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Years & Years en interview : "Les Spice Girls, ça c'est classe !"

Par Yohann RUELLE | Journaliste
Branché en permanence sur ses playlists, il sait aussi bien parler du dernier album de Kim Petras que du set de techno underground berlinois qu'il a regardé hier soir sur TikTok. Sa collection de peluches et figurines témoigne de son amour pour les grandes icônes de la pop culture.
Avec les pépites électro-pop de son premier album "Communion", Years & Years fait trembler les charts britanniques. Pour Pure Charts, Olly Alexander, Mikey Goldsworth et Emre Türkmen reviennent sur leur rencontre, leur victoire au "BBC Sound of 2015" et leur passion dévorante pour les Spice Girls. Non sans humour et décontraction !
Crédits photo : Facebook officiel
Propos recueillis par Yohann Ruelle.

Tout a commencé avec... une petite annonce.
Mikey : C'est ça ! Je venais de débarquer d'Australie, j'avais envie de monter un groupe. Donc j'avais besoin d'un guitariste et j'ai posté une offre sur internet... Emre a répondu. C'est comme ça qu'on s'est rencontrés.
Olly : Et puis il y eu l'histoire de la douche...

A l'origine ? Une petite annonce et une douche
Une douche ?
Emre : Oui ! (Rires) Mikey était à une fête...
Olly : Chez moi.
Emre : Chez Olly, oui. Mikey et lui connaissaient un type en commun. Ils se sont bourrés la gueule et ont dormi sur le canapé. Quand Mikey s'est réveillé, il a entendu Olly chanter sous la douche... et lui a proposé de rejoindre la bande.
Olly : J'avais déjà fait partie d'un groupe quand j'étais à l'école, et je voulais vraiment refaire de la musique.

C'était un projet sérieux dès le départ ?
Emre : Oui et non. On était plus du genre « Allez, on monte un groupe, on fait de la musique et on voit ce qu'il advient ». On était à mille lieues d'imaginer connaître un tel succès.

Vous vous souvenez d'un moment en particulier où vous avez réalisé que tout ceci prenait de l'ampleur ?
Mikey : C'était à Paris ! Sur la scène de la Boule Noire, pour le festival des Inrocks. C'était notre premier concert en dehors du Royaume-Uni, on était signé chez Kitsuné à l'époque. C'est là qu'on a testé nos nouveaux morceaux comme "Desire" et la réponse du public a été extra. Tout le monde nous avait prévenus : « Vous allez voir, le public français est très difficile et pointu ! ». Mais c'était l'éclate, ça dansait de partout. C'était très cool. Ça nous a incités à poursuivre dans cette voie.

Écoutez "Shine" de Years & Years :



Je suis team Blur
Musicalement, comment décririez-vous votre premier album "Communion" ?
Emre : De la... dance électronique émotionnelle à écouter dans un lit ou au volant d'une bagnole ? (Rires) On apprécie beaucoup le mélange des genres, et si beaucoup y voit de la pop pour tout un tas de raisons légitimes, pour nous c'est plus que ça : il y a la voix très soul d'Olly, ces effusions R&B... Ce ne sont pas "juste" des hymnes pour les clubs, notre écriture est aussi très personnelle.

D'où vous vient cette envie de mixité musicale ?
Mikey : On est trois, ça multiplie les influences ! Quand j'étais petit, mon père m'avait emmené dans ce magasin de vinyles pour acheter le CD du conte musical "Pierre et le Loup".
Olly : Alors que moi, mon père écoutait "Wonderdall" d'Oasis en boucle. Je connais "(What's The Story) Morning Glory" par coeur.

Plutôt team Oasis que Blur, donc ?
Olly : Ah non non, du tout ! A l'époque je n'étais pas du tout au courant de cette rivalité, j'étais trop petit. Je préfère les musiques de Blur, en fait. Mais comme tous mes potes écoutaient ça, j'adore aussi les Spice Girls, par exemple. Ça, c'est classe !

Vous vous êtes faits repérer sur la toile par le label français Kitsuné. C'était important pour vous de faire partie d'une structure indépendante ?
Olly : Tu sais au départ, on était simplement heureux que quelqu'un s'intéresse à nos chansons. (Sourire) C'était d'autant plus génial qu'on connaissait tous le prestige de Kitsuné, et les artistes fabuleux qui ont collaboré avec. Je suis très fier !
Mikey : On a été à Tokyo, Paris... C'était une formidable expérience.

Dr. Dre est le Stanley Kubrick de la musique
Sur l'EP "Take Shelter", vous repreniez le culte "Breathe" de Blu Cantrell. Pourquoi ce choix ?
Olly : Pour la simple et bonne raison que j'ai cette connexion étrange avec la scène R&B du début du millénaire. Je veux dire, Blu Cantrell et Sean Paul quoi ! J'étais jeune, très jeune, et cette mélodie me rappelle tant de souvenirs.
Emre : Mikey et moi on a tout de suite approuvé parce que ce titre sample un morceau de Dr. Dre et Eminem, "What's the Difference", et qu'on est fans. La production est très précise, très propre... C'est le Stanley Kubrick de la musique.

J'espère ne pas briser un mythe mais... La chanson de Dr. Dre sample l'intro d'un vieux titre de Charles Aznavour. Une icône de la chanson française.
Emre : Sérieux ? Arrête, tu déconnes. On stoppe l'interview. (Rires)

Écoutez "Parce que tu crois" de Charles Aznavour :



La sortie de l'EP "Real", début 2014, était quitte ou double pour vous...
Olly : C'était notre dernière chance. Le contrat avec Kitsuné s'arrêtait après ça, nous n'avions plus d'argent... On a tout misé sur ce titre.
Emre : J'ai financé tout seul la vidéo !
Mikey : Je ne sais pas ce qui se serait passé si le vent n'avait pas tourné en notre faveur.

On était à court d'argent
Qui a eu l'idée du clip ?
Olly : C'est moi ! Enfin, en partie. Je voulais que l'action se déroule dans une boite de nuit étrange, à l'ambiance très lynchienne. Mikey a ensuite proposé qu'on soit des juges et on a donc imaginé cette sorte de jeu où il faut danser pour survivre... avant que le personnage incarné par Ben Whishaw [ndlr : "Skyfall", "Cloud Atlas"] ne vienne mettre fin à tout cela.

Ça a été facile de le convaincre de participer ?
Olly : Je le connais depuis que j'ai 17 ans ! On est sorti plein de fois ensemble, à Londres, et j'ai pu observer son talent très particulier pour la danse... La première fois qu'on voit ça, c'est très très bizarre je vous l'assure ! Comme une... méduse. (Rires) Donc je l'ai supplié de tourner avec nous et il a fort heureusement accepté.

Le monde du cinéma, vous le connaissez plutôt bien Olly. On vous a aperçu dans "Enter The Void" de Gaspar Noé, "The Riot Club" de Lone Scherfig, la série "Skins"...
Olly : J'ai été acteur pendant plusieurs années, c'est vrai. Essentiellement dans des petits films indépendants britanniques. C'est comme ça que j'ai rencontré Ben... et Emily Browning, qui joue dans le clip de "Take Shelter". J'épuise tous les contacts de mon carnet d'adresses, en fait !

Regardez le clip "Real" de Years & Years :



Tout s'est vraiment accéléré lorsque vous avez remporté le sondage "BBC Sound of 2015", en janvier. Ça représente quoi, pour un groupe britannique ?
Mikey : Au delà du côté très flatteur de recevoir un tel prix, c'est une vitrine considérable.
Olly : Il suffit de regarder la liste des précédents vainqueurs - Sam Smith, Adele, Jessie J - pour voir à quel point cette plateforme permet de dénicher les talents de demain.
Mikey : En toute modestie ! (Rires)
Emre : Et puis comme c'est très médiatisé, ça nous offre l'opportunité de toucher un public à l'échelle mondiale. J'ai reçu des coups de fils d'anciens camarades d'école d'Australie qui me félicitaient ! C'est fou.
Olly : On s'estime très chanceux.

On voulait fusionner les genres
Pour tourner le clip de "King", vous avez fait appel à Ryan Heffington, le chorégraphe de Sia.
Olly : On avait très envie d'incorporer de vraies séquences de chorégraphie. Avec nous dedans ! J'avais vu des exercices de théâtre sur la manipulation des corps et je trouvais que c'était une belle métaphore visuelle. La chanson parle de ce sentiment d'être totalement sous le contrôle de quelqu'un d'autre, sans pouvoir s'extirper.
Emre : C'est le hasard qui a bien fait les choses, puisque Ryan Heffington nous a contactés à ce moment-là.
Olly : Il m'a envoyé un message sur Instagram pour me dire qu'il adorait notre travail et qu'il utilisait "Real" dans ses cours. J'ai sauté sur l'occasion pour lui parler de "King" !

"King" en premier single, c'était une évidence ?
Olly : Oui parce que son énergie reflète assez bien le reste de l'album : c'est catchy, mais si tu prêtes une oreille plus attentive au texte, l'ambiance est toute autre...
Mikey : En fait en écoutant l'album, tu peux passer par plusieurs phases : d'abord l'euphorie, l'excitation...
Olly : Puis tu as peur, tu te recroquevilles dans un coin !
Mikey : Et après tu fais une crise d'anxiété, tu fonds en larmes, tu casses tout dans ta baraque, tu fais l'amour avec quelqu'un qui va vite te le faire regretter...
Olly : Et tu finis par vomir.
Emre : Ok. Ça donne vachement envie, les mecs ! (Rires)
Olly : Plus sérieusement, je crois que notre volonté de fusionner les genres est palpable sur "Communion". "Take Shelter" possède un esprit très synth-pop, "Desire" est plutôt house et "King" est pop-dance. Il y a aussi des ballades au piano comme "Eyes Shut". On ne voulait pas s'ennuyer ! Et créer quelque chose que nous plaise aussi à nous, en tant que passionnés de musique. ■

Regardez "King" de Years & Years :
Retrouvez l'univers de Years & Years sur sa page Facebook et son site officiel.
Écoutez et/ou téléchargez les titres de Years & Years sur Pure Charts !

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