Vanessa Paradis

Crédits photo : Capture d'écran YouTube
Maria-Josée Léao Dos Santos vient de mourir à l'âge de 64 ans. Peu connue du grand public, cette figure des "nuits parisiennes" a inspiré l'un des plus gros tubes des années 80 : "Joe le taxi" de Vanessa Paradis. Née au Portugal, Maria-Josée arrive en France dans les années 1970, afin de fuir le régime de Salazar. Installée dans les Yvelines, elle enchaîne les petits boulots avant de se lancer en tant que taxi, sur le conseil d'un de ses amis. Écumant les discothèques de la capitale et le quartier lesbien de Pigalle, la jeune femme au look garçonne « commence à faire le taxi pour des personnalités du showbiz », comme le raconte aujourd'hui sa compagne. Des personnalités parmi lesquelles le parolier Étienne Roda-Gil. Homme de l'ombre, l'auteur dit avoir écrit pas moins de 700 chansons à son actif dont de nombreux succès pour Julien Clerc ("Ce n'est rien") et surtout pour Claude François ("Magnolias for ever", "Alexandrie, Alexandra").

Une histoire atypique au cœur d'un tube immédiat

Une fois dans le taxi avec Maria-Josée, ils se mettent à discuter de leurs vies respectives alors que de la musique portugaise ou de la rumba passe en fond sonore. Sa gouaille et son histoire sont trop belles pour être vraies. Sur le coup, le parolier est frappé d'une inspiration et demande subitement à la conductrice : « ça te dérange si j'en fais une chanson ? ». Elle accepte mais ne le reverra jamais, tout comme elle ne rencontrera jamais l'interprète du titre. Étienne Roda-Gil écrit donc le texte de "Joe le taxi" qu'il propose à Vanessa Paradis. Nous sommes en 1987. Âgée de 14 ans, la jeune chanteuse s'est déjà fait remarquer avec un passage dans "L'école des fans" puis un premier single en 1983, "La Magie des surprises parties", signée par les Forbans.

Souvenez-vous de "Joe le Taxi" de Vanessa Paradis :


C'est avec ce fameux "Joe le taxi" qu'elle connaît un succès plus que fulgurant. Sorti le 27 avril 1987, le single est le véritable tube de l'été et se classe 11 semaines sur la première marche du Top 50, devant Madonna, Michael Jackson, Jean-Jacques Goldman ou George Michael. Retrouvée en 2017 par France 2, Marie José se souvient de la première fois où elle a entendu le titre : « Ça m'a sonné à moi dans mon oreille... "Joe le taxi il va pas partout", je me suis dit "mais c'est ma chanson à moi". J'étais fière ! ». Et si Etienne Roda-Gil a changé quelques détails, comme la couleur du taxi (devenu jaune et non plus blanc) et le sexe du chauffeur, les paroles sont criantes de vérité.

Il se murmure qu'à cette époque, "Joe le taxi" passe 450 fois par semaine à la radio (soit 64 fois par jour) et qu'il s'en vend 30.000 exemplaires par jour. Au bout du compte, plus de 1,3 millions de copies s'arracheront en France, aidées par un clip diffusé en boucle et entré dans la légende : à seulement 14 ans on voit Vanessa Paradis se déhancher dans un pull couleur pêche beaucoup trop grand pour elle, à côté d'un taxi jaune typique de New-York. Mais très rapidement, le succès dépasse les frontières françaises : numéro 1 en Suisse, en Belgique, en Israël ou au Canada, top 10 dans toute l'Europe, "Joe le taxi" s'arrachera plus de 3,2 millions d'exemplaires dans le monde. Une version espagnole est même enregistrée pour satisfaire la demande.

Un succès international qui fait des jaloux

Avec de nombreux passages télé et couvertures de magazine, L'Obs décrit le phénomène, après coup, comme « la chanson qui a inondé les radios ». Mais le revers de médaille arrive très rapidement : cette surexposition provoque le ras-le-bol et Vanessa Paradis devient subitement la tête de turc du milieu. Le summum est atteint quand elle est huée durant sa prestation au Midem en janvier 1988. La chanteuse va alors sombrer dans la dépression dont elle sort petit à petit lorsqu'elle voit que le titre cartonne à l'international. En Angleterre, par exemple, c'est la première fois qu'un titre francophone atteint le top 3 depuis "Je t'aime moi non plus" de Serge Gainsbourg et Jane Birkin, vingt ans auparavant. Boostée par ce début de carrière internationale, elle publie son premier album "M et J" en juin 1988, contenant "Joe le taxi" et "Marilyn & John". Malgré l'énorme retentissement mondial qu'elle vient d'avoir, le disque ne fonctionne qu'en France avec plus de 350.000 ventes. En mars 89, ledit single arrive enfin aux Etats-Unis, mais le succès ne sera pas au rendez-vous, la chanteuse abandonnant toute promotion pour le tournage du film "Noce blanche".

La suite de sa carrière, tout le monde la connait. Des collaborations avec Serge Gainsbourg, Lenny Kravitz ou -M- et des classiques à la pelle ("Divine idylle", "Tandem", "Be My Baby"...). Vanessa Paradis reprend d'ailleurs souvent son premier tube sur scène, dans des versions totalement différentes de l'originale. Elle devrait faire de même sur la tournée de promotion de son dernier album "Les sources" cet été.

Découvrez une des versions live de "Joe le taxi" :