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Melissmell en interview

Elle est la double lauréate du 1er Prix Georges Moustaki (Prix du jury et Prix du public), mais aussi Coup de coeur de l'Academie Charles Cros. Nous avons rencontré Melissmell, l'interprète du single "Aux armes". Actuellement en tournée en France, la chanteuse se produira notamment le 9 novembre prochain, sur la scène du Trianon, à Paris.


Bonjour Melissmell, comment vas-tu depuis le Prix Georges Moustaki que tu as remporté en février dernier (ndlr : doublé gagnant Prix de jury et Prix du public) devant près de 300 candidatures d'artistes autoproduits et/ou signés sur des labels indépendants ? Avec le recul, cela t'a-t-il apporté quelque chose (Thierry Cadet, Rédacteur en Chef) ?
Melissmell : Ça ne m'a rien apporté de particulier, mis à part une exposition médiatique plus importante les jours suivants. Mais ça s'est tassé très vite (sourire). Cela dit, c'était la première fois que j'étais distinguée par la profession (ndlr : le jury était composé notamment des journalistes Didier Varrod, Jean-Pierre Pasqualini, Benjamin Petrover, etc.). Après, mon fer de lance c'est la scène, ce que j'ai toujours fait, et que j'ai donc continué à faire.

Visionnez Melissmell live, "Viens" (horscene.com) :
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Ton premier album "Ecoute s'il pleut" reçoit un bel accueil depuis sa parution. Le premier single "Aux armes" a même été diffusé sur NRJ. Tu complètes ainsi la liste très fermée des artistes qui font le grand écart entre France Inter et NRJ (Zaz, Ben l'Oncle Soul...). Huit mois après sa sortie, es-tu satisfaite de son parcours (Top 66) ?
Ce n'est pas un morceau qui fait l'artiste
Je me rends compte que les auditeurs à l'égard de mon album sont plus importants de jour en jour. Alors c'est en partie grâce aux radios qui diffusent souvent le titre de leur choix d'ailleurs, que ce soit "Aux armes", "Les enfants de la crise", "Je me souviens" ou "Viens"... mais c'est aussi grâce à la scène. Et ça me convient parfaitement car ce n'est pas un morceau qui fait l'artiste. Quand à NRJ, je t'avoue que j'en étais la première étonnée ! S'il y a bien une radio qui pour moi, ne devait pas nous jouer, c'est bien NRJ (sourire).

Finalement, NRJ la radio la plus commerciale par excellence, jouant "Aux armes", cela t'a-t-il décontenancée ?
Non, parce que le titre a été joué tel quel, tel qu'il est sur le disque et donc tel que je l'entends. Je n'ai fait aucune concession. Je suis restée moi même, et mon message est passée auprès du plus grand nombre. Pourquoi m'en plaindrais-je ? Cela dit, les rotations n'ont été que de courtes durées (sourire).

On murmure que NRJ se vantait d'avoir trouvé “sa” Zaz...
C'est une fille gentille Zaz. Elle ne cherche pas à faire du mal, juste à faire du bien
(sourire) S'ils le disent. Tu sais, cela m'importe peu. Zaz est arrivée en 2010, et j'existais avant ou en tout cas, en même temps qu'elle. J'ai signé mon album chez Discograph, huit mois avant qu'elle ne sorte le sien. Alors c'est vrai qu'on a le même monde, la même image, les mêmes idées humanistes... Humainement, pour l'avoir croisé, c'est une fille gentille Zaz. Elle ne cherche pas à faire du mal, juste à faire du bien. Et on lui tape assez dessus je trouve ; le succès suscite des jalousies...

Visionnez le clip de Melissmell, "Aux armes" :


Artistiquement, que penses-tu de son univers ?
Nous n'abordons pas les thèmes humanistes de la même manière, et je pense être plus alternative. Elle a un côté jazzy, moi plutôt rock, et mes chansons sont plus empreintes de mélancolie. Elle a beaucoup d'humain en elle, j'aime bien cette fille. J'espère qu'elle est assez forte pour ne pas se faire bouffer par ce monde de requins.

Pourquoi avoir choisi de t'appeler Melissmell ?
(sourire) Mélanie est mon vrai prénom. Ensuite, Melissmell évoque "Smell Like Teen Spirit", en hommage au groupe Nirvana, et enfin Mélisme, mot grec qui veut dire mélodie.

Crédit photos : Sand Mulas.

Melissmell, c'est aussi et surtout un groupe non ? Mélanie au chant, mais aussi... ?
Exactement. J'ai réussi avec mes chansons à faire la part des choses. C'est à dire qu'une grande part des influences de mes musiciens, qui sont à mes côtés depuis le début de l'aventure Melissmell, est présente. L'album est un disque que nous avons enregistré en trois semaines, en laissant une grande part d'improvisation et de spontanéité. Je suis ouverte musicalement aux propositions extérieures, alors on essaie des choses en permanence. Stefano Bonacci est guitariste soul/funk/jazz à la base, Thomas Nicol vient du classique, sans oublier Claude Dos Santos à la basse. Quant à mon batteur scénique, Jérôme Spieldenner, je ne le connaissais pas avant, mais je l'ai laissé amener ses idées afin d’enrichir les arrangements.

Sur scène, vous arborez même une chorégraphie très “boysband”, avec beaucoup de second degré, sur ce véritable hymne générationnel qu'est "Les enfants de la crise" - et qui fait par ailleurs un excellent single...
Par exemple (sourire). Une chanson doit vivre, s'enrichir. Une chanson ne doit pas rester figée. Elle est amenée à évoluer.

Ecoutez le titre de Melissmell, "Les enfants de la crise" :


Quelle formation musicale adoptes-tu généralement sur scène ?
Cela dépend des conditions de la salle. Nous avons deux formations : une formation électrique pour les festivals et les concerts qui me le permettent, et une formation acoustique, avec guitare et contrebasse.

Te sens-tu suffisamment soutenue par les médias ?
Par certains oui, évidemment.
La télé n'est pas assez cultivée pour s'intéresser à autre chose qu'à elle-même
Et puis, il y en a d'autres qui ont dit « non, on n'en veut pas ». Je sais bien que je ne ferai jamais un "Danse avec les stars" sur TF1 par exemple (rires), en même temps comme la télé n'est pas assez cultivée pour s'intéresser à autre chose qu'à elle-même... Après je comprends aussi que je puisse avoir une image trop “contestataire”, et que certains médias ont peur de se retrouver avec cette étiquette sur le front. C'est le jeu, même s'ils te décapitent avant que tu sois née. Il y a aussi ceux qui ne comprennent pas, qui interprètent à leur manière, ou qui m'associe à Noir Désir. Il y a pourtant autre chose que Noir Dès dans ce putain de pays (sourire) !

Quelles sont tes influences musicales ?
J'aime Léo Ferré, Jacques Brel, Edith Piaf, Noir Désir, plus que tout. Mais aussi Cyril Mokaiesh, Alexis HK, Têtes Raides, La Rue Kétanou, Les Hurlements d'Léo, Les Ogres de Barback, Flow, Gavroche, The Smashing Pumpkins, Radiohead...

Que penses-tu de Pep's, dont tu as réalisé de nombreuses premières parties avant la sortie de ton premier album ?
Humainement c'est un mec bien, c'est un type qui n'a pas de masque. C'est même devenu un copain. Après, musicalement ça me touche moins. Mais Pep's est resté vrai, malgré le succès de "Liberta", il ne s'est pas trahi pour faire de l'argent à tout prix.

On murmure que tu as également croisé le parcours de Soan, avant sa victoire à "Nouvelle Star" en 2009.
Oui. Soan et moi avons notamment fréquenté le même bar à Paris, le Café de La Liberté dans le 11ème arrondissement, dans lequel nous donnions des concerts.

Qu'as-tu pensé de son passage dans le télé-crochet d'M6 ?
Soan et moi avons fréquenté le même bar
Je peux comprendre. Il trimait plus que moi. Tu sais que ma mère, ma tante et ma cousine m'ont saoulé également pour que je m’inscrive. Alors je l'ai fait. Je suis allée au casting pour qu'elles arrêtent de m'emmerder, et j'ai tout fait pour ne pas être prise. « Tu ne rentres pas dans le style de l'émission » qu'ils m'ont dit (sourire). Je pense malgré tout, que si Soan a rapidement gagné un public, il se décrédibilise auprès d'un autre, celui qui décrie ces émissions. S'il avait attendu deux ans de plus, ils en serait peut être là aussi, sans être passé par la case télé-crochet. On a le même parcours, le même âge, on faisait du guitare/voix dans les mêmes bars, et j'ai fini par faire parler de moi aussi. Il aurait peut-être dû être plus patient.

Quel genre d'adolescente étais-tu ?
Je suis allée au casting pour qu'elles arrêtent de m'emmerder
J'étais extrêmement solitaire. Au collège et au lycée, pour les autres, j'avais un drapeau noir sur la tête (sourire). Parce que je n'ai jamais voulu appartenir à aucun clan. J'étais anti-clan. Je n'ai jamais rejoint les babas cool ou les punks, ou autres. Suivre un clan, même si ça rassure, c'est tellement débile.

Sur ton album, il y a d'ailleurs une chanson qui s'appelle "Le mouton" - et qui fût le premier extrait de l'EP "Aux armes"...
Voilà (sourire).

Pourquoi avoir choisi des interludes musicales de quelques secondes avant certains morceaux ?
Les interludes avec cette boite à musique posent les choses, comme "Glouton", qui reprend la mélodie du "Mouton", c'est un peu comme un 33 tours qu'on changerait de face. C'est une respiration, comme un goûter d'après-midi, ou une sieste, tranquille, au soleil (sourire).

Tu évoques le temps qui passe dans cette chanson, « prends toi aussi le temps ». Est-ce important à tes yeux ?
Bien sûr. Comme je l'évoquais tout à l'heure avec le parcours de Soan, je pense qu'il faut prendre le temps, que tout arrive à temps à qui sait attendre, et qu'il ne sert à rien de brûler certaines étapes. Chaque chose en son temps (sourire).

Visionnez Melissmell live, "Le mouton" (blugture.com) :


Tu sembles déterminée !
Je sais où je veux aller. Prendre le temps de grandir.
Suivre un clan, c'est tellement débile
Si on bâcle des marches, on se trompe. Si tu veux un feu de paille, tu acceptes tout. C'est aussi pour ça que le succès de Zaz me fait peur. J'espère qu'elle sera assez forte, qu'elle fera les bons choix. Pour se retourner et se sortir de toutes situations, il faut de la bouteille.

Dans "Aux enfants de la crise", tu dépeins un « monde à refaire », qu'est-ce que tu changerais toi si
Je brûlerai l'argent. Le fric est le cancer de l'humain.
Je brûlerai l'argent
A cause du fric, l'humain ne sait pas dire non. Pourtant les plus curieux d'entre nous sont capables de plein de choses, tant que l'argent ne rentre pas en ligne de compte. Après les flemmards je ne sais pas (sourire)... Tu sais, moi je venais de la seconde catégorie. J'aurais pu restée à ne rien faire, et puis j'ai eu un déclic. Beaucoup ne savent pas où ils vont, et s’interrogent, « où va-t-on ? ». Mais c'est à toi de le savoir, faut pas s'étonner après...

Désires-tu des enfants ?
Oui et non. Même si la personne qui saura élever parfaitement des enfants n'est pas encore née. C'est impossible. Il n'y a pas d'éducation parfaite. Je suis l'enfant d'un père qui n'a pas assumé, alors je n'ai pas confiance aux hommes. J'aurais bien aimé, mais ce n'est pas le cas (sourire).

Iras-tu voter l'an prochain aux Présidentielles ?
Je ne sais pas.
Je suis l'enfant d'un père qui n'a pas assumé
Et je vais te dire pourquoi. Dans l'absolu, à l'heure qu'il est, je voterai bien blanc. C'est à dire que je respecte le droit de vote que nos ainées ont obtenu, et je me déplace pour exprimer mon mécontentement. Autrement dit, ça m'intéresse, mais je ne me reconnais en aucun candidat. Le problème, et c'est une vraie injustice, c'est que le vote blanc n'est pas reconnu en tant que tel. Au sein des médias, et des résultats communiqués, il est assimilé à l'abstinence. Ce n'est pas normal. Je peux t'assurer que si la majorité absolue revenait aux votes blancs, ils n'en seraient que plus au pied du mur, obligés de se remettre en questions. La remise en question est nécessaire, elle n'est pas une faiblesse. Sans se poser de questions, on n'y arrive pas. Et si les chiffres parlaient d'eux même, ça nous éviterait de descendre dans la rue. Après, je ne peux que m'engager contre la montée du FN... et la situation est la même qu'il y a dix ans, en France une majorité des gens doit aller voter contre un candidat, et non plus pour quelqu'un. C'est triste.

Ton album se termine par "Plutôt rêver". A quoi rêve Melissmell aujourd'hui ?
La remise en question est nécessaire, elle n'est pas une faiblesse
A la culture bouddhiste, aux danses africaines, aux échanges, aux regards, au partage, aux choses simples en somme. Je pense aussi aux femmes du monde arabe et asiatique qui ont moins de chances que nous, les femmes européennes. Même si actuellement, les révolutions dans les pays du Moyen-Orient font avancer les choses. Nous, ces révolutions, on les a déjà vécues. Ces femmes et ces hommes doivent les vivre pour savoir ce qu'est l'odeur de la liberté.

Ecoutez le titre de Melissmell, "Plutôt rêver" :


Voyages-tu beaucoup ?
Je voyage dans mon cœur et dans mon âme. Je reste proche de la France et des pays frontaliers.
Je voyage dans mon cœur et dans mon âme
Sauf de l'Italie, l'Italie je n'aime pas. Comme beaucoup je n'aime pas l'actuel Président bien sûr, mais je n'aime pas non plus le passé italien, la participation du pays au côtés des allemands durant la seconde guerre mondiale. Et puis aujourd'hui, l'influence “Berlusconiste”, l'hypocrisie du Vatican... c'est un drôle de pays. Je crois que c'est le pays du monde que je déteste le plus.

Que réponds-tu à tes détracteurs qui disent que tu as réalisé un album sombre, pessimiste... ?
C'est pour éjecter le pourri
Cet album est justement tout le contraire (sourire). Si je pointe du doigt certaines choses, si je pousse des coups de gueule, c'est pour éjecter le pourri, et aller ainsi de l'avant. Plutôt que d'encaisser et de se taire. C'est une attitude bien plus positive qu'on ne croit (sourire).

Pour finir, Melissmell est-elle amoureuse actuellement ?
Non (sourire).

Merci beaucoup, on se retrouve donc le 9 novembre prochain au Trianon de Paris, avec notamment Gaëlle Vignaux en première partie.
Avec grand plaisir ! Merci à toi.

Crédit photos : Sand Mulas.
Pour en savoir plus, visitez son Facebook officiel.
Ecoutez et/ou téléchargez le premier album de Melissmell, "Ecoute s'il pleut".
Réservez vos places de concert pour Melissmell.
Visionnez Melissmell live, "Le silence de l'agneau" (horscene.com) :

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