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Cats on Trees en interview : "Sirens Call était un accident heureux"

Par Yohann RUELLE | Journaliste
Branché en permanence sur ses playlists, il sait aussi bien parler du dernier album de Kim Petras que du set de techno underground berlinois qu'il a regardé hier soir sur TikTok. Sa collection de peluches et figurines témoigne de son amour pour les grandes icônes de la pop culture.
Quatre ans après s'être révélé au public, Cats on Trees est de retour avec "Neon", un deuxième album lumineux. Pour Pure Charts, Nina et Yohan explique pourquoi le succès n'a pas été facile à vivre, comment leur amitié à sauver le groupe et pourquoi ils ont ressenti le besoin de se réinventer.
Crédits photo : Louise Carrasco / Tôt ou Tard
Propos recueillis par Yohann Ruelle.

Votre deuxième album "Neon" arrive quatre ans après le premier. Ça peut paraître long dans l'industrie d'aujourd'hui ! C'était le temps nécessaire pour que vos nouvelles chansons arrivent à maturation ? Ou pour vous remettre de ce tourbillon ?
Nina : Un peu tout ça. (Sourire) On a énormément tourné, défendu cet album sur plus de 200 dates. Ce n'était pas de tout repos ! Même si c'est génial ce qu'on vit et qu'on a la chance d'exercer à la fois une passion et un métier, on ne se rend pas compte des bouleversements que ça occasionne. Il y a de la fatigue physique, de la fatigue psychologique... Nous on essaie de faire attention à l'humain avant tout, et aussi à notre relation. Il a donc fallu rentrer, se poser, souffler, prendre soin de nous personnellement et de nous deux ensemble. Sortir, voir d'autres concerts... Retrouver un rythme de vie normal ! C'est drôle car quand on a recommencé le studio, on s'est dit qu'on allait faire comme si on allait au bureau. On s'est imposé un horaire bien précis le matin et le soir, pour créer un cadre qu'on n'avait pas. On en avait vraiment besoin à ce moment-là. Mais on s'est très vite rendu compte que ça ne nous convenait pas du tout. (Rires)
Yohan : On voulait vraiment être sûr de créer les chansons dont on rêve. Se réinventer. Prendre le temps d'aller jusqu'au bout de nos idées. On compose tous les deux énormément donc on avait beaucoup beaucoup d'idées à travailler et à mûrir. Et puis comme le dit Nina, il fallait se nourrir d'expositions et de concerts, de choses qui alimentent la création pour composer l'album qui nous plaît.

Il a fallu se poser, souffler
Le succès foudroyant du titre "Sirens Call" a-t-il été facile à vivre ?
Nina : Ça a été tellement rapide... Presque du jour au lendemain. On a la chance avec Yohan d'être d'eux et comme on est très très amis, on s'épaule beaucoup. On habite à Toulouse donc finalement un peu loin de Paris, même si on vient souvent. On a un ancrage avec des amis et une famille stables. C'est ce qui nous a aidés à tenir et à ne pas passer du côté obscur.

Vous ne vous attendiez pas à un tel accueil ?
Yohan : Non, ça a été hyper surprenant.
Nina : C'est une première signature, un premier label. On arrive tout frais, en se disant qu'il faudra le temps de s'installer, qu'on va sortir un premier album gentiment puis un deuxième, etc. Mais là, l'album était pas encore sorti que le single cartonnait déjà à fond ! On a fait énormément de promo, les concerts étaient tous complets, la taille des salles s'est agrandie très vite...
Yohan : Et ça a duré dans le temps. Il y a eu plusieurs singles forts et du coup la promotion de cet album s'est étalée sur plus de deux ans. C'était fou.
Nina : On ne s'est jamais posé. On était tout le temps ailleurs. Le seul repère qu'on avait, c'était nous deux. C'était le seul lien avec notre vie là-bas. Etant parents, c'est compliqué de ménager une vie de famille avec une vie d'artiste. Et quand c'est nouveau, ça peut être dur. Même si pour rien au monde je ne changerais de métier.




Être artiste, c'était un "plan B" pour vous ?
Nina : Non. On a toujours voulu faire de la musique, sous n'importe quelle forme. J'ai commencé très tôt et Yohan aussi. Si on ne s'était pas rencontré, on serait quand même dans cette voie.
Yohan : Tout converge vers la musique. Nous ce qui nous passionne, c'est de créer. Avoir des idées, les mettre en forme, les regarder vivre.

Qui étaient vos idoles de jeunesse ?
Nina : Ma vraie culture musicale s'est faite sur le tard. Petite, j'écoutais la musique de mes parents mélomanes, un peu de Brel, un peu de Barbara mais surtout de la musique classique. J'étais réceptive mais sans l'être. Après j'ai écouté la musique de mes copines, ce qu'il passait à la radio, sans curiosité. Je dansais, c'était chouette mais surtout fun. Mes vraies émotions sont arrivées vers 14-15 ans, quand j'ai commencé à lâcher le piano classique et à choisir mes artistes toute seule. J'ai découvert Björk, Radiohead et Tori Amos. Ce sont des artistes comme ça qui m'ont aidée à m'orienter vers ce que je fais aujourd'hui.
Yohan : Moi mes parents étaient branchés Bob Dylan, Simon & Garfunkel, Elvis, Chuck Berry... Très petit, j'ai eu une passion immense pour Michael Jackson. Parce que la tendance, l'émulsion avec les copains, le "Dangerous Tour" qui passe juste à côté de ma fenêtre... et puis pour le performer. J'étais fans aussi en parallèle du mime Marceau. Je retrouvais des éléments de mime dans son univers. J'aimais bien les artistes qui croisaient les disciplines, comme la peinture un peu folle de Dali. Tout ça se mêlait. Et puis j'ai eu une grosse période rock. J'avais un copain qui m'a fait une cassette à l'époque avec des morceaux d'AC/DC, de Deep Purple... J'ai adoré l'énergie et j'adorais les pochettes aussi. Très vite, j'ai traîné avec un groupe de copains qui jouait de la musique. On sortait déjà dans des bars pour les voir jouer. Un jour, j'ai un copain batteur qui a voulu se mettre à la guitare et du coup j'ai pris la batterie... Voilà, c'était parti.

Il faut ne pas trop avoir d'ego
Ce bagage musical explique-t-il pourquoi vous chantez principalement en anglais ?
Yohan : Mais j'ai écouté beaucoup d'artistes français aussi, comme Léo Ferré, Brel... Justement, j'étais curieux de tout et Nina est pareille. Il n'y a pas de "mauvaise" musique, même nos phases house music c'était super ! Dès qu'il y a de la mélodie nous, ça nous plaît. La première chose qui nous vient quand on compose ensemble, c'est la mélodie. Après on se met à chantonner du yaourt et les premiers mots sont tombés naturellement en anglais. On a suivi le fil, inconsciemment. Mais si un texte vient en français, on y va à fond aussi. (Sourire)

Parlons plus en détails de ce nouvel album. Comment a-t-il pris forme ?
Nina : En tournée, on a pris un studio mobile dans notre tour bus. Au départ, on s'est dit : "Bon, il faut que le deuxième album sorte très vite après le premier"... Bon. (Rires) Heureusement qu'on a commencé à composer à ce moment-là sinon on y serait encore ! On adore composer tous les deux, soit chez lui, soit chez moi. On a peu de matériel, on n'est pas très technique : un petit ordi, une carte son, un piano, une batterie et voilà ! C'est comme ça qu'on compose nos meilleurs chansons parce qu'on a juste l'essentiel.
Yohan : On a une espèce de règle entre nous, c'est de toujours tester l'idée de l'autre.
Nina : Il faut ne pas trop avoir d'ego. On va jusqu'au bout et si ça ne marche pas, tant pis.
Yohan : C'est pour ça que ça prend beaucoup de temps ! (Rires)
Nina : On s'est ensuite imposé d'aller en studio pour cadrer les choses. C'est comme si on y allait avec des sacs de chansons ! On avait beaucoup composé. Du coup, on a réécrit les chansons et on les a faites au propre. Si une d'entre elles était bien, on passait à l'étape suivante et on travaillait les arrangements.

Vous aviez un fil rouge pour la sélection des pistes finales ?
Yohan : Le choix a été impossible, c'était hyper dur. A la base, on avait 60 compos pour ce disque.
Nina : On a cimetière de chansons. (Rires) Et des fois, on déterre des cadavres ! Le critère décisif, au final, c'est simplement la qualité. C'est la meilleure chanson qui gagne.
Yohan : Pour un album, il faut qu'il y ait un équilibre. Il ne faut pas que tous les titres se ressemblent. On veut du relief, que ça soit très dense et à la fois que ça passe comme un songe. Il ne faut pas que tu t'ennuies. On s'est attaché à ça.

Regardez le clip "Keep on Dancing" :



Pour le présenter, vous avez choisi "Keep on Dancing" comme premier single. Qui a eu l'idée de ce clip rétro en forme de compétition de rollers ?
Nina : Ce n'est pas nous ! Elle vient de la réalisatrice, Béatrice Pégard, dont on appréciait énormément son oeuvre. Elle s'est très investie humainement dans le projet. On a fait appel à une vraie artiste, c'est à dire que ce n'était pas quelqu'un qui travaillait pour nous mais avec nous. Donc on a lui laissé carte blanche ! Ça nous intéressait d'avoir sa vision de la chanson. Quand elle nous a proposé ce visuel, on a adoré le travail des couleurs. Elle a une manière de travailler les tons roses, pastel, un peu pailleté... C'est très feutré. Y'a plein de matière dans ses réalisations. On est parti à Los Angeles super emballés et on a rencontré cette équipe de filles qui font du roller - enfin, qui VIVENT en rollers. Elles sont complètement délurées, comme dans le clip ! Le tournage était lunaire. C'était super.

La vie crée un tube
C'est un titre qui sonne très bien pour les radios. Quand on est en studio, est-ce qu'on pense à écrire un tube ?
Yohan : Non, on se dit plutôt qu'il nous faut des bonnes chansons. Nous on adore les morceaux avec des mélodies hyper belles et hyper efficaces. Après, la vie crée un tube. On ne peut pas le maîtriser. "Sirens Call" c'est un accident heureux : on a failli ne pas la faire sur le premier album ! "Keep on Dancing" c'est pareil...
Nina : On avait l'enlever. On ne trouvait pas le bon arrangement. Elle ne trouvait sa place dans l'album jusqu'à ce qu'on se retrouve chez moi avec un tout petit clavier et qu'on enlève tout. Tout l'électro. On est reparti de la base : piano, batterie, trois cordes et en fait ça a marché. Et c'est devenu le single ! Je ne sais pas s'il aura la même vie que "Sirens Call" mais dans la manière dont il est rentré sur l'album, c'est exactement la même histoire. C'est pour ça que l'idée des horaires de bureau, ça ne fonctionnait pas : on ne peut pas forcer la musique.

C'est un album très hétéroclite avec des ballades, des hymnes pop... et un morceau d'inspiration reggae, ''Black Lips''. C'est un virage très surprenant ! Comment est né ce titre ?
Yohan : C'est le morceau avec la ligne de basse la plus dub et reggae. Il n'y avait pas de volonté de surprendre mais nous de toute façon, on aime la danse. J'me rappelle quand j'étais petit, j'avais une cassette que j'écoutais en boucle avec des percussions africaines. Quand tu fais tout le temps le même rythme pendant très longtemps, ça te prend, ça te saisit, ça a un pouvoir incroyable et en même temps, il y a une profondeur et une petite mélancolie qui s'installent. Ce n'est pas juste de la danse naïve, c'est plus ancré que ça. Et on voulait justement un titre avec une sorte de tradition à l'intérieur. Que ce soit une célébration. J'avais adoré un film de Kurosawa qui s'appelle "Rêves" et dans le dernier rêve, le héros arrive dans un tout petit village et rencontre un vieux monsieur de 100 ans qui enterre sa femme. Tout le village l'enterre mais ils font une grosse fête avec une fanfare ! L'idée de base de cette chanson, c'est ça : un hymne à la vie. Avec cet album, on souhaitait de réinventer et explorer de nouvelles directions. Mais on ne l'a pas commandé, "Black Lips" est arrivé comme ça. C'est un bel instant.



L'album ne contient pas de duo. C'est une volonté ?
Nina : On est fermé à rien. Mais tu sais, on avait plein d'envies pour cet album-là. (Rires) On voulait faire un album en français, collaborer plus mais au final, on a rien fait de tout ça. Parce qu'on vit sur l'instant. On voulait enregistrer un morceau en allemand aussi ! (Sourire) Mais vraiment, il fallait qu'on se trouve nous et qu'on retrouve l'essence même du projet. Pourquoi on est là ensemble et pourquoi on continue ensemble. Il fallait préserver notre intimité artistique. C'est tellement précieux...

Un duo doit être fait pour les bonnes raisons
Avez qui aimeriez-vous collaborer ?
Yohan : Des tonnes d'artistes ! Mais il faut que ça se passe par rencontre, ça ne doit pas être forcé. On fonctionne tellement à l'humain qu'il faut que ce soit fait pour les bonnes raisons. Après, on est curieux de tout. Au contraire, plus les collaborations sont improbables, plus ça nous plaît !

Vous êtes venus chanter sur la finale de "Destination Eurovision" et vous avez assisté à la victoire de Madame Monsieur, qui représentera la France cette année. Un autre duo mixte ! Quel regard portez-vous sur l'Eurovision ?
Yohan : Nous ce qu'on trouve chouette, c'est que la vision de ce concours a changé. La France tente toujours de proposer des projets différents. Moi je me rappelle de l'année avec Sébastien Tellier, j'avais trouvé ça génial ! Les gagnants de ces dernières années sont atypiques et portent des messages, comme Conchita Wurst qu'on avait croisé à la Fête de la Musique. Ça confronte les gens à d'autres choses. Là, la chanson "Mercy" a un message fort et dans l'air du temps, avec un sujet qui touche l'ensemble de la planète. Je trouve ça super qu'on ait impliqué le public dans le choix du candidat.

Vous pourriez y participer ?
Yohan : Ça dépend du titre, de l'occasion. On ne nous l'a pas proposé. Nous on a très gentiment été invité à accompagner un finaliste, c'était déjà super. On n'est pas dans le calcul. On réfléchit quand ça vient. (Sourire)

Crédits photo : Louise Carrasco / Tôt ou Tard .
Toute l'actualité de Cats on Trees sur son site internet officiel et sa page Facebook.
Ecoutez et/ou téléchargez l'album "Cats on Trees" sur Pure Charts.

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