dimanche 08 avril 2018 14:38
The Aces en interview : "On est quatre filles fortes, on est toutes féministes"
Par
Julien GONCALVES
| Rédacteur en chef
Enfant des années 80 et ex-collectionneur de CD 2 titres, il se passionne très tôt pour la musique, notamment la pop anglaise et la chanson française dont il est devenu un expert.
Les quatre filles dans le vent de The Aces sont prêtes à envahir les classements du monde entier avec leur premier album "When My Heart Felt Volcanic", riche de titres pop lumineux. En interview pour Pure Charts, Alisa, Cristal, McKenna et Katie racontent leur parcours, leurs influences, parlent féminisme et du succès.
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Propos recueillis par Julien Gonçalves. Comment est venue l'idée de faire de la musique toutes ensemble ? McKenna : On était amies en fait avant de monter le groupe, on s'est rencontrées à l'école. Ça s'est fait naturellement. Cristal : Oui, on n'a pas vraiment de souvenir du moment où on s'est dit : "On le fait". On l'a juste fait ! On adorait toutes la musique. On avait vraiment envie d'en faire et de monter sur scène. Vous aviez les mêmes goûts musicaux ? Toutes en choeur : Non, on écoute des choses très différentes ! (Rires) Alisa : Mais c'est aussi ça qui explique que notre musique est ce qu'elle est. C'est l'influence de tout ce qu'on écoute chacune. Et justement, quelles sont vos influences ? Alisa : Nos influences viennent clairement des années 80. En fait, c'est grâce à nos parents, c'est ce qu'ils écoutaient, en tout cas pour nous Cristal et moi (elles sont soeurs, ndlr). On a grandi avec les titres de Whitney Houston, Michael Jackson, Earth Wind and Fire... McKenna : Alors que moi j'écoutais beaucoup The Cure, Talking Heads, Toto... Des trucs un peu plus new wave. C'est ce que mon père écoutait. Et du coup, on a tout mélangé, et ça donne ce son très inspiré des années 80. Mais on ne l'a pas vraiment cherché, c'est venu comme ça, c'est ce qu'on avait en nous. Alisa : Oui, et à notre grande surprise, ça va vraiment bien ensemble. Ça n'a pas été difficile de tout marier. Faire un bon album, ça coûte très cher Alisa et Cristal vous êtes soeurs, c'est facile de travailler en famille ?Cristal : Oui, c'est vraiment bien car on se connaît par coeur. On fait ça depuis tellement longtemps maintenant, c'est normal pour nous. Travailler avec un membre de ta famille, je trouve ça vraiment cool car je n'ai pas besoin de prendre sur moi si quelque chose me dérange, si un truc ne va pas. Je lui dis clairement ce que je ressens, je peux être honnête à 100%. C'est vraiment facile. Mais d'ailleurs que ce soit avec Alisa ou entre nous quatre, on partage un lien très fort. Nos désaccords sont réellement mineurs. Quand avez-vous découvert que vous aviez cette passion toutes les deux ? Alisa : C'est une question intéressante... En fait, c'était très naturel entre nous, encore une fois. On a toujours été très proches depuis toutes petites, comme des meilleures amies. On a commencé le groupe quand j'avais seulement 8 ans, elle 10. Et du coup, pour les deux autres, comment c'est de travailler avec des soeurs ? Ce n'est pas trop excluant parfois ? McKenna : Non c'est génial, j'oublie souvent d'ailleurs qu'elles sont soeurs. Parfois, quand on part pas mal de temps sur les routes, quand on rentre, je me dis : "Ah mais oui elles rentrent ensemble !". (Rires) On ne ressent jamais qu'il y a deux soeurs et nous de l'autre côté. On forme un tout. Et ça c'est vraiment bien. Elles ont une super connexion, c'est beau à voir. Je les admire pour ça. Regardez le clip "Stuck" de The Aces : Vous avez commencé alors que vous étiez toutes très jeunes... Pourquoi votre premier album "When My Heart Felt Volcanic" ne sort qu'aujourd'hui, dix ans après vos débuts ? McKenna : On a fait plusieurs EP sous le nom de Blue Aces. On a sorti un EP l'an dernier "I Don't Like Being Honest", mais c'est vrai que c'est notre premier album. Ça a pris du temps car on a signé sur un gros label, on a changé de nom il y a deux ans. Ça a donné le ton d'une nouvelle ère. L'idée c'était de faire du groupe une marque Alisa : C'est une question de timing et une affaire de développement, en fait. On était quand même très jeunes au début, entre 8 et 12 ans. Et puis faire un bon album, ça coûte très très cher. On a grandi, on a eu nos expériences qui nous ont permis d'en arriver là aujourd'hui. C'était le bon moment ! C'était important de changer de nom ? Alisa : C'est une question d'âge, je pense. Pour nous, Blue Aces ça correspond vraiment à ce qu'on faisait quand on était jeunes. On a publié pas mal de choses sous ce nom pendant neuf ans, que ce soit sur YouTube, avec nos EP... Mais il n'y avait pas vraiment de direction, car on était des gosses. On ne réfléchissait pas à ce qu'on voulait devenir, on voulait juste s'amuser. Mais quand on s'est dit qu'on voulait vraiment faire ça sur le long terme, développer notre carrière... Je déteste dire ça, mais en quelque sorte, l'idée c'était de faire du groupe une marque. Cristal : Et puis on n'a pas dû chercher loin car en fait on nous appelait déjà The Aces. Les gens qui nous suivaient raccourcissaient notre nom. Notre manager aussi nous appelait comme ça. C'était parfait pour cette nouvelle ère. Et comment on peut qualifier votre musique ? De pop californienne ? Même si vous venez de l'Utah ! (Elles rient) Alisa : C'est vrai que personne ne se dit qu'on vient de l'Utah avec la musique qu'on fait ! Cristal : C'est difficile de se mettre dans une case, car notre musique rassemble plein de genres différents. On est inspirées par tellement de choses. Mais on va dire qu'on fait de la pop alternative avec beaucoup de guitares. Je crois que les jeunes aujourd'hui se foutent de savoir quel genre ils écoutent, ils veulent juste de la bonne musique. Et c'est ce qu'on veut faire ! Ecoutez "Lovin' Is Bible" de The Aces : Quand on écoute vos titres, on se dit que c'est hyper joyeux et lumineux, alors que les textes sont souvent tristes. C'est le grand écart permanent. Ça vous amuse ce contraste ? Alisa : Oui complètement ! En grandissant, on s'est mises naturellement à écrire pas mal de chansons dramatiques et tristes. Je crois que c'est ce sentiment-là qui t'inspire le plus quand tu crées. Après, même si on a continué à en écrire, on avait envie de faire des titres un peu plus funky. Ça s'est juxtaposé, en fait. C'est drôle d'ailleurs de voir les gens danser et crier des paroles hyper déprimantes comme celles du titre "Stuck". C'est marrant et intéressant à voir ! (Rires) Cristal : C'est thérapeutique aussi ! Tu peux te sentir comme une merde mais si tu te lâches sur une chanson comme ça, ça peut te libérer. Nos fans nous disent souvent que ce qu'on chante a été écrit pour eux, sur ce qu'ils ressentent exactement, mais que la musique leur fait du bien. C'est là qu'on se dit qu'on a réussi. On adore écouter des tubes tous les jours C'est une question banale mais intéressante car vous êtes quatre - une chanteuse et quatre musiciennes, du coup comment vous travaillez concrètement sur une chanson ? Alisa : C'est vraiment un travail d'équipe. Souvent, on part d'une idée de Cristal et moi niveau texte et mélodie, du coup on bosse là-dessus avec les producteurs, on va constituer le squelette de la chanson. Après, Katie et McKenna interviennent lors de l'étape de la production, pour ajouter des lignes de guitares, de basses. C'est ce qui donne le relief à la chanson. C'est là que prend forme le son à la Aces ! Et après, on enregistre tout ça ensemble. Vous avez été citées dans tous les articles qui titraient "Ces artistes qui vont faire 2018". Vous figuriez aussi dans le nôtre d'ailleurs. Ça ne vous a pas trop mis la pression avant de sortir l'album ? Cristal : Non, ce n'était pas de la pression, c'était plus de l'impatience. On avait vraiment confiance en ce qu'on faisait, en nos chansons, donc on n'avait pas à avoir peur. Au contraire, c'était vraiment plaisant de lire tout ça, qu'il y avait une attente. On est vraiment reconnaissantes. Alisa : Oui, et d'ailleurs on est hyper reconnaissantes dès qu'un média parle de nous. C'est très flatteur et ça nous donne de la force. Regardez le clip "Volcanic Love" de The Aces : C'est important pour vous de décrocher un gros tube ? Vous pensez à ça ? Alisa : (Elle réfléchit) Je crois vraiment que ce qui nous motive le plus c'est l'authenticité. C'est notre passion la musique ! On veut faire des titres qu'on trouve géniaux, donc forcément pour nous ce sont un peu des tubes ! (Rires) McKenna : On adore écouter des tubes tous les jours ! Cristal : Et puis, c'est un peu bête de réfléchir comme ça, car personne ne sait véritablement comment faire un tube ! Quand tu es artiste, tu fais juste du mieux possible et tu espères que ça va toucher le plus de gens possible. Parfois ça marche, parfois non. Tu peux sentir un truc particulier avec une chanson... Mais il faut donner le meilleur, c'est ça la base du truc. On est toutes féministes Alisa : Et au-delà du fait que tu peux faire un super titre, il y a plein de facteurs extérieurs qui entrent en jeu pour que ça devienne un tube ou pas. Ça nous est arrivées plusieurs fois. Tu sais, parfois, tes amis et ton label écoutent tes chansons, et tout le monde te dit : "Celle-ci, c'est un tube !". Tu sors ton projet et finalement une chanson que personne n'avait repéré va être streamée cinq fois plus que les autres... Et c'est cool car on ne peut rien prévoir !Vous vous présentez comme "quatre filles qui vont prendre le monde d'assaut". Il faut y voir un message féministe ? Cristal : Oui, on est toutes féministes, mais je ne sais pas si on peut dire que The Aces est un groupe féministe. On est quatre filles fortes et on s'intéresse à la cause des femmes, que ce soit dans la musique ou en dehors, dans des univers dominés par le hommes. C'est important qu'il y ait une représentation des femmes dans tous les domaines, et on en fait partie. Et c'est facile d'évoluer en tant que femmes dans une industrie justement dominée par les hommes ? Cristal : Je crois qu'en ce moment oui car il se passe quelque chose. Les gens commencent à en avoir marre des trucs qui étaient en place depuis si longtemps. Il y a du mouvement. On est contentes d'arriver à ce moment-là de l'histoire. Le monde est train de crier pour que ça change, pour que les femmes aient une place dans tout ça, qu'on entende leurs voix. Globalement, les gens n'attendent pas grand-chose de nous, ils pensent souvent qu'on a été formées par un label... Car ils n'ont pas l'habitude de voir ce genre de groupes féminins dans la pop alternative. Mais on est très contentes des nombreux retours qu'on reçoit sur notre musique par les professionnels. On nous contacte pour des tournées, en nous disant qu'il est important qu'on ait une plateforme pour s'exprimer. Et ce qu'on a à proposer c'est aussi du girl power ! Alisa : C'est vrai qu'on a plus souvent l'habitude des groupes masculins... Mais les choses évoluent. Et il y a des mecs géniaux. Par exemple, Harry Styles est un artiste féministe ! Pareil pour Coldplay, ou le groupe pour lequel on a joué en première partie, COIN. Ils ont toujours envie de braquer les projecteurs sur des jeunes artistes féministes, c'est génial car leur public est majoritairement féminin. Et c'est important que ces filles aient des femmes en qui elles peuvent s'identifier aussi ou qu'elles ont juste envie d'embrasser ! Bah oui, pourquoi pas ? (Rires) Ecoutez "Just Like That" de The Aces : Vous redoutez parfois que le succès puisse impacter votre bon fonctionnement ou votre amitié ? Cristal : Je crois qu'aucune de nous n'a peur du succès. On a de bonnes bases, nos familles qui nous entourent et qui nous aident à garder les pieds sur terre. On ne fait pas ça pour l'argent McKenna : Oui et puis on ne fait pas ça pour l'argent, pour la gloire. Nous, notre priorité c'est vraiment la musique et notre relation ensemble. C'est un truc précieux qu'on a réussi à faire.Cristal : Après, c'est vrai que le succès peut te tomber dessus sans que tu t'y attendes, et chacun peut le vivre différemment. On va devoir gérer ça, quel que soit le succès qu'on aura. Mais on a confiance en ça, car on est bien entourées. Alisa : Et si l'une d'entre nous dérapait ou je ne sais quoi, il y aurait toujours les amis ou la famille pour nous mettre deux claques. (Rires) Et ça, ça te remet les idées en place ! Dernière question : quand est-ce que vous avez ressenti votre coeur exploser comme un volcan, en référence au titre de votre album ? Alisa : Ouh, intéressante cette question ! Cristal : Je crois que c'était vraiment en enregistrant l'album. C'est pour ça qu'on l'a appelé comme ça. Il y a vraiment eu des moments où on était vraiment épuisées car tu donnes tellement tout ce que tu as en toi. Parfois, tu peux être triste, énervée, excitée, hyper joyeuse... Et puis on a une petite vingtaine toutes, donc tu es toujours un peu volcanique à cet âge. Un rien peut se transformer en fin du monde ! McKenna : C'est vrai que parfois tu peux avoir des coups de mou, où tu te dis : "Oh mon lit me manque, mon mec et ma famille aussi". Et puis là tu montes sur scène, le concert est complet, et là tu passes un moment de dingue sur scène... Alisa : Toute cette expérience est vraiment volcanique pour nous. On est tellement passionnées par ce qu'on fait, on y met tellement d'énergie. Ça peut devenir explosif parfois car tu as envie de tout gérer, que tout soit parfait : l'écriture, l'enregistrement, le mixage, le mastering, quand l'album sort... Il y a tant de détails. Pour moi, ce qui a été le plus volcanique c'est les derniers détails, quand il a fallu tout terminer, tout assembler. Ça me tient tellement à coeur. Podcast |