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vendredi 18 novembre 2011 19:30

Lulu Gainsbourg en interview

Le moins que l'on puisse dire c'est que Lulu Gainsbourg ne laisse personne indifférent. On l'adore ou on le déteste. Pour son tout premier album, il a décidé de rendre hommage à son père, Serge Gainsbourg. Ça donne "From Gainsbourg to Lulu", un disque où il reprend seul ou accompagné des titres de son papa. Il y a même des morceaux instrumentaux. Lulu nous parle de ce qu'il veut faire de sa carrière, de Johnny Depp (son autre père), de ses débuts en musique... Rencontre.


Votre premier album "From Gainsbourg to Lulu" est sorti cette semaine. C'est un disque hommage à votre père, Serge Gainsbourg, enregistré avec la collaboration de nombreux artistes. Pourquoi maintenant et pourquoi sous cette forme ? (Steven Bellery, journaliste)
Je ne voulais pas faire ça n’importe quand et n’importe comment. Ça ne fait pas des années que j’y pense. Ça fait un an et demi que l’idée est venue seulement.

Mais qu’est-ce qui vous a poussé à vous dire « c’est bon c’est le moment, je me lance » ?
Ça s’est fait naturellement, peut-être une question de destin aussi…

C’est votre premier album. Et pour ce premier disque, vous avez décidé d’enregistrer un album hommage à votre père Serge Gainsbourg. L’idée c’était de le faire maintenant pour être libre ensuite ?
Oui exactement. Quelque part j’en suis débarrassé. Voilà c’est fait. Mais c’est beaucoup de courage, beaucoup de boulot aussi. Reprendre Gainsbourg ce n’est pas facile d’autant plus quand on est son fils. Mais c’était une très belle expérience, j’ai pris beaucoup de plaisir. Mais c’est vrai que j’avais mis la barre haute. Je suis quand même content du résultat…

Sur cet album, vous proposez 16 reprises de votre père : en solo, en duo, simplement au piano et parfois vous n’êtes présent que comme réalisateur/arrangeur laissant la place à des reprises par d’autres artistes… On retrouve ainsi au fil du disque Vanessa Paradis, Rufus Wainwright, Mélanie Thierry, Iggy Pop ou encore Scarlett Johansson. C’était trop lourd comme héritage à porter seul ?
Il y a un peu de cela… Au Casino de Paris il y a quelques jours, j’apparaissais beaucoup plus sur scène que sur le disque. On me voyait plus que les invités, ce qui n’est pas forcément voulu… Ça n’était pas mon idée à la base. Et pour le disque, c’est la même chose. C’est carrément voulu que j’apparaisse si peu au micro. Je voulais être en retrait. Je ne suis pas interprète, je suis musicien. Quelque part producteur aussi…

Aujourd’hui je suis musicien, je ne suis pas chanteur.
Vous n’êtes pas interprète ?
Aujourd’hui je suis musicien, je ne suis pas chanteur. J’essaie. Je m’amuse. J’ai testé. Il y en a qui vont trouver que j’ai une belle voix, d’autres que j’ai une voix similaire à celle de mon père, d’autres que je chante comme une merde. Ça arrive… Il y a des gens qui aiment, d’autres qui n’aiment pas. Aujourd’hui, je ne me revendique pas comme interprète, chanteur. Peut-être qu’un jour je le serai, mais pas aujourd’hui.

Vous avez été formé au prestigieux Berklee College of Music (à Boston), ça veut dire que vous rêvez aujourd’hui d’une carrière de musicien jazz ?
Oui ! Aujourd’hui j’ai fait ce pas dans la musique, va pas falloir s’arrêter, faut continuer !

Justement, quel a été votre rôle exact alors sur cet album ?
J’ai tout fait ! J’ai dirigé, j’ai réalisé, j’ai arrangé, j’ai choisi les musiciens, j’ai choisi les artistes. Des fois je joue, des fois je chante. J’ai fait deux titres seul, trois en duo. C’est vrai que ça aurait été dommage de ne pas donner la réplique à Scarlett Johansson !

Comment vous avez fait pour convaincre autant de stars de rejoindre le projet ?
Le plus naturellement du monde. Tu contactes le manager de l’artiste que tu aimerais avoir. Tu lui présentes le projet et tu croises les doigts. J’ai de la chance d’avoir un père qui avait une grande notoriété. Ça a sûrement aidé.

Vous avez eu des refus ?
Oui évidemment ! Herbie Hancock (un grand jazzman, NDLR) et Jamiroquai n’ont pas pu le faire parce qu’ils étaient en tournée… Stevie Wonder, David Bowie, Leonard Cohen, Bob Dylan ont décliné gentiment.

Stevie Wonder, David Bowie, Leonard Cohen, Bob Dylan ont décliné gentiment…
C’est quand même une entrée dans la musique en fanfare. Vous vous retrouvez sur la scène du Casino de Paris à chanter avec Jane Birkin, Dani, Vanessa Paradis, Matthieu Chedid. Ça doit être hallucinant, non ? Ça ne se bouscule pas dans votre tête tout ce qui s’est passé en un an ?
C’est assez énorme ! Après, il n’y a rien de difficile. C’est vrai que la promo c’est ma première. Et quelle promo ! Quand t’assumes de faire un boulot, tu le fais jusqu’au bout. Tu ne le fais pas à moitié. Ça fait partie des responsabilités du métier d’artiste. Faut assumer même quand tu as dormi comme moi trois ou quatre heures (il baille).

C’est l’un des plus beaux hommages discographiques rendus à votre père à ce jour. On sent que vous avez digéré l’œuvre de votre père et que vous avez voulu mettre en avant toutes ses influences…
J’aime le changement. J’aime voyager. J’ai vraiment voulu mélanger tous les styles. Rester à un style, c’est ennuyant. Ça limite beaucoup de choses. Puis en touchant à tous les styles, on intéresse plus de gens. J’ai envie que les gens voyagent autant que moi à travers l’œuvre de mon père.

Comment avez-vous choisi les titres d’ailleurs ?
Au hasard ! En fonction des artistes aussi. J’ai essayé d’en choisir le moins possible parlés. Étrangement, on m’a fait la remarque qu’excepté "La Ballade de Melody Nelson", tout était en-dessous des années 70. Sûrement parce qu’il chantait plus à cette époque…

J’ai du mal à me dire : mon père, c’est une star.
Vous connaissiez toute la discographie de votre père ? Vous étiez fan ?
Pour moi, il a toujours été un papa. J’ai du mal à me dire : « mon père, c’est une star ». C’est un papa quoi… Pour cet album, j’ai tout réécouté. J’en écoute assez régulièrement. Pas tous les jours mais souvent… Et ça a toujours été le cas… Bizarrement, quand j’étais gosse j’écoutais surtout "You're Under Arrest". (17ème et dernier album studio de Serge Gainsbourg, un disque concept aux influences rap et électro-funks, NDLR)

Un autre homme a pris une grande place dans votre vie après la disparition de votre père, c’est Johnny Depp, que l’on retrouve dans cet album. Comment vous qualifieriez votre relation avec Johnny Depp ?
Ça remonte à loin ! J’avais 12 ans quand on s’est rencontré. A l’époque, je n’avais aucune idée de qui il était. Il n’était même pas avec Vanessa. On a gardé contact. On s’est retrouvé depuis que je vis aux États-Unis. Ça dépasse l’amitié. Quand je parle de Johnny Depp, c’est comme si je parlais de mon père. Il est devenu mon acteur fétiche également. Il est devenu un modèle. Il est cultivé, il a la même culture que mon père. Il est humble. C’est un père remarquable.

Dans votre album, on retrouve également des titres instrumentaux. "Le poinçonneur des lilas" est réinventé en version jazz. Il y a aussi un titre instrumental que vous avez composé en hommage à votre père…
C’est mon côté musicien. Pour le "Poinçonneur", je suis allé chercher Angelo Debarre et ses musiciens. Je voulais remonter à la source tous simplement.

L’album va sortir. Il va donc vous échapper un petit peu…
Oui c’est un soulagement ! Quelque part, j’ai réussi à faire quelque chose qui était très important à mes yeux. C’est déjà une réussite.

Vous avez envie d’une longue tournée et de présenter vos titres aux gens désormais ?
Pas du tout ! Malheureusement. Je ne suis pas interprète et j’ai encore moins envie de chanter les chansons de mon père devant des gens. Le Casino de Paris c’était magique, touchant différent. Ma performance n’était pas au top. Mais la bienveillance du public fait du bien.

Justement cette bienveillance ne vous incite pas à montrer sur scène ?
J’ai tout mon temps pour partir en tournée avec mes titres. Je ne veux pas m’imposer avec le répertoire de mon père.

Si j’ai bien compris "From Gainsbourg to Lulu" est l’acte zéro de votre carrière.
Exactement. Il est avant mon premier album.

Et il est pour quand ce premier album ?
Je me donne le temps, je suis jeune. Mon père a commencé à 30 ans ! J’ai encore 5 ans !
Pour en savoir plus, visitez la page Facebook officielle de Lulu Gainsbourg.

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