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Laurent Garnier : coup de gueule contre Roselyne Bachelot pour sauver le monde de la nuit

Par Théau BERTHELOT | Journaliste
Passionné par la musique autant que le cinéma, la littérature et le journalisme, il est incollable sur la scène rock indépendante et se prend de passion pour les dessous de l'industrie musicale et de l'organisation des concerts et festivals, où vous ne manquerez pas de le croiser.
Laurent Garnier exprime son mécontentement. Le célèbre DJ français adresse une lettre ouverte à Roselyne Bachelot pour pousser un coup de gueule face au monde de la nuit, totalement délaissé par les annonces gouvernementales. "Le manque flagrant de considération (...) est clairement interprété comme une forme de mépris incompréhensible" explique-t-il.
Crédits photo : Montage Pure Charts / Bestimage / Abaca
Ce n'est plus un secret pour personne. Depuis le début de la crise sanitaire liée au coronavirus, le secteur culturel, et notamment le monde du spectacle vivant, est en grand danger. Au fil des semaines, de nombreux artistes comme Slimane, Benjamin Biolay, M. Pokora ou Stephan Eicher ont poussé un coup de gueule contre les mesures floues du gouvernement quant à la reprise des concerts, spectacles et autres pièces de théâtre. Cependant, un autre secteur, moins représenté, monte au créneau : celui du monde la nuit. En effet, les discothèques, fermées depuis le début du confinement mi-mars n'ont toujours pas rouvert à l'heure actuelle et, entre le couvre-feu et la recrudescence actuelle des cas, elles pourraient rester portes closes jusqu'en avril 2021. « Les boîtes de nuit sont en train de crever. Pourquoi les bars sont rouverts alors que nous, avec des agents de sécurité en plus, on n'en a pas le droit ? » se désolent Régis Toutain et Dominique Allio, patrons de boites de nuit à Pontivy et Crédin, dans le Morbihan, dans les colonnes de Ouest-France. De plus, 300 établissements ont déjà déposé le bilan depuis le début de la crise selon Patrick Malvaës, le président du syndicat national des discothèques.

"On fait partie du secteur du spectacle mort"


Une situation intenable pour de nombreux acteurs de la nuit et plusieurs DJs phares dont Laurent Garnier. Sur son site internet, le célèbre artiste électro partage une lettre ouverte destinée à Roselyne Bachelot dans laquelle il pousse un coup de gueule contre le monde de la nuit délaissé et oublié par les récentes annonces gouvernementales. « J'ai eu la fâcheuse impression de ne pas avoir été concerné par vos annonces » commence-t-il. Laurent Garnier explique que pour dénoncer la situation floue de son secteur, il a demandé à sa femme puis à un ami, s'ils considéraient "le monde de la nuit" entrait dans le domaine "du spectacle vivant". « Après tout, quand je suis sur scène, derrière des platines, tel un comédien, un musicien ou un danseur, j'ai l'impression de livrer, moi aussi, des prestations vivantes. Mais la moue dubitative que j'ai récoltée en guise de réponse n'a pas vraiment apaisé mes craintes » dit-il en évoquant la réponse de sa moitié, tandis que son ami lui rétorque : « Ah non Laurent, nous on fait dorénavant partie du secteur du spectacle mort… Roselyne l'a annoncé maintes fois, le monde de la nuit ne dépend pas d'elle mais du ministère de l'intérieur ! ».

"La fête est terminée, depuis maintenant 8 longs mois"


Ainsi, Laurent Garnier pointe du doigt la non-réaction de la ministre de la Culture face au monde la nuit, privé de toute réouverture depuis la mi-mars, alors que les restaurants ou les salles de cinémas et de spectacles ont, pour certains, pu rouvrir. « S'il est dramatique de constater qu'ils tournent tous au ralenti, et de façon extrêmement contrainte, ils ont quand même eu, tant bien que mal, quelques possibilités de réouverture. En revanche, j'aimerais attirer votre attention sur le fait que, depuis début mars, le secteur "de la nuit et des clubs" (dont je fais intrinsèquement partie) est quant à lui totalement à l'arrêt. Pour nous la fête est terminée, et ce depuis maintenant huit longs mois » écrit-il tout en ayant une pensée pour tous les employés du secteur comme les intermittents, les promoteurs, les régisseurs ou encore les graphistes et imprimeurs.

« Je pensais bêtement que les choses avaient évolué et qu'avec mes petits camarades platinistes nous avions dignement gagné notre statut et notre ticket d'accès au "monde de la culture". Mais force est de constater qu'apparemment ce n'est toujours pas le cas » ironise-t-il également, ajoutant que, lors du discours de Roselyne Bachelot sur France 2 le 22 octobre dernier, l'annonce des aides financières accordées au monde culturel n'a pas concerné les bars et discothèques : « Une fois encore, et ce maintenant depuis de trop longs mois, l'espace culturel de la nuit a lui été totalement ignoré. Le manque flagrant de considération, l'ignorance émanant de votre ministère envers le secteur de la nuit et des clubs est clairement interprété par beaucoup d'entre nous comme une forme de mépris incompréhensible. Car que vous le vouliez ou non, les clubs et les lieux de cette culture nocturne étaient (quand ils étaient ouverts) des endroits bouillonnant de création, d'imagination et de partage ». Enfin, Laurent Garnier conclut en assurant être dans une impasse : « J'avoue qu'aujourd'hui, ne sachant plus très bien si je suis un "artiste du spectacle mort", un "artiste de l'intérieur", ou "pas un artiste du tout" je commence à avoir de sérieux doutes ». En espérant que son appel soit entendu...

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