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L'heure est au reconfinement national. Pour enrayer la seconde vague de l'épidémie de coronavirus (Covid-19), qui franchissait le cap symbolique du million d'infectés en France la semaine passée, le président Emmanuel Macron a annoncé hier soir la mise en quarantaine du pays pour une période s'étalant du 30 octobre au 1er décembre a minima. «
Le virus circule en France à une vitesse que mêmes les prévisions les plus pessimistes n'avaient pas anticipé (...). Nous sommes débordés par une seconde vague qui sera plus meurtrière que la première » a reconnu le chef de l'Etat avec gravité lors d'une allocution suivie par 32,7 millions de Français. Les contours de la mise en application de cette mesure seront détaillés ce jeudi à 18h30 lors d'une conférence de presse du Premier ministre Jean Caster. Mais déjà, l'inquiétude saisit l'industrie du spectacle vivant, déjà en proie à une crise économique sans précédent. «
Entre sauver des vie et sauver le théâtre, bien entendu il faut sauver des vies. Mais ce serait encore mieux de sauver des vies et de sauver le théâtre aussi. Le théâtre va crever. Il faut le savoir aussi » réagit Jean-Michel Ribes, directeur du théâtre du Rond Point à Paris, auprès de l'
AFP.
"Ce virus nous assèche"
Aucun mot n'a été prononcé par Emmanuel Macron pour le secteur culturel, «
sous cloche » depuis le début de la crise sanitaire avec des reports à la chaîne, une saison blanche pour les festivals et des restrictions sanitaires qui paralysent durablement ses activités. «
La période est difficile » estime Aurélie Hannedouche, porte-parole du Syndicat des musiques actuelles (SMA), qui souligne les efforts et «
l'accompagnement économique » du gouvernement, qui mettait en place un
plan d'aide de 2 milliards d'euros pour sauver la Culture à la rentrée. Mais rappelle l'importance du «
rôle social » des concerts et spectacles. «
Les spectateurs nous ont dit à quel point ils appréciaient ces bulles d'air, ces bouffées d'air frais dans le climat actuel (...) Ce virus nous assèche, nous appauvrit intellectuellement, on ne parle plus que de ça, on ne va plus aux concerts, au théâtre, voir du stand-up » se désole-t-elle.
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'Nous nous faisâmes encore n*quer !'
En outre, des centaines de milliers d'intermittents du spectacle sont mis au chômage technique depuis des mois. «
Plus que de l'argent, il va nous falloir des psys : nos équipes, nos salles adhérentes, comme les artistes d'ailleurs, sont à ramasser à la petite cuillère. Nous n'en pouvons plus de ces deux pas en avant/trois pas en arrière, de reporter des reports » renchérit Aurélie Hannedouche. «
Pour eux, le confinement perdure. Je trouve ça anormal. Si une solution existe, il faut la mettre tout en haut de la pile des priorités parce que ça fait trop longtemps » confiait Amir dans une
interview accordée à Pure Charts il y a quelques jours. Un sentiment d'abandon partagé par l'humoriste et chanteuse
Camille Lellouche, qui a improvisé une petite «
dictée du soir » grinçante hier soir après les annonces du président. «
Nous écoutâmes le discours de Monsieur le Président ce soir, et nous fûmes surpris quand nous voyâmes qu'il ne parlûte pas des humoristes, chanteurs, techniciens, régisseurs, musiciens... Nous nous rendâmes compte une fois de plus que nous nous faisâmes enc*lâtes bien fort. Il nous chialâtes dessus, une fois, maintenant deux, et pourquoi pas trois ? Il jurâte de nous respecter, et au final, nous nous faisâmes encore n*quer ! » l'entend-on se désespérer dans une vidéo déjà visionnée plus de 700.000 fois
sur Instagram. «
Jai le sentiment de vivre un jour sans fin » résume l'humoriste Nora Hamzawi dans les colonnes du
Monde.
La
fermeture des salles de spectacles et des enseignes commerçantes est d'autant plus épineuse qu'elle intervient à l'approche des fêtes de fin d'année, qui concentre l'essentiel de l'activité économique sur les mois à venir. «
C'est un nouveau coup dur, un nouveau coup d'arrêt pour les billetteries. Or, on sait qu'à Noël, d'ordinaire, l'achat d'un billet de spectacle comme cadeau est courant. Et surtout, notre reprise d'activité est encore repoussée à une date inconnue » commente Malika Seguineau du Prodiss, qui évoque «
l'effet de sidération » de la branche culturelle.
Selon un rapport de la Confédération internationale des sociétés d'auteurs et compositeurs (Cisac), qui réunit 232 sociétés d'auteurs de 121 pays, publié mercredi, les conséquences de la crise sanitaire pourraient entraîner une perte de 3,5 milliards d'euros de revenus pour les créateurs.