Ed Sheeran

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De toute évidence, Ed Sheeran ne nous a pas menti en affirmant avoir choisi ce nom, "Divide", pour refléter la diversité des compositions de son nouvel album. Quatre ans après ses débuts sur "+" (2011) et deux ans après "x" (2015), qui a fait de lui la plus grande star masculine de la pop actuelle, l'artiste britannique revient avec l'ambition de se mesurer à l'intouchable Adele. Prétentieux ? Peut-être, mais l'objectif est à sa portée. Comme son homologue, Ed Sheeran est capable de soulever les foules à la seule force de sa voix, de remplir des stades seul sur scène avec sa guitare et sa pédale à loops, d'écouler des millions de disques et de signer des tubes instantanés aux quatre coins du monde. "Shape of You", le premier extrait de "Divide", est en la preuve : qu'il sorte de sa zone de confort en concoctant un titre aux accents dancehall - destiné à l'origine à Rihanna - ou fasse chavirer le coeur de ses fans avec des ballades acoustiques désarmantes ("Thinking Out Loud"), Ed Sheeran, en sa qualité d'auteur-compositeur-interprète et producteur, sait tout faire. Et il n'a que 26 ans !

Brouiller les pistes

Ce grand écart, c'est justement ce que fait la force et la faiblesse de ce troisième opus, concocté avec une brochette de talents dont Benny Blanco, Ryan Tedder, Julia Michaels, Labrinth, Johnny McDaid et Jessie Ware. Agrémenté de quatre titres dans son édition deluxe (la seule à posséder, cela va de soi), "Divide" contient tellement d'influences et de styles qu'on a parfois le sentiment confus d'être face à un patchwork mal assorti. Comme si Ed Sheeran, tiraillé entre son envie de proposer des compositions intimes et son ambition de conquérir la planète, n'arrivait pas à choisir !

Mais commençons par le début. Avec "Eraser", le chanteur - grand fan d'Eminem - injecte des effusions rap à son jeu de guitare, aiguisant son flow pour remettre les pendules à l'heure. « I think that money is the root of evil and fame is hell » clame-t-il, les nerfs à vif, dans un monologue morose sur lequel il détaille les revers de la célébrité, revient sur son parcours et s'inquiète du regard différent que lui porte les gens maintenant qu'il a remporté un Grammy. Mais parce qu'il croit en son potentiel, Ed Sheeran se dit prêt à affronter toutes les épreuves. Comme sur le séduisant "New Man", on retrouve ici des réminiscences de l'excellent "You Need Me, I Don't Need You" (2011) et ce n'est pas pour nous déplaire !

Regardez le clip "Castle on the Hill" d'Ed Sheeran :

Voyage en Irlande

Ed Sheeran fait honneur à la culture hip-hop, avec lequel il a forgé sa fibre artistique, sur un troisième morceau : "Galway Girl". A lui seul, ce titre au potentiel tubesque énorme cristallise toutes les envies et libertés du musicien, qui n'hésite pas à mélanger couplets au beat urbain, en rap, à un refrain de folk irlandaise où se mêlent cornemuse, violon, Bodhrán (instrument à percussion) et piano ! Une vraie pépite, aussi curieuse qu'audacieuse. L'interprète de "Sing" a d'ailleurs dû batailler avec son label pour l'imposer sur l'album mais a suivi son instinct, certain qu'elle sera « fucking massive ». On valide. Des prises de risques similaires, le troubadour des temps modernes en prend aussi sur "Nancy Mulligan", histoire d'amour romancée sur ses grands-parents qui sonne comme un pur produit celtique, et "Bibia Be Ye Ye". Un concentré de soleil afro-pop concocté avec Fuse ODG, où le Britannique glisse quelques mots en Twi, un dialecte ghanéen ! Au rayon des hits potentiels, on ajoutera également "Barcelona", hymne festif dont les quelques clichés appuyés ("Sagrada Familia", "sangria", "viva la vida"...) ne diluent pas sa bonne humeur communicative.

A la conquête des coeurs

Mais pour le grand public, Ed Sheeran reste indubitablement associé au mot "ballade". La majeure partie de "Divide" prend donc la forme d'une vibrante déclaration d'amour à sa petite amie Cherry Seaborn, qu'il connait depuis ses années collège à Framlingham (là où se déroule l'action de "Castle on the Hill"). Le coeur à nu, le musicien expose ses vulnérabilités sur le bluesy "Dive", "How Would You Feel (Paean) ou "Hearts Don't Break Around Here", dont le refrain marque une inversion des rôles (« I feel safe when you're holding me near / Love the way that you conquer your fear »). Ce romantisme désarmant atteint son paroxysme sur "Perfect", qu'on s'imagine sans peine devenir un classique lors des mariages et qu'Ed Sheeran considère « meilleure que "Thinking Out Loud" ». On ira peut-être pas jusque-là (d'autant que l'ombre d'Eric Clapton se fait clairement sentir) mais force est de reconnaître que le chanteur excelle particulièrement lorsqu'il laisse parler ses sentiments !


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