Arno Santamaria en interview

Grâce à la mobilisation de 289 internautes-producteurs, Arno Santamaria publie son premier album. Auteur et compositeur, le chanteur propose ainsi onze chansons comme autant de couleurs d'un univers aussi varié qu'intense. Des mélodies efficaces et des textes ciselés, guidés par une vision percutante de la société font d'Arno Santamaria un artiste prometteur. Interview.
Bonjour Arno. Produit par les internautes, ton premier album vient d’arriver dans les bacs. Peux-tu pour commencer te présenter à celles et ceux qui te découvrent ? (Nikolas Lenoir, journaliste) ?
Arno Santamaria : Je m’appelle Arno Santamaria. Il s’agit de mon vrai nom et donc pas d’un nom choisi pour la scène. Je le précise car pas mal de monde se pose la question. Je suis issu d’une famille d’immigrés italiens. Mon disque sort le 19 octobre. Comme c’est souvent le cas pour les premiers albums, il retrace toute ma vie et j’y ai mis beaucoup d’énergie. Ma présentation est surtout dans cet album.

Découvrez un teaser de l'album d'Arno Santamaria :
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Pourquoi as-tu fait le choix de passer par un label participatif ?
Spidart est franchement un label dont on m’avait parlé. Je l’ai ainsi découvert et je ne connaissais même pas les autres labels participatifs. J’étais sceptique au départ. J’ai rencontré une personne du métier qui m’en a dit beaucoup de bien. Je me suis inscrit sur le site, le comité d’écoute a écouté mon projet et j’ai été accepté. Je suis rentré sur Spidart avec la certitude de tenter une aventure. Elle a été beaucoup plus rapide que je ne l’imaginais. Je suis fier que cela soit devenu plus qu'une aventure. C’est devenu un label que je défends car j’y ai retrouvé les codes professionnels d’une vraie maison de disques avec en plus, une forte humanité. Je ne crache pas sur le système, les maisons de disques font du bon travail mais la démarche est différente avec un label participatif. C’est un système communautaire, des gens participent, on échange et c’est très humain.

Est-ce que le parcours et le succès de Grégoire t’ont encouragé dans cette démarche ?
Pas du tout car de fait, je n’en ai pas eu le temps. Je suis rentré chez Spidart en seulement trois semaines. Je n’ai pu appréhender les choses avec du recul. Je n’avais pas de référence directe avant lui. La presse m’en parle souvent. Même si je n’aime pas ce terme, j’espère que les choses vont marcher. J’ai conscience que si cela se passe bien, je vais rentrer dans cette comparaison. Je serais d’ailleurs ravi que l’on se rencontre et que l’on échange car on fait des choses différentes.

Comment as-tu vécu la rapidité avec laquelle les internautes se sont mobilisés pour te faire atteindre les 50.000 euros ?
Cela permet de rester humain à tous les niveaux.
J’étais très surpris. La première part est déjà assez difficile à comprendre car en retour, l’artiste n’offre rien. Quand on fait de la musique, on propose de la musique, elle correspond à ce que l’on est, aux gens… Le fait de mettre de l’argent pour continuer à cette musique de vivre est sublime. En trois semaines, les 50.000 euros pour la réalisation de l’album ont été atteints. Il y a un engouement et en même temps, je n’ai pas eu le temps d’y penser. On est happé par ce qui se passe. Ce système permet de garder les pieds bien à plat car on n’est pas tout seul. L’artiste est aussi responsable vis-à-vis des gens qui ont investi, il y a beaucoup de communication et cela permet de rester humain à tous les niveaux.

Découvrez le clip d'Arno Santamaria, "Demain" :


Découvrez le clip d'Arno Santamaria, "Demain", nouvelle version :


Quelles sont tes références musicales ?
Elles sont pour la plupart anglo-saxonnes en termes d’esthétique musicale. Je pense à Radiohead et Jeff Buckley entre autres. Quand j’avais quinze ans, j’avais un groupe de hard rock, j’ai fait beaucoup de guitare, j’ai fréquenté des scènes rock, hard-rock. Mes racines musicales sont là sauf que dans tout ça, j’ai fait ma balance avec les mots. Je suis tombé amoureux du verbe. En ce qui me concerne, un mot est multi-sens, je peux l’appuyer, le raconter… Mes références annexes sont les artistes de la grande Chanson française. Il a fallu que je jongle entre mon amour pour Brel, Ferré et Radiohead, Jeff Buckley… J’ai toute la discographie de Léo Ferré, j’ai ses biographies… Je suis d’ailleurs passé au bac avec "Poètes Vos Papiers". J’avais une prof de français sublime pour ça car elle m’a fait passer l’oral avec ce texte. Il y a beaucoup de termes complexes, ce n’est pas facilement abordable et j'aime ça. J’ai cette culture du son, de la musique et celle des mots. J’ai tout regroupé, j’ai mélangé, j’ai jeté en l’air et c’est ce que j’essaie de faire aujourd’hui.

Quelles sont tes inspirations au niveau des thèmes que tu abordes ?
L'autre est un vrai sujet pour moi.
Je parle essentiellement de la société. J’y mets une part de moi. Je pense que c’est autobiographique dans le sens que je suis ancré dans cette société. On lâche assez de choses dans la musique, dans les textes pour ne pas dire que l’on parle des autres. Je vois la société dans sa largeur et l’autre est un vrai sujet pour moi. Je parle de la société, de l’autre, de moi et de comment tout le monde vit ensemble. Je m’intéresse aussi à la façon dont on pourrait vivre mieux ensemble, avec les aigreurs, les ratés et tout ce qui fait que l’on peut encore grandir. Demain n’est pas encore arrivé, c’est donc qu’il reste un grand chemin.

On retrouve sur l’album la chanson "De Quel Côté" datant de 2007. Comment as-tu choisi les titres présents sur l’opus ?
Cela est à mettre en parallèle avec le fait que je considère un premier album comme un condensé de ce que l’on a vécu avant. "De Quel Côté" n’est probablement pas le titre le plus fort du disque. Il a eu plusieurs versions d’ailleurs. J’ai voulu qu’il soit sur le disque car il est référent d’une certaine manière. Il faut choisir son camp à un moment donné, à tous niveaux. Sans être manichéen, on ne peut pas non plus être toujours au milieu. Cela reste d’actualité. Les autres chansons de l’album ont été faites de la même façon, pas à pas, avec du temps, de la réflexion. Quand je commence à écrire, cela dure longtemps. Pour moi, je ne commence à écrire qu’au moment où je me corrige. Je ne suis pas friand du premier jet, j’aime revenir sur les choses, avoir de la maturité sur le propos, l’histoire du titre… Cela prend du temps car j’ai besoin de nourrir les choses.

Retrouvez le clip d'Arno Santamaria, "De Quel Côté" :
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Tu écris "De quel côté allons-nous nous opposer" et on retrouve dans "Chez Moi", un propos fort dans cette chanson "Ma France qui s’endort". Es-tu un artiste révolté avec une vision assez sombre de la société ?
Bizarrement, en vieillissant, je trouve que la société est plus riche dans ses révoltes que ce que l’on peut penser. J’utilise ce genre de langage pour être certain que nous sommes encore un peu comme ça. La révolte est présente chez moi, elle est vraie mais elle n’est pas si sombre. J’y mets quelque chose de positif car je sais que l’on est fort de cette capacité à réagir. C’est très latin, très français, nous ne sommes jamais contents. Un Français dans un avion, s’il n’est pas à côté du hublot, il n’est pas content. C’est une façon caricaturale et humoristique de présenter les choses et de dire que l’on n’est pas d’accord avec le système. Je tends à vouloir que les choses bougent vraiment et j’y crois.

Tu évoques ton fils dans le titre "Chez Moi". Dans quel sens la paternité peut changer un homme et un artiste ?
C'est tellement bouleversant.
Ma question piège est là car c’est tellement bouleversant. Il y a un truc fondamental qui change dès que tu deviens père. Tu sais que demain, ce n’est pas que ta vie change, c’est que tu n’auras plus la même sérénité. Quelque soit la raison et le degré, tu seras toujours inquiet. L’amour est tellement là que l’on ne pense pas à cela. On devient responsable. Quand j’écris "Que je tiens de mes mains pour éviter qu’il glisse", c’est à tous les niveaux. Je sais qu’il peut glisser dans l’entourage, dans là où j’habite, à l’école, physiquement, dans ce qu’il va lâcher, retenir, devenir…

L’album est passé du titre "Le Café Des Copains" à un album éponyme. Pourquoi as-tu fait ce choix ?
C’est en fait une erreur globale de communication. "Le Café Des Copains" est en fait le nom de mon forum dans lequel on organisait des apéros virtuels, on discutait, on échangeait... Certains ont commencé à communiquer avec ce nom là et pour beaucoup de gens, cela est devenu le titre de l’album. Je n’avais pas envie d’avoir un nom d’album pour le premier. Pour les raisons que nous avons évoquées, je pense que le premier album est le plus légitime pour être éponyme.

Tu seras au Café de la Danse le 16 novembre. Est-ce qu’une tournée est prévue ?
La scène est ma seconde vie.
Normalement oui et elle devrait commencer courant 2010. Tout dépend de la façon dont l’album va être reçu et dont il va se vendre. Ces critères font beaucoup. La scène est ma seconde vie. J’aime tellement être en studio, m’y enfermer que quand je sors, c’est pour aller sur scène. Je suis très impatient de faire des concerts.

Quel message aimerais-tu transmettre au public et aux internautes ?
Si c’est un message social, c’est juste de faire attention à ne jamais oublier les combats dans lesquels on a été. On a des libertés incroyables en France, il suffit de regarder ce qui se passe dans d’autres pays. Il faut avoir conscience que nous sommes privilégiés. Il faut continuer à rester des personnes fidèles à certains engagements et à certaines valeurs. L’autre message est d’écouter, d’être à l’écoute mais cela peut rapidement devenir philosophique. Je préfère rester dans un langage de toi à moi. Cet album a ce sens, je parle de moi mais en fait, je parle de toi et on peut discuter. Je te propose, tu écoutes, tu me dis ce que tu en penses… J’ai envie que mon album marche de cette manière là, que l’on puisse se retrouver dans les mots, dans la musique. C’est un album d’échanges. Le jour où l’on aura perdu l’échange, on aura tout perdu.

Merci Arno et bonne chance pour ce premier album.
Merci à toi.
Pour en savoir plus, visitez son MySpace officiel.

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