Helena

Bob Jeusette / RCA
Un premier album est comme une carte de visite, une prise de contact. L'histoire d'Helena, tout le monde la connaît. Etudiante en orthophonie timide et réservée, la jeune femme s'est lancée dans le pari fou de tenter la "Star Academy" alors qu'elle n'avait jamais osé chanter hors de sa chambre. Pas même devant ses parents ! Son talent brut la mènera finalement jusqu'en demi-finale de l'émission, scellant sa rencontre avec un public qui va tomber sous le charme de son humilité attachante et de sa voix sensible. Mais encore faut-il savoir transformer cette popularité soudaine, fugace aussi, en un projet musical concret ! C'est donc dans une petite bulle, avec un trio composé de Vincha, Jonathan Cagne et Romain Botti, qu'Helena façonne sur son premier album un univers artistique volontairement pensé, et conceptualisé, comme un journal intime, avec ce surnom "Hélé" qui fait tomber les barrières pour instaurer d'emblée une proximité.



Puisqu'elle se raconte en chanson, Helena commence par le commencement : son amour pour la musique, né à la ferveur d'un cadeau anniversaire. Ballade en piano-voix dépouillée qui remonte le fil du temps, "Mon piano et moi" est une jolie entrée en matière, un peu sage mais qui sert parfaitement son but : laisser la chanteuse faire les présentations, avec ses propres mots. Si "Tout a changé" dans sa vie, rien n'a vraiment changé : elle reste une jeune femme de 22 ans pétrie d'espoir et de doutes, qui navigue à vue et parfois la "Boule au ventre" sans maitriser les codes de l'amour ("Mauvais garçon" et son pendant "Gentil garçon") ou d'une société coincée dans ses névroses et obsessions sur la beauté, dénoncées avec beaucoup d'esprit dans "Summer Body". Un titre qui concentre l'essence d'Helena l'artiste : des textes authentiques ne manquant ni de spontanéité ni de fond !

Ancré et incarné, un disque réussi

Bien dans son époque, Helena s'inscrit pleinement dans le sillage d'une génération influencée par Angèle, consoeur belge à qui l'on pense évidemment sur le percutant "Mauvais garçon" mais aussi dans le phrasé de "Tout gâcher", l'une des petites bombes d'un disque qui, bien plus qu'on le soupçonne, se revendique d'une scène pop française galvanisante. Si la jeune star excelle dans les ballades à fleur de peau ("Bonne maman", dédiée à sa grand-mère disparue), oui, on danse, on vibre et on fredonne à tue-tête les refrains accrocheurs de "Pieds sur terre" (coup de coeur !) et "Karma", tube potentiel évoquant le meilleur de Taylor Swift et qui reflète le penchant de cet album pour d'autres orchestrations comme les guitares. Des sonorités, musclées ça et là par des saillies électroniques et un travail minutieux côté production, qui se fondent à merveille avec son interprétation, toujours pleine de coeur et de chaleur.



Le principal reproche que l'on peut formuler à l'album "Hélé" est, finalement, sa naïveté qui transperce par moments et tient presque parfois de l'émulsion adolescente (« Je veux tout dire mais je bégaie / J'finis par dire que je t'aime... bien »). Pour autant, cette volonté de ne pas juste capitaliser sur une personnalité mais bien de délivrer une vraie proposition artistique est plus qu'admirable. On est conquis et à en juger par les premières performances du disque en streaming, le public aussi !