public et où la musicienne révèle toute sa singularité, son cœur à vif, et qui créent ce lien unique avec ceux qui l'aiment.

Véronique Sanson sans le piano ne serait pas complètement Véronique Sanson même si depuis bien longtemps déjà elle arpente la scène et laisse reposer le temps de quelques chansons ce clavier qui est son plus intime confident. Sur 21 titres interprétés ce samedi 29 janvier 2011 à Longjumeau (Essonne), la chanteuse sera bien présente derrière son clavier pour une dizaine de chansons, accompagnée parfois de ses 10 musiciens ou avec juste une touche de basse et quelques délicates nappes de cordes ou même toute seule et sans choriste comme pour le déchirant "Redoutable" qu'elle n'avait pas chanté depuis presque 30 ans ! Et ce ne sont pas ses titres les plus rodés ni les plus évidents qu'elle choisira de chanter au piano. Ainsi, elle clouera l'assistance avec deux versions bouleversantes de "Le temps est assassin" et "Toute une vie sans te voir". Des sommets qui réveillent ce vieux rêve de fan de pouvoir un jour assister à un des trop rares concerts piano-solo qu'il lui arriva parfois de donner au cours de sa carrière.

Visionnez Véronique Sanson live piano-voix, "Ma musique s'en va" et "Redoutable" (dans les années 70) :

Mais ce nouveau spectacle, qui ne retient que 5 titres de la tournée 2007/2009, réserve d'autres belles surprises comme une interprétation du hit aux sonorités funk de 1977 "Bernard's Song" dans sa couleur d'origine ainsi que le très rock "On m'attend là-bas" (1974), fidèle à la version studio de l'album "Le maudit". Ces moments-là font vite oublier les étranges choix de titres plus anecdotiques comme "Annecy" ou "Radio Vipère" dont on pourrait facilement se passer, surtout quand on sait le nombre de perles cachées qui jalonnent le répertoire de la compositrice comme "Jet set" ou encore "Santa Monica" pour ne citer que celles-ci parmi tant d'autres…

Les nouvelles chansons s'intègrent parfaitement aux anciennes, du puissant "Je me fous de tout", aux teintes sud-américaines de "Je veux être un homme", en passant par "Juste pour toi", ballade poignante interprétée cette fois-ci tout en retenue, sur le fil. Les cuivres qu'elle aime tant et qui lui vont si bien font briller de mille feux sa "Drôle de vie" ou encore l'incontournable "Rien que de l'eau". Les titres les plus déroutants du dernier album "Plusieurs lunes" comme l'espiègle "Si toutes les saisons" ou encore le festif "La nuit se fait attendre" prennent toute leur dimension sur scène dans un cadre scintillant et pailleté comme la veste de la chanteuse qui rappelle les tenues qu'elle arborait lors de ses concerts mythiques de l'Olympia 1976 ou encore du Palais des Sports 1978.

Visionnez Véronique Sanson live, "Bernard's Song" (Palais des Sports 1981) :


Les créations lumières d'Alain Lonchampt contribuent à la beauté d'un spectacle qui prend son envol pour de nombreuses escales en France et en Europe en passant par l'Olympia du 28 février au 4 mars (déjà complet). Elle jouera les prolongations au Grand Rex de Paris, du 13 au 15 mai prochain.

C'est sur scène que Véronique Sanson a toujours pris toute son ampleur. Qu'importent les disques d'or, les classements divers d'albums, les télévisions, les déclarations choc et déformées mises en exergue par une presse trop souvent manipulatrice… Ce qui compte c'est ce qu'il se passe entre une artiste et son public, cette émotion palpable, ce frisson qui réchauffe l'âme, la fragilité et la force d'un instant où l'on oublie tout le reste et qui n'est autre qu'un moment d'amour partagé qui ne peut se vivre réellement que dans une salle de spectacle. C'est “l'irréparable” et l'irremplaçable !

Visionnez Véronique Sanson live, "Jet set" (Francofolies de Montréal 1989) :


Crédit photos live : Christian Meilhan.