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lundi 09 mai 2011 16:40

Mino en interview

Actif depuis 1997 sur la scène rap marseillaise, signé sur "Street Skillz", le label de Soprano, Mino, l'enfant du vieux port, publie aujourd'hui son premier album, "La vingt-cinquième heure". Heure de vérité, heure de réflexion : rencontre avec un rappeur à l'instinct épidermique.


En 2007, tu présentais un premier street-album : "Il était une fois". Aujourd'hui, il s'agit de ton premier album solo : "La 25ème heure". Pourquoi ce titre ? C'est l'heure de vérité ? (Bridget UGWE)
Oui c'est l'heure de réflexion, l'heure de pause dans cette vie pressée. J'avais besoin de m'inventer une heure à moi, une heure entre deux jours, qui me permette de réfléchir à ce que j'ai fait dans cette journée et ce que je ferai dans la précédente. D'ailleurs c'est un album qui dure une heure pile-poil, une heure de musique. Il exprime un pont entre deux jours.

Ce que tu as fait avant était plutôt confidentiel, avec cet album quel type de public vises-tu ?
Oui "Il était une fois" était un street-album donc avec des moyens de promotion limités, c'était une carte de visite en quelque sorte, réservée à un public d'initiés. Pour "La 25ème heure" c'est un peu plus élaboré, c'est une carte de visite mais en couleur !

Avec plan de communication etc.
La communication se fait toute seule dans le disque. C'est plus instinctif qu'autre chose. Quand j'ai fait cet album, je n'avais pas de public spécifique en tête, tout le monde était visé. L'idéal c'était de faire des morceaux qui puissent être écoutés par toutes les tranches d'âge, quels que soient leurs goûts et d'arriver à toucher ces personnes. Que l'album puisse passer en radio, à la télévision, et jusqu'aux Champs-Élysée pourquoi pas ! Il n'y a pas de limites.

On sent une évolution entre ce que tu as pu faire auparavant, comme le morceau "Bretzel" par exemple, qui relevait plus de la performance de M.C, et cet opus, ''La 25ème heure'', qui met le doigt sur des sujets sensibles. Ceux que l'on aimerait pouvoir ignorer...
En fait, j'ai toujours été comme ça mais je mettais en avant le côté rap rapide, performance. Pour les morceaux à texte, il faut prendre le temps de les écouter donc on les travaille autrement. J'ai toujours été entre les deux, entre rap technique et rap conscient. Selon les moments de ma carrière, c'est l'un ou l'autre coté qui est mis en avant mais encore une fois c'est instinctif. Ensuite on trouve des cohérences qui permettent de faire un tout.

Tu parles d'instinct et justement, dans plusieurs morceaux, tu reviens sur le fait que tu n'as pas fait long feu à l'école. D'où tiens-tu ta plume, plutôt bien affûtée ? C'est l'instinct là-aussi ?
Non il y a beaucoup de lecture quand même. J'ai eu la chance à l'école d'avoir un prof de français hors programme qui m'a donné le goût de la la lecture et qui m'a permis de m'imprégner de styles, de construction de phrases différentes... L'écriture c'est un univers
Être ouvert au monde en apprenant par soi même : c'est une des définitions du hip-hop.
vaste qui me plait énormément et que je compare un peu à la musique . Ces deux domaines permettent de partir très très loin. On peut s'amuser sur les consonances, les assonances et plein d'autres choses encore, ou alors faire fi de tout ça et se concentrer sur l'émotion. Après, j'ai aussi un côté autodidacte. J'ai appris en écoutant Akhenaton. C'est une des définitions du hip-hop : être ouvert au monde tout en apprenant par soi-même. Comme FUBU tu te rappelles de cette marque ? For Us By Us ! (rires) Bon c'est vrai qu'elle n'a pas passé l'an 2000, là c'était plutôt For Us Bye Bye ! (rires)

La culture rap s'est souvent nourrie de personnages de cinéma tels Le Parrain, Scarface... Chez toi c'est dans les titres que l'on retrouve cette influence : ''L'enfer du devoir'' sur ''Il était une fois'', ''Man On Fire'' sur cet album. D'après toi, le rap et le cinéma sont liés ?
Les livres, le cinéma, tout ce qui permet de s'évader et de passer des messages oui. Je suis un grand cinéphile, je m'inspire beaucoup des séries et de tout ce qui peut me donner des idées. Donc j'aime bien faire référence à des thèmes sur lesquels on peut s'appuyer, des idées sur lesquelles un travail a déjà été fait. Quand je dis "La 25ème heure", les personnes qui ont vu le film savent déjà dans quel sens je veux les amener, quel va être mon système de réflexion. Ils ont en eux des images qui permettent d'ajouter des degrés de compréhension et des émotions.

Tu dis dans ''Man On Fire'' : « Ma plume me détermine ». A l'écoute de l'album, le sentiment général qui ressort, c'est une dualité, une opposition entre compositions très mélodiques et paroles très noires. Entre fatalité, lutte et espoir malgré tout... Tu es comme ça dans la vie, duel ?
La victoire ou la défaite on s'en fout, ce qui compte c'est le combat.
Oui je suis assez duel, ça fait partie de ma personnalité. Je pense qu'on l'est tous d'une manière ou d'une autre. On a tous ce combat perpétuel en nous. Et c'est important pour continuer à vivre, pour avancer. Dans mes morceaux effectivement il y a le constat apparent d'un côté, et puis de l'autre le fait de se dire : « Ok ça va mal mais on va pas rester comme ça ». Je n'aime pas le côté défaitiste, non. Ce qui me tient debout ce n'est pas la victoire, c'est la lutte. La victoire ou la défaite on s'en fout, ce qui compte c'est le combat.

Découvrez le clip de "Man on Fire", extrait du premier album de Mino "La 25ème heure" :


C'est à ça que tu fais allusion dans ''Plus qu'hier et moins que demain'' ? C'est un morceau très revendicatif, tu dis :« Je n'suis pas né dans les règles pourquoi devrais je les suivre ».
Complétement ! Parce que je suis comme ça. J'aime les gens déterminés, j'aime l'esprit de compétition. Pas pour écraser l'autre mais pour se dépasser soi même, et c'est ce que j'aime exprimer. Il y a des problèmes comme je le chante dans "Fuck la crise", mais j'aime qu'on relève la tête. C'est ça mon état d'esprit.

On le ressent. Tu dis des choses très dures et directes, sans enrobage mais sur des mélodies parfois touchantes...
Oui j'aime bien le contraste, il y a toujours cette dualité en moi. Et ce combat !

Un combat oui, mais un combat positif finalement. A l'écoute de l'album, on a l'impression d'une personne vraiment à fleur de peau et là, quand on te voit, tu as l'air posé et même très souriant.
Tu as cru qu'on allait débarquer à douze et tout casser c'est ça ? (rires) Non, j'ai plusieurs facettes. Je suis quelqu'un d'avenant dans la vie et de plus sérieux dans la musique. Mais ça, je l'exprime mieux sur scène où j'arrive à trouver un équilibre entre les deux. Je peux faire mes morceaux tout en instaurant une atmosphère conviviale avec le public. C'est cohérent avec ce que je suis.

Le morceau "Fuck la crise", que j'ai apprécié, surprend également par ses sonorités électro qui tranchent avec le reste de l'album. Et encore ce contraste jusque dans les paroles : « Toujours plus de gens qui font les poubelles et vivent dans des taudis / En même temps plus de Mercedes et plus d'Audi  ». C'est un morceau qui pourrait passer en club si on faisait l'impasse sur les paroles. Pourquoi ce choix ?
"Fuck la crise", j'y tenais particulièrement. Il y a eu une période dans ma carrière où c'était le calme plat, je ne sortais plus rien, on ne m'entendait plus. J'ai voulu revenir avec ce que je sais faire mais je voulais montrer que sur les musiques actuelles, je suis là aussi ! Toujours cet esprit de compétition tu vois. Donc quand on m'a fait écouter ce son j'ai dit : « Ok mais je vais le faire à ma façon, avec un texte super engagé associé à une instru sur laquelle on pourrait danser ». La fin du morceau est un peu plus détendue, on y va à fond sur la caricature de la crise ! Dans le clip, il y a aussi le petit interlude en référence à "Reservoir Dog".



Tu es signé sur le label de Soprano depuis 2005, comment s'est passée votre rencontre ?
Avec Sopra, on s'est rencontré il y a une quinzaine d'années sur scène. C'était mon tout premier concert, ça faisait quelques mois seulement que je rappais. Lui aussi, il venait de commencer. Il est venu me féliciter sur ma prestation, ensuite il est monté sur scène et là je le vois retourner le public. J'ai halluciné ! Par la suite, on s'est croisé régulièrement sur des concerts et on est resté en contact. Ce n'était pas évident pourtant car on n'est pas du tout du même coin, moi j'étais du centre ville et lui des quartiers nord.

Et la collaboration avec Akhenaton, tu l'as abordée comment, ?
Akhenaton je l'ai connu à l'époque où Les Psy4 de la Rime faisaient partie de la Cosca. On se
Akhenaton c'est mon papa du rap, il m'a servi de modèle.
connaissait de vue, on se croisait dans les concerts car on était tous du centre ville. Il m'avait invité une fois sur les Chroniques de Mars II (2007). On a fait le morceau "Emporté par l'élan", là j'avais de la pression ! Cette fois-ci j'y ai pris plus de plaisir. Accueillir RedK et Akhenaton était vraiment un bonheur et en plus ils ont assuré, ils se sont déplacés pour venir enregistrer en studio. “Akh” c'est mon papa du rap, c'est lui qui m'a servi de modèle quand j'ai appris à rapper. Que ce soit lui avec Iam, ou la Fonky Family, ils ont contribué à amener la lumière sur la scène rap marseillaise. Et ils l'ont fait de manière vraiment positive, c'est ça qui est bien.

On retrouve aussi sur ton album l'esprit de l'époque Iam, Fonky Family, 2bal 2nég...
Oui, c'est parce que j'ai grandi avec ces musiques là. Ce qui m'a plu dans ces groupes, j'ai essayé de le rendre. Après il y a le marché actuel dont il faut tenir compte, les nouveaux sons etc. J'ai essayé de jongler avec tous ces éléments, tout en tirant mon épingle du jeu, et surtout sans perdre la qualité du message. C'est un truc qui fait partie de moi ; encore une fois c'est instinctif.

Écoutez "Qui le fera à ma place" par Mino feat. Akhenaton et RedK :


En parlant d'évolution, ton street-album "Il était une fois" était très intimiste voire introspectif, tu y parlais beaucoup de ta famille, de tes expériences personnelles...
C'était une étape nécessaire pour pouvoir comprendre la suite. Quelqu'un qui a écouté le street-album abordera "La 25ème heure" différemment. Il y a un suivi entre les deux. C'est comme quand on regarde un film. Même si on n'a pas vu le un, on peut voir le deux, mais il y a des nuances qu'on ne saisira pas.

Sur la scène rap actuelle tu écoutes quoi ?
J'aime bien le dernier album de Seth Gueko qui vient de sortir, et celui de Booba. Pour le rap US, j'écoute Lil' Wayne, Kid Cudi, Busta Rhymes, The Game... Pour le plaisir mais aussi pour le taf.

Ça s'entend sur l'album, les mélodies, la production sont très travaillées.
Oui on est tombé d'accords avec Médeline, qui a réalisé près de la moitié de l'album. On s'est dit : « Allez on tente » !

Quel est le message essentiel que tu souhaiterais que l'on retienne de cet album ?
J'aimerais que les gens la prennent vraiment pour eux cette heure de réflexion. Ça fait du bien de s’arrêter un peu dans sa vie, de regarder ce qu'on a fait, pourquoi on l'a fait, et surtout qu'est ce qu'on fait après. Moi je le fais et ça me sert énormément pour cerner mes objectifs, les viser et les atteindre ! Et en cas d'échec, on se relève et on y va.

Tu as des scènes prévues à Paris ?
Le Nouveau Casino est prévu mais la date exacte n'a pas encore été fixée. On attend d'abord l'après sortie de l'album, quand il sera un peu digéré. Les dates parisiennes devraient s'articuler autour de la rentrée, vers octobre, novembre, pas avant. A ce moment-là, on reviendra à Paris représenter cet opus officiellement.
Pour en savoir plus sur Mino, visitez son Facebook officiel.

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