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Se dirige-t-on vers un #MeToo de l'industrie musicale ? Trois ans après la libération de la parole sur les agressions sexuelles faites aux femmes à travers ce mouvement international de prise de conscience, qui s'est répercuté et décliné en France avec le hashtag #BalanceTonPorc, le collectif
Music Too France a lancé depuis le 18 juillet dernier un appel à témoignages pour briser l'omerta dans le monde de la musique, une «
filière professionnelle parfois dangereuse, souvent toxique pour les femmes, pour la communauté LGBTQIA+ et les personnes racisées sous représentées » selon les professionnel.le.s de l'industrie, toujours en poste ou ayant quitté le milieu, qui signent ce manifeste et espèrent donner une ampleur médiatique à cette initiative, déjà relayée par des artistes comme Christine and the Queens,
Camélia Jordana ou Pomme.
"Il est temps que la peur change de camp"
A travers un
formulaire en ligne disponible jusqu'au 30 septembre, #MusicToo veut libérer la parole, rassembler des témoignages et croiser des histoires concordantes afin de faire tomber les agresseurs et accompagner les victimes dans leurs démarches. «
A partir de ces informations, nous pourrons associer des agressions et violences entre elles, commencer à dessiner des profils et rassembler des plaintes. Nous travaillons avec des avocates et deux associations pour vous accompagner vers un suivi juridique ou psychologique si nécessaire » est-il précisé. Car pour le collectif, «
il est temps que la peur change de camp » : «
Les oppressions s'imbriquent et se cumulent dans un secteur dominé par les hommes : ce sont eux qui occupent les métiers en lien avec l'artistique, la direction, la technique et tiennent les postes clés qui permettent le développement ou la fin des carrières. Le rapport de pouvoir est tel que les abus - en nombre - ne sont jamais dénoncés, de peur de perdre son emploi, dans un secteur très concurrentiel et sexiste ». Les victimes qui souhaiteraient témoigner peuvent le faire de manière anonyme ou non.
Selon une enquête réalisée en 2019 par le collectif CURA, 1 femme artiste sur 3 a été agressée ou harcelée sexuellement dans l'industrie musicale en France. En novembre dernier, Emily Gonneau, co-fondatrice de l'agence Nüagency, était la première femme à
témoigner à visage découvert de l'agression sexuelle dont elle a été victime au sein de l'industrie musicale. Elle est à l'origine du hashtag #MusicToo, repris par le collectif. En février 2020, les soeurs
Camille et Julie Berthollet dénonçaient à leur tour les agressions sexuelles qu'elles ont subies dans le milieu de la musique classique.
Quelques chiffres fournis par Music Too France pour mieux comprendre le sexisme de l'industrie musicale :
- 97% des groupes programmés par les grands festivals de musique sont composés
exclusivement ou majoritairement d'hommes
- 88% des programmateurs de salles de musiques actuelles sont des hommes
- 75% des directeurs de salles de musiques actuelles sont des hommes
- 86% des postes de direction en label sont tenus par des hommes
- 97% des postes de direction et de programmation des lieux jazz et musiques improvisées
sont occupés par des hommes
- Il n'existe que 4,3 % de femmes cheffes d'orchestre dans le monde