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samedi 25 août 2018 16:00
Justice en interview : "On est déjà très excités à l'idée de repartir en studio"
Par
Julien GONCALVES
| Rédacteur en chef
Enfant des années 80 et ex-collectionneur de CD 2 titres, il se passionne très tôt pour la musique, notamment la pop anglaise et la chanson française dont il est devenu un expert.
A l'occasion de la sortie de l'album live "Woman Worldwide", et de leur concert événement à Rock en Seine, le duo Justice, composé de Xavier et Gaspard, se confie en interview sur Pure Charts.
Crédits photo : Olivia Bee
Propos recueillis par Julien Gonçalves. Comment est venue l'idée de l'album "Woman Worldwide", un double album de votre dernier live... mais proposé en version studio ? Xavier : En fait, c'était notre troisième tournée. A chaque fois, on doit énormément adapter nos morceaux car sur disque ils sont produits sans intention d'être efficace, pour un usage "domestique". On ne les conçoit pas pour faire danser les gens. Vraiment ? Xavier : Oui... Il y en a toujours un ou deux par album qui fonctionnent comme ça, un peu malgré eux. Nos morceaux joués par d'autres DJ sont souvent des remixes. Sur scène, on les adapte car on veut que ce soit efficace, que ça marche tout de suite. Il faut que ce soit très simple parce qu'on est que deux sur scène. Et comme on joue dans beaucoup de festivals, il y a une bonne portion des gens qui attend un autre concert ou qui connait un titre donc un peu par curiosité, il faut qu'on arrive à les capter même avec des morceaux qu'ils ne connaissent pas. Il faut que chaque morceau ait une espèce de pinacle un peu spectaculaire et que ça marche. Il faut que le mec qui est à 70 mètres de la scène, qui a passé trois jours en festival à boire de la bière, qui est cuit, il faut qu'il reste jusqu'au bout et qu'à la fin, il soit content ! On voulait avoir cette version parfaite d'un live de Justice Un vrai challenge...Xavier : Parfois, on fait des titres un peu hermétiques sur nos disques, qui demandent à être écoutés plusieurs fois. Et ça, on ne se l'autorise pas sur scène. C'est assez rafraîchissant parce qu'on passe un an et demi à faire nos albums studio, et enfin on en sort et on peut tout ré-envisager sous un angle plus simple et ludique. Nos deux premiers albums live, on les a enregistrés dans un esprit pirate, comme des lives de Prince qui ne sont jamais sortis où la qualité sonore passe en second plan. Pour celui-là, on voulait changer un peu. Pour quelles raisons ? Xavier : Déjà parce qu'on savait qu'une bonne partie des gens était frustré d'entendre la musique live avec le bruit des gens qui hurlent et peu de profondeur. Et aussi parce qu'en concert on est obligé de limiter le traitement qu'on fait sur chaque son. Pour nous, c'est une occasion de finaliser un peu ce boulot-là de tournée. Il y a eu huit mois de préparation à Paris et après, en gros, un an de tournée avant qu'on décide de sortir cet album. L'idée c'était d'aller jusqu'au bout, de faire ce qu'on ne peut pas faire sur scène parce qu'on n'a pas les moyens techniques. On voulait avoir cette version parfaite d'un live de Justice. Regardez le teaser de "Woman Worldwide" de Justice : Comment ça s'est passé concrètement ? Xavier : Ce disque, c'est ce qu'on joue en concert. On a enregistré une vingtaine de concerts et aussi quelques répétitions. Pour chaque morceau, on a pris la meilleure prise et on a tout remonté à Paris. On trouvait que c'était un assez beau témoignage de nos dix premières années de musiciens studio et en tournée. Notre première tournée c'était en 2008. C'est une manière intéressante et généreuse de clôturer ce chapitre. On est déjà très excités à l'idée de repartir en studio Qu'est-ce qui a été le plus difficile en studio ?Gaspard : C'est le travail en amont qui est assez long. Il faut faire coexister des morceaux qui ont dix ans et ceux qu'on vient de faire. En général, les derniers morceaux sonnent mieux que les premiers... Et heureusement. (Sourire) Enfin, ils ont des sons différents... C'est trouver le chemin qui nous permet de faire une séquence cohérente avec des morceaux qui s'enchaînent. Il faut les rendre plus "in your face" comme on dit. Xavier : Ce qui est marrant c'est qu'une fois le disque terminé, si tu ne connais pas notre discographie, il est impossible de savoir quel morceau appartient à quelle période. C'est étonnant que tu dises que lors de votre travail en studio, vous ne pensez vraiment pas en live. Généralement, les artistes tout genres confondus ont ce réflexe d'intégrer des ponts, des "oh oh" ou des crescendos pour que ça marche aussi sur scène. Gaspard : Oui mais on n'est pas un groupe de rock par exemple, où tu répètes en groupe et ensuite tu vas enregistrer. La translation à la scène est assez naturelle. Donc j'imagine que ça doit influencer la façon de composer. Nous, ce n'est pas du tout ça, c'est un processus différent, plus laborieux. Xavier : Surtout, l'efficacité en musique électronique n'est pas la même que quand tu es un chanteur ou un groupe. Ce que les gens attendent aussi est différent. Si on décidait de faire sur l'album des titres qui seront efficaces sur scène, on serait obligé de faire des choses qu'on n'a pas envie d'avoir sur nos albums comme des longs breaks, des montées. On veut se garder ce plaisir-là pour après. Ça nous laisse une liberté et une marge de manoeuvre énormes une fois qu'on passe à la scène. On peut tout reconstruire. On aime bien garder ces choses-là assez séparées, car ça rend chaque étape plus excitante. Ecoutez "D.A.N.C.E. x Fire x Safe and Sound" de Justice : Vous prenez le plus de plaisir en studio ou sur scène ? Xavier : Comme c'est différent, ce sont des plaisirs différents. Et surtout ce sont des plaisirs renouvelés. J'imagine que si on était un groupe de rock, même à deux ce serait : tu écris les morceaux donc tu joues ensemble, tu enregistres donc tu es encore ensemble, tu pars en tournée pendant un an et demi donc tu joues chaque soir les mêmes morceaux comme tu les as écrits et enregistrés... Et après, tu retournes en studio, ensemble, pour refaire le même schéma. Nous, en faisant ça, c'est comme si on changeait de personnage à chaque fois. Là, on n'a pas fini de tourner qu'on est déjà très excités à l'idée de repartir en studio faire de la musique ensemble car on n'utilisera pas les mêmes outils, la même méthode, la même fonction. On a une liberté de genre qui est assez rare C'est ce processus aussi qui aide à garder cette fraîcheur entre vous, pour ne pas vous étouffer, et qui fait le succès de votre duo ?Xavier : Peut-être oui... C'est pour ça aussi qu'on a choisi de faire de la musique électronique, alors qu'avant on jouait dans des groupes. On a même joué ensemble. C'est le seul style de musique où on peut être batteur, bassiste, pianiste ou rien de tout ça, juste faire des manipulations sur ordinateur. Je m'imagine devoir faire de la basse dans un groupe jusqu'à la fin de ma vie et ça me m'emmerderait je pense ! (Rires) Cet album, c'est aussi pour célébrer vos dix ans de carrière. Quel bilan vous en faites ? Xavier : On est encore incrédules. Finalement, quand on écoute l'ensemble de nos morceaux, on a encore du mal à croire qu'on a eu la chance de faire toutes ces choses-là et d'opérer à cette échelle. On ne fait pas de la musique bizarre mais ça ne correspond pas du tout à ce qu'est la musique populaire depuis 10 ans. On n'a jamais fait un énorme single. Même "D.A.N.C.E", peut-être notre plus gros single, c'est un micro-phénomène. Il est passé à la radio en France et un peu en Angleterre. On se dit que c'est beau de pouvoir faire ce qu'on fait en ayant fait de la musique comme ça. Gaspard : On a une liberté de genre qui est assez rare. Quand on est en studio, c'est assez rare qu'on se dise : "On va faire un morceau de ce genre-là". Toutes nos influences s'additionnent. Dans notre deuxième partie d'interview, Justice évoque son quatrième album à paraître, raconte les meilleurs moments de sa carrière et revient sur la malédiction de ses concerts à Paris.
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