Christophe Maé, James Blunt, Cigarettes After Sex : 3 albums au banc d'essai

Pure Charts passe en revue trois albums phares du moment. Alors que Christophe Maé nous fait découvrir "La vie d'artiste", James Blunt tente un retour aux sources avec "Once Upon A Mind" tandis que Cigarettes After Sex nous envoûte avec "Cry". Critiques, en quelques lignes.
Crédits photo : Montage Pure Charts / DR

Christophe Maé | "La vie d'artiste"


Showtime ! 15 ans qu'il roule dans sa bosse dans le milieu. Alors forcément, la vie d'artiste, ça le connaît ! « Tel un Jack Sparrow », Christophe Maé revient faire chantonner la France avec un cinquième album nomade qui se révèle être la bonne synthèse de ses deux derniers disques, l'enjoué "Je veux du bonheur" (2013) et l'introspectif "L'attrape-rêves" (2016). Conforté par l'accueil réservé à la ballade "Il est où le bonheur" qui marquait une rupture de ton assez franche avec les hymnes populaires qui ont fait son succès, Christophe Maé poursuit son évolution en 12 chansons « aux couleurs métissées » enregistrées dans les conditions du live. Dès l'entame avec "À nos amours", sorte de toast musical, le décor est posé : les notes de piano fusent, les trompettes résonnent, le phrasé de la voix interpelle pour mieux accaparer l'attention. Bohème ou saltimbanque, qui se raconte en miroir sur l'intense "Casting", l'homme à l'harmonica témoigne encore de sa fascination pour la Louisiane, ses cuivres, sa richesse. Dans cet élan d'ouverture, Christophe Maé convie polyphonies corses, voix cubaines et même... ses enfants, Jules et Marcel, dont on entend les rires jaillir sur "Les mêmes que nous". L'esprit de famille traverse d'ailleurs tout le disque, que ce soit dans sa dimension "boeuf entre musiciens" ("La fin de l'été") ou dans le texte de "La plus jolie des fées", déclaration d'amour à sa "Mama" aussi simple que touchante. L'artiste tente par-là de se rapprocher d'un Francis Cabrel mais cette influence est un chouia trop évidente : on tombe presque dans le mimétisme vocal sur quelques lignes du titre "Un week-end sur deux", où l'accent paraît même appuyé. En résumé, les programmateurs radio seront au régime sur cet album moins produit et plus organique mais cette volonté de laisser l'essentiel - la mélodie, la voix - s'avère autrement plus passionnante. YR

Ça ressemble à un disque taillé pour le live et le plaisir de partager
A écouter : "A nos amours", "Les gens", "Casting", "Bouquet de Roses", "Mon pays", le magnifique "La plus jolie des fées"
A zapper : "Les mêmes que nous", mignon mais agaçant




James Blunt | "Once Upon A Mind"


En eaux troubles Après l'accueil timide réservé à son dernier disque "The Afterlove", James Blunt annonce un retour aux sources sur "Once Upon A Mind", présenté comme le successeur du culte "Back to Bedlam", sorti il y a 15 ans. Sauf que ce n'est pas vraiment le cas. On le sait, l'artiste ne veut plus être enfermé dans une image de chanteur romantique, qui lui colle à la peau depuis le méga tube "You're Beautiful". C'est donc pour cette raison, et pour moderniser son répertoire, qu'il s'évertue à inclure des sonorités électro sur ses titres depuis plusieurs années. Et c'est donc encore le cas ici sur quelques titres, qui viennent tuer le propos global du disque. D'autant que le constat est clair, James Blunt n'a rien perdu de son talent pour créer des mélodies radiophoniques portées par des accords de guitare accrocheurs et sa voix touchante. L'auditeur sera donc surpris d'entendre sur ce "Once Upon A Mind", décrit comme son album le plus personnel, des morceaux sans saveur rappelant Avicii ("The Truth", le titre d'ouverture !) ou Kygo ("5 Miles"), et des arrangements clichés lorgnant vers The Lumineers ou Mumford & Sons ("Champions", "Halfway"). Souvent, les choix de production ne valorisent pas les textes et les mélodies du chanteur, et vont même jusqu'à annuler la charge émotionnelle ("Youngster", que Maroon 5 pourrait chanter). Dommage car James Blunt évoque pourtant ici de nombreux sujets intimes et universels, comme la fuite du temps et la mort. Et il n'est jamais aussi captivant que quand il délaisse ces artifices pour toucher en plein coeur. C'est le cas sur "Monsters", une magnifique chanson dédiée à son papa en attente d'une greffe de rein, dotée d'un texte déchirant sous forme de déclaration d'amour et de lettre d'adieu d'un fils à son père, sur laquelle sa voix s'étrangle sous l'émotion. D'autant que James Blunt sait bien qu'il ne suffit pas de suivre le mouvement pour signer un titre fédérateur qui a de la saveur, bien au contraire. Quand il accélère le rythme sur "I Told You", sans électro, ou sur le premier single "Cold", l'artiste vise juste. L'album aurait donc gagné en authenticité sans tout ce superflu qui habille des chansons qui ont pourtant une âme. Il n'y a qu'à écouter la version acoustique de "Cold" pour s'en rendre compte. JG

Ça ressemble à une promesse non tenue
A écouter : le tube "I Told You", "How It Feels To Be Alive" époque premier album, l'hymne "The Greatest", "How It Feels To Be Alive" puissant, "Stop The Clock"
A zapper : "5 Miles", "Champions", pastiches datés, "Halfway"




Cigarettes After Sex | "Cry"


Black rain. Le groupe a bercé nos nuits pluvieuses, nos insomnies, nos ruptures, nos déceptions amoureuses. Deux ans après un premier essai aussi doux que berçant, Cigarettes After Sex passe la seconde. Avec "Cry", la formation californienne n'y va pas par quatre chemins. Ce deuxième album n'est pas là pour nous apporter de la joie mais plutôt pour faire venir les larmes. Avec des titres comme "Don't Let Me Go", "Cry", "Hentai" (oui, oui !) ou "You're The Only Good Thing in My Life", le doute n'est plus permis. Mais à son habitude, le groupe enrobe ses désespoirs d'une douceur réconfortante. Mention spéciale au sublime "Kiss It Off Me", véritable perle de l'album. Avec "Cry", les "Cigs" évoquent donc l'amour sous toutes ses formes, du premier coup de foudre à la séparation douloureuse, en passant par les relations toxiques. Et nous aussi, on tombe amoureux de ces mélodies aériennes, de ses guitares à fortes reverb' et de la voix onirique de Greg Gonzalez. Même si ce dernier débute "You're The Only Good Thing in My Life" d'un sec « You only fuck for love », avant de suggérer « Everything is wrong but it's alright ». Déroutant, mais si séduisant. Cependant, le groupe se frotte au pire exercice : celui du deuxième album. Entre appliquer la même recette et opérer un virage à 180°, les texans ont fait leur choix. On peut ainsi leur reprocher une certaine linéarité dans les mélodies. Ou pour dire plus simplement, avoir l'impression d'entendre neuf fois la même chanson, ce qui était déjà le cas sur le premier album. Malgré cela, "Cry" reste un disque envoûtant qui nous séduit autant qu'il nous charme. Vous saurez quoi faire de votre prochain dimanche soir pluvieux. TB

Ça ressemble à un deuxième essai séduisant mais sans prises de risques
A écouter : les somptueux "Kiss It Off Me" et "Heavenly", "Touch", la douce conclusion "Pure"
A zapper :"Don't Let Me Go", "Hentai"


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