Joachim Garraud

Joachim, pour le grand public, ton nom ne parle pas forcément. Peux-tu te présenter ?
Je suis un amoureux de la musique électronique, compositeur, DJ, producteur. Je baigne dans la musique depuis tout petit ayant eu la chance d'avoir une formation classique musicale au Conservatoire de Nantes en section "Piano et Percussions". Je suis un passionné de son et je compose et/ou produit depuis quelques années pour des personnes beaucoup plus connues du grand public : David Guetta, Jean-Michel Jarre, Kylie Minogue, Moby...

Tu es le fer de lance de la communauté des "Space Invaders", c’est quoi être un Space Invaders ?
Etre un "Space Invader" est une question d'état d'esprit. Un esprit sain qui sait faire la fête uniquement grâce à la musique, pas besoin de dérivatif pour partager ensemble de grandes sensations et bouffées d'énergies positives provoquées par la musique. C'est aussi la façon de se réunir au-delà des races, des religions, des couleurs de peau. Bref, le "Space Invader" est mondial, international, interplanétaire. Il y a aussi un côté second degré : on peut envahir pacifiquement et avec le sourire des lieux le temps d'un concert sans forcément se prendre au sérieux. Bref, je suis très fier de ma communauté.

Tu as effectivement une communauté de fan colossale, quelle relation entretiens-tu avec eux ?
J'ai une relation sincère, je ne l'ai jamais considérée autrement que des personnes ayant la même passion que moi ! Nous partageons beaucoup de choses ensemble et toujours dans la bonne humeur, il y a une vrai transmission de savoir, de connaissance, d'expérience entre tous et cela s'étend désormais dans plusieurs domaines touchant à la musique, la production, le dee jaying, le matériel, les soirées ! Bref, l'échange est permanent et il permet à tous de partager sa passion. La plateforme d'échange est principalement mon site Internet sur lequel il existe un forum très actif qui regroupe amateurs et professionnels.

Tu es un peu un Ovni dans l’industrie du disque : tu n’es pas signé en maison de disques par choix, tu es le premier DJ a avoir réalisé une tournée hors boîtes de nuit, tu fais partie des organisateurs de l’Inox Festival... Qu’est ce qui anime Joachim Garraud ?
La passion tout simplement. J'aime proposer des choses nouvelles qui sortent du commun, en proposant par exemple une box à 99 euros regroupant un casque, mon nouvel album, un DVD, un masque, un tee-shirt, une clé USB, une lampe "Space Invader", un livre de photos... Bref, en créant cet objet incroyable en vente uniquement sur Internet, je donne la possibilité d'acquérir un objet collector en version limitée. Je ne gagne pas beaucoup d'argent sur chaque box mais par contre c'est un réel plaisir de pouvoir mettre cela à la disposition des amateurs de bons sons électro techno. (Box en vente sur invasion2011.com)

Tu viens de sortir un nouvel album, peux-tu nous en parler ?
Je suis très fier de ce nouvel album qui comprend 15 titres, des collaborations vocales avec Roland Clark (Guest Vocaliste américain remarqué par Fat Boy Slim et Prodigy) mais aussi Poet et ZE. C'est un album principalement pour les DJ. Il condense 8 mois de production et de voyage et regroupe les titres qui font danser les Space Invaders que j'ai face à moi chaque soir. C'est l'avantage de pouvoir tester ses titres tous les soirs pour ne garder à la fin que ceux qui ont fait l'unanimité des différents territoires parcourus pendant la tournée.

Tu n’es pas tenté de faire des titres plus commerciaux, pour pouvoir passer en radio ?
Oui, je suis tenté mais la priorité numéro un pour moi est que je dois être fier de jouer chaque titre lors de mes concerts. Pas question d'avoir un titre en version remixé pour la radio et une version très différente en club ou lors de festival. Le son produit pour la radio n'est pas celui que j'aime et que j'assume à 100%. Alors disons que les titres que je produis sous mon nom d'artiste Joachim Garraud sont des titres que j'aime à 100%. Si la radio aime ce titre alors tant mieux !

Découvrez le clip " We Are Future" de Joachim Garraud :


Que penses-tu de l’évolution du monde de Djing aujourd’hui ?
C'est incroyable la chance que nous avons. Après avoir démarré dans le noir, derrière le bar et avec un salaire 2 fois inférieur au portier, nous sommes aujourd'hui sur scène, au sein de festivals incroyables qui mélangent aussi bien le rock que la soul ou la techno. Je reviens de Lolapalooza au Chili et je joue en avril à Coachella aux Etats-Unis, (le plus gros festival américain). Le statut du DJ est plus proche aujourd'hui de l'artiste de pop-rock que celui du sélectionneur de disques. Je fais le même métier que lorsque j'ai commencé dans le garage de mes parents, sauf qu'aujourd'hui tous les jeunes veulent être DJ !

Que penses-tu du milieu de la musique de façon générale ?
J'ai un drôle de sentiment car il mêle inquiétude et espoir ! Inquiétude car la musique est de plus en plus considérée comme gratuite. Comment alors imaginer un système pouvant faire vivre des artistes qui ne font pas de live ? Et espoir car je vois de nouvelles solutions se dessiner progressivement avec la mise en place d'une certaine communauté autour de réseaux sociaux qui viennent petit à petit remplacer les anciennes maisons de disques. J'ai toutefois deux regrets dans cette nouvelle période numérique : la qualité du son a énormément baissé. Comment imaginer produire des sons en qualités 96 kHz / 24 bits en studio pour les voir diffusés sur des téléphones portables en MP3 compressé et en mono ? Il faut vraiment faire attention à l'éducation des prochaines générations mais à force de ne plus avoir de référence de qualité et bien on finit par s'habituer à écouter de la bouillie. Mon deuxième regret, c'est directement lié au fait que tout le monde fait de la production aujourd'hui, tout le monde est artiste et donc du coup nous sommes inondés de bouillie. La nouvelle génération ne prend le temps de faire du mastering, du sound design, des prises de son en haute qualité. Alors, tout se ressemble et on connait actuellement une déferlante de sons de mauvaise qualité.

Es-tu toujours aussi proche de David Guetta ?
Qui ? Sérieusement, nous ne sommes plus du tout proche, nous avons chacun notre vie, nos priorités, nos objectifs et il s'avère que ceux-ci sont incompatibles. Cela à bien marché pendant 9 ans, nous avons mis sur orbite un projet, je suis fier d'avoir aidé au lancement de cette fusée, mais maintenant je ne peux pas donner 24 heures de mon temps pour un seul projet.



Avec quel artiste rêverais-tu de collaborer ?
Craig Amstrong, Duke Ellington, William Orbit, Nina Hagen ou Annie Lenox.

Peux-tu nous parler de l'Inox Festival ?
Je suis fier d'être une des personnes à l'origine de ce festival en plein air organisé le 10 septembre. Le line up est exceptionnel et vraiment à la hauteur de cette deuxième édition. Il faut imaginer une île au milieu de la Seine qui offre un cadre paradisiaque et dans ce parc, 2 ou 3 scènes qui, en version non-stop de midi à minuit, font danser 15 000 personnes en harmonie avec la nature, la musique et quelques attractions extrêmes de type saut à l'élastique, manèges et surprises. C'est une vraie fête où chacun peut venir habillé, déguisé, en famille, en solo.

Si on enlève tout ce qui est électro-dance, quels sont les artistes que tu apprécies ?
Craig Amstrong, Eric Satie et Chopin.

Quel sera le prochain défi de Joachim Garraud ?
Organiser une fête incroyable à Caen pour l'anniversaire de Zemixx, mon émission de radio et podcast qui fête le 3 juin son 300ème numéro. On organise des bus au départ de plusieurs villes en France, le tout rediffusé en direct sur FG DJ Radio. C'est un rendez-vous incontournable pour ceux qui veulent vivre une expérience unique.