La taxe streaming adoptée en France : une "décision historique" décriée par Spotify

Par Yohann RUELLE | Journaliste
Branché en permanence sur ses playlists, il sait aussi bien parler du dernier album de Kim Petras que du set de techno underground berlinois qu'il a regardé hier soir sur TikTok. Sa collection de peluches et figurines témoigne de son amour pour les grandes icônes de la pop culture.
C'est officiel : les plateformes de streaming musical devront bientôt s'acquitter d'une taxe basée sur leurs revenus en France. La mesure, soutenue par le président Emmanuel Macron mais qui divise l'industrie, a été annoncée par le gouvernement et sera effective en 2024.
Crédits photo : Pexels
« Une décision historique » selon Pascal Nègre. Le gouvernement a annoncé ce mercredi 13 décembre la mise en place, dès 2024, d'une taxe streaming sur le chiffre d'affaires des plateformes d'écoute de musique en ligne. Le but ? Offrir des moyens financiers au Centre national de la musique (CNM), créée en 2020 sur le modèle du Centre National du Cinéma et de l'Image Animée (CNC) pour le cinéma, afin de soutenir la filière musicale française. Défendue par le président Emmanuel Macron et la ministre de la Culture Rima Abdul-Malak, qui s'est « battue comme une lionne » selon Jack Lang, cette contribution obligatoire portera « sur un très faible taux de prélèvement sur le chiffre d’affaires des plates-formes » a indiqué le ministère de la culture à l'AFP. Les modalités exactes de son application ne sont pas encore connues, tout comme les estimations de la somme qu'elle devrait rapporter au secteur. La taxe devrait être de l'ordre de 1,75%.

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Le secteur divisé sur la taxe streaming


« Merci aux sénateurs et députés qui dans leur grande majorité et leur grande sagesse ont poussé ou voté pour un financement pérenne par le CNM de la filière musicale » a réagi Pascal Nègre, ex-PDG d'Universal, tandis que le Syndicat des Musiques Actuelles (SMA) et l'Union des producteurs phonographiques français indépendants (UPFI) se sont félicités de cette mesure jugée « indispensable ». Seulement, tous les acteurs de l'industrie musicale ne se réjouissent pas de l'adoption de cette taxe streaming. « Non à la taxe streaming. Taxe anti-rap, taxe raciste, taxe non justifiée » avait plaidé le rappeur Niska l'an dernier, inquiet des répercussions de cette mesure sur le reversement des royalties aux artistes, notamment ceux de la scène hip-hop qui dominent le marché du streaming. « Ce serait une catastrophe » estimait Bertrand Burgalat, le président du Syndicat national de l'édition phonographique (SNEP). Hier, le syndicat avait d'ailleurs publié un communiqué sur un accord « exceptionnel » de « contribution volontaire » trouvé en partenariat avec Apple, Deezer, Meta, Spotify, TikTok et YouTube, qui aurait généré « plus de 14 millions d'euros en 2025 ». Le gouvernement leur a donc coupé l'herbe sous le pied.

"C'est une monumentale erreur stratégique"


« L'adoption de cette taxe est vraiment un coup dur porté au secteur de la musique, à l'innovation et aux plateformes indépendantes européennes comme Spotify ou Deezer » déplore ce matin sur Franceinfo Antoine Monin, le directeur général de Spotify France : « C'est une monumentale erreur stratégique qui va à l'encontre des enjeux de souveraineté économique, culturelle et technologique européenne ». Pour lui, « le gouvernement a cédé à la pression du lobby du spectacle vivant et de certains parlementaires » et souligne l'économie fragile de Spotify face aux GAFA : « Spotify n'est pas encore rentable, contrairement aux concurrents YouTube, Apple ou Amazon, qui ont tout à fait les moyens d'absorber ces taxes ».


Le patron de Spotify France estime qu'à cause de cette taxe supplémentaire, le numéro un du streaming mondial « désinvestira la France et investira sur d'autres marchés ». « La France n'encourage pas l'innovation et l'investissement, elle ne sera plus une priorité » prévient-il. Et brandit la menace d'une augmentation des tarifs des abonnements pour les consommateurs, qui pourrait être de l'ordre de « 10% », même si Spotify « n'a pas encore pris de décision » à ce sujet. Pour financer le CNM, Antoine Monin propose plutôt de « faire contribuer l'ensemble de la filière, pas uniquement le streaming » : « Ça veut dire les ventes de vinyles, les ventes de CD, mais aussi les radios musicales ». Affaire à suivre.

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