Annie CordyVariete Francaise » Variété française
lundi 29 octobre 2012 18:00
Annie Cordy : "Le mot retraite, il faut l'enlever du dictionnaire"
Annie Cordy est de retour ! L'artiste se remet en selle et délivre ce mois-ci un nouvel album. Quatorze ans qu'elle n'avait rien publié. "Ça me plait
Pourvu que ça vous plaise" témoigne de la vitalité de l'interprète de "Tata Yoyo" qui n'a rien perdu de son énergie, ni de son franc-parler. Sans tabous ni fausses notes, elle se livre sur sa carrière et nous donne son point de vue sur la scène musicale actuelle.
Crédits photo : ABACA
Propos recueillis par Jonathan Hamard Pure Charts : Ma première question concerne la piste numéro 1 de votre album, la chanson "Trois notes de musique". Vous dîtes dans ce titre : "Je ne fais que des chansons, je ne donne pas de leçons. Je vends du rêve et des bonbons et je l'ai fait à ma façon". Est-ce dire que cest votre dernier album ? Annie Cordy : Oui ! Enfin non ! (Rires) Pourquoi voulez-vous que ce soit mon dernier album ? Mes chansons, je les ai faites à ma façon et je compte les faire toujours comme je le souhaite dans dix ans, même vingt ans si la vie me le permet. Je nai pas cherché à imiter les autres ou à rentrer dans le moule de ce qui se faisait à une époque ou une autre. Et cest encore vrai aujourdhui ! Ça na rien à voir avec le passé ou lavenir. Peu importe les modes ! A partir du moment où lon sy intéresse, on est déjà dépassé de toute façon. "Ça me plait Pourvu que ça vous plaise", est-ce un album confession ? Non, pas du tout ! Ce titre symbolise tout simplement le travail que jai fait avec ma nièce pour ce disque. Jaime beaucoup ce que jai fait avec elle. Cest elle qui eu lidée de le faire. Cest vrai que ça faisait longtemps que je nen navais pas sorti. Le dernier remonte à 1998. Je nai pas eu le temps. Je nai pas arrêté de travailler ! Je me demandais ce quun tel projet pouvait mapporter de plus. Et puis, je me suis finalement laissée tenter. Et il est très bien ! "Ça me plait Pourvu que ça vous plaise", cest aussi un titre en hommage à mon public. Jai toujours eu un profond respect pour lui depuis Je ne dirais pas le nombre des années mais jen suis quand même à quatre générations ! (Rires) Quest-ce qui sest passé pour vous durant ces quatorze dernières années ? Il sen est passé des choses ! Jai été en tournée, jai monté un spectacle Je narrête pas ! Je ne suis pas souvent chez moi. Je reviens dun concert au Zénith de Saint-Etienne. Jétais toute seule sur scène. Il y avait cinq milles personnes. Vous savez, dans le cur des Français, je crois que j'ai gardé une place. Quand on me croise dans la rue, on me demande toujours comment je vais, ce que je fais, et puis de signer des autographes... Jen profite dailleurs pour prendre la parole et mexcuser auprès du public qui mécrit. Jai beaucoup de retard dans le traitement du courrier et je nai pas encore eu le temps de répondre à tous ceux qui mont écrit pour mon anniversaire. Cétait le 16 juin. Alors je leur promets de tous leur répondre. Je leur écrirai une carte de vux en même temps. Les gens qui vivent dans le passé sont déjà morts C'est quelque chose de primordial, le respect du public pour construire une carrière dans la durée ?Mais bien sûr ! Jai du respect pour tout le monde vous savez. Jai été élevée comme ça. Je dis bonjour aux gens que je rencontre. Je viens dun milieu modeste. Ce sont les choses quon ma apprises et qui restent très importantes à mes yeux. Vous parlez avec beaucoup dentrain. Vous gardez la même pêche, la même envie de distraire le public. On lentend en tout cas sur ce nouvel album comme on la vu dans vos spectacles. Le show, cest lhistoire de votre vie ? Oui. Cest le partage qui prime pour moi. On se retrouve ensemble un soir pour samuser. Ils ont leurs problèmes, jai les miens, mais nous prenons du bon temps ensemble. Je ne vais pas leur donner les miens puisquils ont déjà les leurs. On ne pense quà chanter ensemble. Cest simple vous savez. Quand vous regardez en arrière et que vous voyez défiler les années. Selon vous, quest-ce que vous avez le mieux réussi ? Ouh ! Quelle question vous me posez-là ! Je crois que jai réussi ma vie. Jai réussi ma vie artistique. En ce qui concerne ma vie de femme, cest autre chose. Jai perdu mon mari il y a un peu plus de quinze ans. Mon mari, cétait mon amant, mon amour Mais sinon, je pense que jai eu un très beau parcours. Je naime pas le mot carrière. Je préfère le mot parcours. Je nai pas fait que de la chanson. Jai également fait de lopérette, de la comédie musicale, du cinéma, de la comédie... Jai toujours été très curieuse. On me présenterait une comédie abstraite, que personne ne comprend, je la jouerais volontiers. Si je la comprends bien sûr ! (Rires) Je ne suis pas à la recherche de la gloire. Avez-vous à linverse des regrets ? Y-a-t-il des choses sur lesquelles vous aimeriez revenir ?Non. Je ne sais pas ce que sont les regrets ! Tant mieux ! Je ne regarde pas beaucoup derrière moi. Jai des souvenirs magnifiques de ce que jai fait dans le passé, mais je ne my attarde pas. Les gens qui vivent dans le passé sont déjà morts. Y a-t-il des moments clefs dans votre carrière ? Des années qui ont compté plus que dautres ? Les trois plus belles années de mon parcours, ce sont celles que jai vécues avec Luis Mariano. Nous avons joué ensemble une opérette qui sappelait "Visa pour lamour". Jai vécu trois années formidables. Je nai jamais fait autant dexpositions de peintures, de musées Mais à côté de ça, cétait un type extraordinaire. Il arrivait sur scène avec une chaussure noire, une chaussure bleue. Nous avons passé de très bons moments ! Avec Bourvil aussi ! Ce quil y a de terrible, cest que, moi qui ne regarde jamais trop derrière moi, je nai plus aucun homme avec qui jai beaucoup travaillé à mes côtes. Ils sont tous partis. On retrouve dailleurs un duo sur cet album, la chanson "Hawaï 1942". Oui. Il a été enregistré avec Manu Dibango. Cest un merveilleux saxophoniste. Il est encore vivant, lui ! (Rires) Je le connais bien. Je savais que sa voix collerait parfaitement sur ce titre. On imagine un gars de la Marine, en costume, et puis une infirmière Cest une chanson quon m'a proposée et je trouvais que la musique était jolie. Elle a une atmosphère. Dans la chanson "Nos curs à lunisson", vous exprimez la volonté de revoir le monde avec des yeux denfant et vous parlez aussi de recommencer peu à peu à regarder à lhorizon. Est-il plus difficile dêtre dans un esprit de fraternité quand on est adulte ? Je dis ça pour ceux qui nont rien, qui sont pauvres. Je leur propose de regarder à lhorizon pour garder lespoir que dans un futur proche tout sarrangera. Vous savez, jentends parler du mal de vivre depuis des années. On entend que les gens meurent de faim depuis tant dannées. Je dis dans la chanson : « Vivons ensemble ». Parce quil est très difficile de vraiment vivre ensemble. Il existe des clivages quil faut dépasser. Mais ce nest pas toujours évident. Il y a les riches, les moins riches et les pauvres. Ce nest rien un simple bonjour, même si la personne en face de nous nest pas nette. Je nai jamais fait la différence entre quelquun qui a des millions et quelquun qui na rien. Ecoutez le nouveau single d'Annie Cordy, "Les baisers de mon cur" : Pour résumer, les choses simples sont les plus importantes. Les choses simples vous emmènent vers dautres choses. Si vous ne tendez pas la main à quelquun, vous ne pourrez pas apprendre à le connaître. Si vous lui tendez la main, vous allez lui parler. Après, peut-être aurez-vous lenvie de faire autre chose, et daller plus loin. Peut-être que cest lui qui voudra partager autre chose. Cest une image que jemploie quand je parle de tendre la main. Ce qui est important, cest de savoir partager. Il faut essayer daméliorer les choses. Vivons ensemble ! Certains font tout pour y arriver alors quils nont aucun talent Dans un tout autre registre, jaimerais connaitre votre point de vue sur la scène française actuelle. Vous avez vu défiler plusieurs générations dartistes. Quest-ce qui vous touche ou vous interpelle aujourdhui ?Oh je pense bien ! (Rires) Jaime beaucoup Julien Doré, Christophe Willem et Amel Bent. Elle est formidable. Mais je ne suis pas très rock'n'roll. Je ne les connais pas assez. Je connais les groupes anglais dil y a vingt ans, qui refont surface dailleurs. Quand je dis vingt ans, je me trompe. Je parle des années 60 ! (Rires) Mais quand on aime, on ne compte pas ! Vous citez Christophe Willem et Amel Bent. Ils participent tous les deux à une compilation de reprises en hommage à Jean-Jacques Goldman, qui sortira très prochainement. Accepteriez-vous que la jeune génération, comme elle le fait pour Jean-Jacques Goldman, reprenne vos titres pour une compil ? Je trouve que ce projet est chouette mais cest une idée qui ne meffleure même pas en ce qui me concerne. Ça me ferait plaisir mais je ne suis pas à la recherche de la gloire. Vous savez, sil ny avait pas ma nièce, je crois que cet album ne serait jamais sorti. Je vis une deuxième jeunesse avec elle. Cest la fille de ma sur et ma filleule en réalité. Quand on m'a proposé de venir sur Paris pour faire du théâtre, pour danser au Lido dans les années 50, on m'a traînée. Vous ne devez pas vous en souvenir. Vous nétiez même pas né ! (Rires) Je ne suis pas une arriviste. Jai horreur des carriéristes ! Il y a toujours eu des arrivistes. Certains font tout pour y arriver alors quils nont aucun talent. Beaucoup dartistes prennent part à des projets de télé-réalité ou télé-crochet. Avez-vous reçu quelques propositions ? Bien sûr ! On m'avait demandé pour la première saison de "Danse avec les stars". Je trouve l'émission très bien mais ce n'est pas pour moi. J'ai refusé. Moi qui ne regarde pas la télévision, j'avoue que je suis ce programme. La petite Amel Bent est très bonne. J'ai vu qu'il y avait aussi Lorie. Mais je dois laisser ça aux petites minettes. Et puis, entre nous, je crois que je leur ferais de l'ombre (Rires) Vous dîtes dans la dernière chanson de votre album que vous êtes une machine à chanter. Les références à danciens titres y sont nombreuses. Est-ce de lauto-dérision ? Une caricature ? Cest Jean-Max Rivière qui ma proposé cette chanson. Ce nest pas nimporte qui, vous savez ! Cest chouette ce quil a fait pour moi quand même. Cette chanson me reflète bien. Je laime beaucoup. Parce que cest vrai que je chante tout le temps. Quand mes amis me demandent si je suis allée voir la dernière exposition ou le dernier film en salle, si jai pris le temps daller visiter un parc Je leur réponds toujours non car je nai pas le temps. Jarrive pour répéter avec mes musiciens. On fait les balances. Ensuite je rentre dans ma loge pour me faire une tête comme je dis. (Rires) Et hop ! Cest parti pour 1h30. Une fois le show terminé, je repars en voiture avec ma nièce et on se tape quand même 400 bornes. La retraite, ce nest donc pas pour tout de suite... Je vous le dis tout de suite : le mot retraite, il faut lenlever du dictionnaire. Je suis une enfant de la guerre. Et quand on disait retraite, on disait défaite. On devrait inventer un nouveau terme, comme ma "deuxième vie" ou "ma vie en rose". Quelque chose de beau, de joyeux On va finir ensemble !
Pour en savoir plus, visitez annie-cordy.com.
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