Crédits photo : Logo de Deezer
Il y a quelques jours, Deezer a annoncé un changement radical dans le mode de rémunération des artistes. Jusqu'ici, la plateforme française rémunérait les ayants droits à hauteur de 70%, tout comme Spotify. Mais les artistes étaient payés en fonction de leur popularité globale, c'est-à-dire selon leur nombre d'écoutes. Selon un exemple pris par Deezer, si un utilisateur (avec un compte payant à 10 euros) écoute 90 fois le même artiste, tandis qu'un deuxième abonné payant lance 10 fois un autre chanteur, celui qui a été écouté 90 fois recevra 90% des revenus tandis que le second ne touchera que 10%. De plus, les 10 euros mensuels de son compte finançaient tous les genres, du rap à la variété, même si l'auditeur n'écoute que du jazz par exemple. Deezer milite depuis deux ans pour une répartition plus équitable des artistes et entend passer à la vitesse supérieure. Avec ce nouveau système appelé UCPS ("User-Centric Payment System) ou
Streaming Equitable, chaque artiste sera payé sur la base des goûts des utilisateurs. Les 10 euros du compte payant seront désormais reversés uniquement aux artistes que l'auditeur écoute individuellement.
AVANT
Crédits photo : le mode de revenu des artistes auparavant sur Deezer
APRÈS
Crédits photo : le mode de revenu des artistes désormais sur Deezer
Cette avancée devrait marquer un nouveau cap dans la consommation mondiale de la musique. Selon le rapport de l'IFPI, le streaming a représenté, en 2018, 47% des revenus mondiaux du marché de la musique. Pour le premier semestre 2019, le chiffre montait à 80% aux Etats-Unis tandis qu'en France il a atteint les 63%. Ce #StreamingEquitable permettra donc, selon Deezer, de «
corriger les anomalies engendrées par le système actuel », «
soutenir la création locale et les genres musicaux de niche » en ne rémunérant que «
les artistes que vous écoutez » ou de «
combattre la fraude ». Le but derrière ce système est «
d'aider tous les artistes, quelle que soit leur notoriété, à rencontrer le succès ». Pour l'instant, 14 labels soutiennent l'initiative dont Because Music (Christine and the Queens, Justice, Phoenix, Metronomy...), Six&Sept (Zazie, Marie-Flore, Jérémy Frerot...), Tôt ou Tard (Vianney, Foé...) ou Believe (Björk, Jul, M83, Jeanne Added...). Les majors (Universal, Sony, Warner) n'ont cependant pas encore emboîté le pas. Deezer, qui représente 37,5% de part de marché des revenus issus du streaming français en 2018, suivrait ainsi un modèle déjà expérimenté chez
munki, service de streaming audio pour enfants qui propose un modèle de répartition UCPS unique en France depuis 2016.
Une faible rémunération dénoncée par Prince et Taylor Swift
Cette directive devrait faire plaisir aux artistes qui, depuis des années, se plaignent d'un mode de rémunération trop faible sur ces plateformes de streaming, pourtant devenues essentielles. On se souvient de
Taylor Swift qui avait réussi à faire plier Spotify et Apple Music, dans une lettre ouverte
s'insurgeant contre la faible rémunération des artistes : «
Je trouve cela choquant, décevant et totalement contraire à cette entreprise historiquement progressiste et généreuse. Nous ne vous demandons pas des iPhone gratuits. Ne nous demandez pas de vous fournir notre musique gratuitement ». Son album "1989" n'était alors pas disponible sur la plateforme d'Apple. Quelques années plus tôt, Prince affirmait déjà son refus de voir sa musique sur iTunes, YouTube ou Spotify, considérant que ces méthodes d'écoutes n'étaient absolument pas rentables pour l'artiste : «
L'Internet est fini. Je ne vois pas pourquoi je devrais donner ma musique à iTunes ou n'importe qui d'autre. Ils refusent de me payer en avance pour ça et s'énervent quand je refuse » déclarait le Kid de Minneapolis en 2010.