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Mademoiselle K en interview

Cette année, Mademoiselle K joue cartes sur table. Elle veut "Jouer dehors", mais joue surtout franc jeu. Elle chante tout haut ce qu'elle dit tout bas mais ne joue pas sur les mots. Elle joue au piano mais ne délaisse pas la batterie. Katerine Gierak a répondu à toutes nos questions, que ce soit celles concernant son nouvel album à paraître le 17 janvier, "Jouer dehors", ou celles ayant rapport avec sa difficile adolescence. A vous de jouer !


Pourquoi vouloir "Jouer dehors" alors que le groupe est né de la scène ? (Jonathan Hamard, journaliste)
Mademoiselle K : Pourquoi ? Parce que j’ai l’impression de m’être progressivement enfermée pendant mes deux premières tournées. On a écrit le premier album, on a fait la première tournée, pour enchaîner sur le deuxième et la tournée suivante sans faire de pause. Pendant tout ce temps-là, je suis restée dans des espaces clos. Je n’ai pas eu le temps de pendre du recul, de me reposer et de jouer. Jouer, c’est quelque chose de simple, qui va de soi, fun, frais, spontané. C’est un peu ça la démarche de l’album, remettre les compteurs à zéro : regarder autour de soi, s'imprégner de ce qui nous entoure, et raconter ses histoires.

C’est un vrai travail d’orfèvrerie que d’écrire un morceau.
Tu as d’ailleurs passé plus d’un an à l’écriture de ce disque.
Oui. J’ai passé plus d’un an et demi à travailler dessus. Il y a même un titre que j’avais écrit il y a trois ans. A l'origine, je l'avais écrit pour un guitare/voix. Seulement, je n’arrivais pas à en extraire ce que je recherchais. C’est en me mettant au piano, en écrivant toute une partie sur mon clavier que les choses se sont progressivement mises en place. Ce que je veux dire par là, c’est que le recul m’a aidée pour écrire ce titre. C’est le temps qui fait qu’une chanson comme celle-ci peut murir. Le temps permet de simplifier les choses, d’aller à l’essentiel plutôt que de tout compliquer. C’est un vrai travail d’orfèvrerie que d’écrire un morceau. Il faut savoir être patient et ne rien laisser de côté. Il n’y a pas un seul endroit où tu peux oublier la feuille d’or : elle doit être partout. Ce temps nécessaire à la création, je ne l’ai pas pris pour mon deuxième album. D’ailleurs, je ne voulais pas le prendre, je l’ai conçu dans l’entrain de la première tournée.

Tu as beaucoup travaillé seule, mais aussi avec le reste de l’équipe qui compose le groupe.
Effectivement, c’est toujours le même groupe mais j’ai composé seule, comme pour le premier disque. J’ai même été plus loin puisque j’ai arrangé moi-même quelques morceaux. J’ai fait des parties de piano et de batterie sur certains d’entre eux. Tout ce travail, je l’avais pensé en amont. Je savais la direction dans laquelle je voulais aller. Je connaissais les nouvelles couleurs que je voulais donner à mon troisième opus. C’est quand même toujours la même équipe qui m’accompagne, même si je suis allée jouer avec d’autres personnes entre temps. J'ai eu la chance de faire quelques rencontres plus informelles qui m’ont surtout permise de jouer avec d'autres car je n’avais jouer qu'avec mon groupe au cours de ces cinq dernières années. A force, des mécanismes se sont installés et il n’y avait plus l’euphorie de se retrouver pour jouer comme au début.

Et ces rencontres que tu dis informelles, pourquoi ne pas t’en être servie pour travailler sur ce nouvel album si tu avais envie de renouvellement ?
Tout simplement parce que je connais mon équipe et que je l’aime. Ces rencontres informelles, c’était l’occasion de changer d’air. Elles n’ont rien donné, sauf qu’elles m’ont été utiles pour m’aider à m’ouvrir sur d’autres perspectives plutôt que de rester figer dans un carcan. Après m’être éloignée, j’ai été contente de retrouver mon batteur. J’avais envie d’évoluer et de faire évoluer mon groupe avec moi. Et les garçons l’ont fait, ils m’ont suivie. C’était vraiment important pour moi. Ils ont fait des morceaux comme "Que toi" qui sont très pop. Ils ont fait toute une partie vraiment superbe qui est représentative de leur évolution.

Tu parles de l’évolution du groupe d'un côté, et de la tienne d'un autre. Tu évoques tes envies et leurs travaux, comme si chacun avait préparé une partie chez soi, et que le reste de la troupe n’était là que pour t’accompagner. "Jouer dehors", c’est un album solo ou celui du groupe ?
Écoute, je pense tout simplement que j’ai beaucoup fait par moi-même J’ai écrit et composé pas mal de trucs. A la base, Mademoiselle K, c’était mon projet. J’ai rencontré les autres membres du groupe après, et ils m’ont suivis. Pour le premier album, j’avais déjà les rennes en main. Sur le deuxième, c’est vrai que la répartition du travail a été différente puisqu’ils ont pris beaucoup plus de places dans la composition et l’écriture. Pour "Jouer dehors", je suis allée plus loin dans la place que j’occupais. Les trois quarts de cet album, ce sont des prises faites en live. On a donc beaucoup travaillé en groupe. J’ai beaucoup plus travaillé seule : chaque titre a été travaillé, mûri par moi d’une part, et en groupe par la suite. Mais pour te suivre, j’avoue qu’il y a quelque chose de plus personnel.

Tu as choisi la pochette de l’album. Et là aussi tu es seule. Au regard de la photo, j’ai envie de te demander de qui tu penses être la cible ?
De qui tu veux ! En même temps, je n’ai été visée par personne. Je conjure le sort toute seule. Clairement, je me pose au centre de mon œuvre : je suis de face et j’assume, contrairement au premier disque où j’apparaissais de dos. C’était assez drôle d'ailleurs, parce que personne ne me connaissait et tout le monde voulait voir ma gueule. Il y avait une raison à ça. Pour le deuxième, on apparaît sous forme de marionnettes et là, comme je te le dis, c’est moi toute seule. Tu vois, aujourd'hui je me présente à toi et j'exprime l’idée que je ne faillirai pas à mon devoir.

Quand je m’adresse à quelqu’un, je ne vais pas prendre de gants. Je suis de face et j’assume.
Tu sembles effectivement sincère. Et pour t'exprimer, tu ne tournes pas autour du pot. Tu fais preuve de franc-parler, ce que j’avais pu entendre dans tes textes. Je le constate également depuis le début de cet entretien.
Oui, quand je chante, je ne change pas ma manière de dire les choses. Je chante comme je te parle. Quand je m’adresse à quelqu’un, je ne vais pas prendre de gants. Chanter du littéraire, ce n’est pas pour moi. Je ne fais pas de la musique classique ou des airs pour avertis. Pour moi, la chanson doit être directe. Ce n'est pas pour autant qu’il n’y a pas de subtilités. On peut parfaitement aller en profondeur sans avoir besoin d’utiliser des tournures pompeuses.

Ce franc-parler te conduit parfois à être vulgaire dans tes propos. Cette manière de t'exprimer, c'est véritablement le reflet de ta personnalité au quotidien ?
Jamais je ne me suis dit que je parle vulgairement. C’est juste mon franc-parler !

Ton expression n’est pas là pour déguiser ta pensée mais pour exprimer des sujets plus graves. Penses-tu réellement que tout est blanc ou noir ? Ne crois-tu pas qu’il y ait un juste milieu ?
Bien sûr qu’il y a un juste milieu ! Tu sais, on a beau chercher à l'atteindre mais on n’y arrive pas forcément. Des fois, tout est génial et dans la demi-heure qui suit, tout me déprime. Tout peut-être sujet à m’énerver, même les détails les plus infimes. Il y a des moments où je passe du blanc au noir en un rien de temps. Quand j’écris quelque chose, c’est que je l’ai pensé ou vécu. Je me livre totalement dans ce disque : je laisse tomber l’armure. "Que toi", c’est la vérité écrite noir sur blanc pour le coup. D’où ce tempérament entier que tu perçois.

Ce n’est pas parce que le mec à côté de toi est con que tu dois devenir con.
De ce disque, il transpire effectivement un tempérament de feu. Dans le titre "La corde", tu dis « Je chante tout haut ce que je dis tout bas ». Tu es en colère contre qui, contre quoi ? Te sens-tu à ta place dans la société ?
Dans l’un de ses sketch, Coluche disait « La société ne veut pas de nous, qu’elle se rassure, on ne veut pas d’elle ». Pour ma part, c’est un peu ce que je pense. Je ne rejette pas la société mais parfois elle m’énerve ! Il y a un comportement général qui me saoule. Il y a un titre que j’ai intitulé "Solidaire". Il ne figure pas sur cet album puisqu’il sortira sur l’album public qui paraîtra plus tard. Sur ce titre, je remercie les personnes qui m’ont apportée quelque chose à un moment ou à un autre dans ma vie. C’est un hommage à ces gens là. Dans notre société, il y a autant d’enculés que d’égoïstes. Ce n’est pas tant qu’ils soient mauvais. Ils peuvent être bons. Il y a tant de gens qui m’ont déçue : tu as un ami que tu trouves super un jour, et tu peux le prendre pour un connard le lendemain. Ce que je veux dire par là, c'est que je me sens bien à ma place dans la société mais j’avoue que j’ai beaucoup de mal avec la manière d’agir de certains. Par exemple, ça a dû t’arriver d’aller à une soirée ou tu t’es retrouvé au milieu de personnes qui ne te correspondent pas, avec lesquelles tu n’as rien à partager. Et là, tu vois bien la scission entre deux mondes : le tien, et celui des autres. Ce n’est pas parce que le mec à côté de toi est con que tu dois devenir con. Il ne faut pas adhérer au mouvement de masse, agir comme les autres pour être conforme. Et ça, je m’évertue à le dire dans cet album. Je pense que je vis très bien dans notre société parce que justement, j’ai encore le choix de faire ou ne pas faire quelque chose, adhérer à une manière de penser ou pas.



Et l’échappatoire que tu proposes pour résoudre ton problème, tu l’exposes dans le titre "La corde". Tu imagines un autre monde pour finalement en revenir à la corde. Le suicide, c’est ton alternative ? Tu y as pensé ?
Oui ! J’y ai déjà pensé. Mais c’est hyper dur parce que dans tous les cas de figure, c’est un moment de souffrance. En te jetant d’un pont, tu dois te faire mal. Et les médicaments, ils sont faits pour que tu gerbes. Mais bon, je tiens trop à la vie. Je préfère l’évoquer dans des blagues car je ne suis pas prête à passer le cap. Et s’il fallait choisir, je prendrais volontiers la corde.

J’ai encore en moi les hésitations qu’on peut avoir en étant adolescent.
Au final, de cet entretien, j’apprends à te connaître et j’ai le sentiment que tu es une éternelle adolescente.
Je pense que tu as en partie raison. J’ai donné des cours de guitare pendant deux ans dans une école. Avec les adolescents, ça se passait vraiment bien parce que je les comprends parfaitement. Pour moi, l’adolescence n’a pas été pas très facile. C’est une période très difficile faite de souffrances et de doutes. J’ai la mémoire très forte de ce qu’on peut vivre à cet âge-là. Peut-être parce que j’ai encore en moi les hésitations qu’on peut avoir en étant adolescent. Je me considère quand même plus adulte que ce que je pensais, même si j’ai encore au creux de moi ce côté enfant.

Je voudrais terminer en te demandant le bilan que tu fais de ta carrière, notamment en évoquant la scène. Mademoiselle K, c’est plus de trois cents concerts en quatre ans. Est-ce que la scène t’a apportée ce que tu attendais ? Qu’attends-tu encore aujourd’hui de ces rencontres avec tes fans ?
La scène m’a énormément comblée, mais énormément vidée aussi. J’ai été contente de terminer la deuxième tournée car j’étais totalement épuisée. Pour le troisième album, celui-ci, je n’ai pas pensé à la scène pour la première fois. Je voulais que ce soit super sur l’album sans imaginer ce que ça pourrait donner en concert. Scéniquement, ce sera donc totalement différent pour la prochaine tournée. Par exemple, il y a beaucoup plus de piano sur "Jouer dehors". Du coup, je serai pas mal devant le clavier sur scène. Il y aura beaucoup de nouvelles choses et tant d’autres que je rêve de faire. Je ne peux pas tout révéler car je garde encore des surprises. Je sais que j’ai encore beaucoup à attendre de la scène et de mon public.

Merci en tout cas de t’être ainsi dévoilée.
Merci beaucoup. Toi aussi tu touches ta corde… !



Visionnez le live de Mademoiselle K, "Me taire te plaire" pour Darkplanneur :
Pour en savoir plus, visitez mademoisellek.fr, ou son MySpace officiel.
Réservez vos places de concert en cliquant sur ce lien.

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