Elodie Frégé en interview

La gagnante de la "Star Academy 3" vient de publier son deuxième album, réalisé par Benjamin Biolay et dont elle a écrit la moitié des titres. Les critiques sont unanimes : une auteur est née. Charts in France a rencontré la belle : une jeune femme de mieux en mieux dans sa peau, franche, et d'une extrême gentillesse.
Charts in France (Thierry Cadet, rédacteur) : Bonjour Elodie, très heureux de te rencontrer. Dans quel état d'esprit es-tu quelques jours après la sortie de ton deuxième album ?
Elodie Frégé : Pour tout te dire, la veille de la sortie de mon disque, je n'ai pas fermé l'oeil de la nuit... j'étais très déprimée, très angoissée. Et puis le lendemain matin, je me suis dit : "Ca y est, il est en bacs, maintenant il ne t'appartient plus.", c'est une drôle de sensation, comme une espèce de Baby Blues, que je n'avais pas connu avec le premier album parce qu'il avait été fait très rapidement après ma victoire à la "Star Academy".

CIF : Il ne t'appartenait déjà plus quand les journalistes l'ont reçu. Je me souviens l'avoir écouté pour la première fois en juillet...
EF : Oui mais là il s'agit du public, et le verdict sera sans appel. Un journaliste peut ne pas aimer mon album et ce dernier se vendre quand même et rencontrer son public. L'inverse est, selon moi, plus grave.

CIF : Avec "Le jeu des sept erreurs", tu as pris le temps. Comment s'est passé la rencontre avec Benjamin Biolay ?
EF : C'était au concert de Florent Marchet à la Maroquinerie en mai 2005. J'y suis allée au culot en lui disant combien j'admirais son travail et combien je voulais collaborer avec lui. On s'est revu quelques jours plus tard et la première chanson que je lui ai interprétée avec ma guitare fût "Je sais jamais" ; c'est grâce à elle que tout a commencé. J'ai vraiment pris sur moi, j'avais peur des appriories : la pauvre fille blonde et fadace qui vient faire la groupie.

CIF : Tu as une image tellement négative de toi-même ?
EF : Je t'avoue que mon manque d'assurance s'est transformé depuis la sortie de ce disque. J'ai beaucoup de retours positifs. Et puis finalement avec Benjamin tout s'est bien passé, il a été très à l'écoute. Un jour il m'a dit "Tu m'inspires, comment ont-ils pu passer à côté d'un talent comme le tien ?". En moi-même j'ai pensé : "Tu te fous pas un peu de ma gueule?" (rires)

CIF : Tu as écris et composé quasiment la moitié du disque ; c'était une vraie volonté de ta part ?
EF : Une nécessité oui. J'avais déjà écris notamment "Je te dis non" qui était sur le premier album et qui est sorti en dernier extrait (NDLR : clippé par la sulfureuse réalisatrice Catherine Breillat). Je suis fan de littérature, écrire et lire est un vrai besoin pour moi. Tout a commencé avec l'humoriste Raymond Devos que j'admire profondément. J'aime jouer avec les mots, les consonances, les assonances... (NDLR : Elodie a reçu, en 2005, le prix littéraire du jeune espoir auteur-compositeur de chansons à texte de l'académie des Arts, Science, et Belles Lettres de Mâcon sous l'égide de l'Institut de France).

CIF : Tu peux être fière d'avoir sur ton album une chanson signée de la plume du grand Jacques Lanzmann (NDLR : Françoise Hardy, Jacques Dutronc...), une des dernières avant sa disparition je crois, non ?
EF : Oui je crois. C'est un grand honneur. "La fidélité" est une chanson que j'adore avec ce son très 70's et ses quelques sonorités électro.

CIF : Elle ferait un excellent second single...
EF : Si tu le dis ; merci beaucoup...

CIF : Avec ce deuxième album, tu véhicules une image très rétro, 60's ; la guitare à la main, facon Françoise Hardy...
EF : Je suis en effet fan des années 60/70. Mon père et ma mère écoutaient Hardy, Ferré, Dutronc, Brel et Barbara à la maison.

CIF : As-tu été déçue par l'accueil de ton premier album?
EF : Non. Déjà parce que j'en ai quand même vendu 250 000 exemplaires et que je ne pensais pas en vendre autant (NDLR : A titre de comparaison, Magalie Vaé la gagnante de la "Star Ac' 5" peine à atteindre les 20 000 exemplaires...). Ce chiffre me permet aujourd'hui d'être libre sur le second et de faire un album qui me ressemble vraiment, spé et mélancolique. Si j'avais vendu plus d'un million d'exemplaires du premier disque, on m'aurait demandé de refaire le même. En ça, je suis soulagée.

CIF : Pourquoi avoir choisi "La ceinture" comme premier extrait ?
EF : C'est une chanson que j'adore. Elle est très bien structurée, très envoûtante. Le texte de Benjamin m'a immédiatement parlé. Ca m'a fait penser aux prostitués par exemple qui, très souvent, n'embrassent pas afin d'éviter que les sentiments ne s'installent. Embrasser c'est comme un aveu pour moi, je suis très pudique à ce niveau là.

CIF : Tu avais déclaré avant ton passage sur le plateau de la "Star Academy 6" que tu voulais l'interpréter seule, en plus d'une reprise avec un élève. Finalement c'est avec Elfy que tu l'as chanté...
EF : On ne fait pas toujours ce qu'on veut. Je voulais la chanter seule parce que ce texte est tellement intime que je pensais qu'il ne se prêtait pas au duo. Puis quand j'ai su que je n'avais pas le choix, j'ai demandé à avoir un garçon à mes côtés, mais selon Jasmine Roy, aucun d'entre eux ne le passait assez bien. Finalement, je suis très heureuse de l'avoir chanté avec elle parce qu'Elfy a cette maturité nécessaire ; avec ses 31 ans, elle est la doyenne de la saison. Ce fût un très beau moment.

CIF : Ton album est entré à la 12ème place des meilleures ventes de disques en France, es-tu satisfaite ?
EF : Oui dans la mesure où la promo n'avait pas encore commencé à la sortie du disque. C'est maintenant que tout va se jouer, et puis tu sais, un album a une longue vie. Rien n'est joué. Je reste très confiante.

CIF : On a le sentiment que ta maison de disques n'a pas voulu trop te médiatiser, et essaye de te positionner différemment avec ce disque, notamment grâce à la scène...
EF : C'est juste. On laisse faire le bouche à oreille aussi, qui, heureusement, est très bon. Je vais prochainement monter sur scène pour défendre ce disque et faire mon métier qui ne s'arrête pas aux studios de télévision. Je veux aller à la rencontre de mon public. J'ai choisi le Café de la Danse sur Paris, je l'adore. J'y ai récemment écouté Brisa Roché et je trouve l'acoustique formidable. C'est important pour porter ce nouvel album sur scène car je serai souvent seule en scène avec ma guitare. C'est cette proximité avec les gens que je recherche. J'aime aussi beaucoup l'Européen, il n'est pas exclu que je le fasse.

CIF : Une proximité que tu as souvent exploré lors de petits concerts après la sortie de ton premier album, ce que beaucoup de gens ignorent...
EF : Oui c'est vrai. J'ai fais pas mal de galas, seule avec ma guitare, afin de tester mes nouvelles chansons. Tout cela n'a pas été médiatisé.

CIF : Comment va s'articuler ton tour de chant, quelle part feras-tu au premier album ?
EF : Je pense à seulement trois chansons. Je ne peux pas, par exemple, faire l'impasse sur "Viens jusqu'à moi" qui a été un tube et que mon public va me réclamer (NDLR : son duo avec Michal, classé 8ème au Top Singles en été 2004), ainsi que "Je te dis non", mais avec de nouveaux arrangements. Enfin je pense également à la chanson "Moins de toi" qui, elle, n'a pas été exploitée en single.

CIF : Et pas ton premier succès, "De l'eau" ?
EF : Non.

CIF : Pourquoi n'y a-t-il pas eu encore d'Olympia ? Jenifer, Nolwenn Leroy ou Grégory Lemarchal, les précédents gagnants de "Star Academy" s'y sont tous produits.
EF : Je n'ai jamais eu de réel désir de défendre mon premier album sur scène. Tu sais ce que c'est quand tu gagnes la "Star Ac'", tu sors et ton album est prêt. Je préfère le faire aujourd'hui car ce deuxième album me ressemble vraiment.

CIF : Sur ce deuxième album, il y a une chanson signée par Keren Ann, hors on sait que Benjamin Biolay et elle ne travaillent plus ensemble depuis plusieurs années... c'est donc un fond de tiroir ?
EF : Un fond de tiroir ? (rires) En fait, on avait commencé à enregistrer une chanson qui s'appelait "Les oiseaux rares" je crois, et dans laquelle il y avait un très beau gimmick avec des cordes que Benjamin voulait conserver. Cependant la chanson ne nous convenait pas dans son entité... c'est alors qu'il s'est souvenu d'une musique qu'il avait composé avec Keren et sur laquelle ce fameux gimmick de violons pouvait coller parfaitement. On a donc choisi cette musique et le titre, avec le gimmick, est devenu "Si je reste (un peu)" ; évidemment on a crédité le nom de son auteur, en l'occurence Keren Ann. Mais tu es bien renseigné dis-moi ! (rires)

CIF : Pourquoi avoir choisi de reprendre Jane Birkin avec "Le velours des vierges" (NDLR : un titre de 1978) ?
EF : Benjamin est arrivé un matin au studio avec des tonnes de disques, il en a toujours énormément sur lui. Parmi eux se trouvait l'album "Ex-fan des sixties" de Jane Birkin. Il m'a demandé d'écouter attentivement "Le velours des vierges" car c'est une chanson qui lui faisait penser à moi. J'ai adoré ce coté ambigue du texte, qui parle à la fois du désir d'un homme pour les jeunes filles vierges, mais qui peut même aller jusqu'à évoquer l'inceste. Le texte est magnifique, il me fait penser à ceux de Rimbaud ou de Beaudelaire, tous ses poètes du XIXème siècle que j'adore. C'est une chanson qu'avait également reprise Catherine Ringer des Rita Mitsouko.

CIF : Le duo avec Benjamin Biolay, "Le jeu des sept erreurs", quant à lui, évoque explicitement la grande époque Birkin/Gainsbourg. Connaissant l'admiration qu'a Benjamin pour le grand Serge, tu n'as pas peur qu'on dise qu'il joue à la poupée Barbie avec toi, façon "la Belle et la Bête"?
EF : Est-ce qu'il a joué à la poupée avec Keren Ann, Marie-Amélie Seigner ou Chiara Mastroianni ? Non. Alors je ne vois pas en quoi il y jouerait avec moi. Il a respecté mes choix, mes textes, mes musiques, nous avons fait cet album ensemble, tous les deux. J'ai adoré travailler avec Benjamin, c'est quelqu'un pour qui seule l'intention que tu mets dans ton interprètation est importante; il se fout de savoir si je suis un coma en dessous ou au dessus. Les gens s'en foutent de ca, ils veulent de l'émotion.

CIF : Ton album est très sexuellement subversif, il traite beaucoup d'amour, de relations charnelles, de sexe...
EF : De la vie finalement ! (sourire)

CIF : Dans "Douce Vie" par contre, c'est de la descente psychologiques aux enfers dont tu traites... torturée Elodie Frégé ?
EF : Oui. Et l'écriture est un éxutoire pour moi, justement par rapport à tout ce qui reste coincé au niveau du plexus ! (rires)

CIF : Ecrire pour d'autres ou co-écrire t'a déjà traversé l'exprit?
EF : Bien sûr. Je devais écrire un texte pour le deuxième album de Michal, mais malheureusement je n'ai pas le temps, ça demande beaucoup de concentration. J'admire aussi le travail de Joséphine Drai. On se fréquente un peu. Et puis tu veux un scoop? Avec Doriand on avait aussi commencé à travailler ensemble. Un jour peut-être...

CIF : Revois-tu toujours Michal (NDLR : finaliste de la "Star Ac' 3" aux côtés d'Elodie, et à qui elle a offert la moitié de son million d'euros de gains) ?
EF : Michal et moi sommes devenus de vrais amis.

CIF : Et les autres, Lukas Delcourt, Sofia Essaïdi, Morganne Matis...
EF : Je revois en effet Lukas, Pierre et Romain. Avec Patxi, on a du mal à trouver du temps libre ! Nos albums sortent simultanément ! (rires)

CIF : Et Edouard Algayon (NDLR : Avec qui Elodie a vécu une histoire d'amour, actuel guitariste de l'orchestre de David Berland qui officie sur chaque prime-time de "Star Academy") ?
EF : Non.

CIF : Tu avais déclaré il y a quelques temps t'amouracher toujours des Bad Boys qui te faisaient souffrir, Edouard était loin d'en être un !
EF : J'ai dit ça mais je me soigne !

CIF : Ne crois-tu pas que s'amouracher d'un Bad Boys qui te fait du mal, c'est simplement être dans l'auto-destruction dû au manque d'estime de soi ?
EF : Tu as peut être raison...

CIF : Merci Elodie, ce fût un réel plaisir...
EF : Merci à toi et à Charts in France, je dois malheureusement te quitter parce qu'une autre interview m'attend...

Elodie Frégé sera sur la scène du Café de la Danse, à Paris, les 7 et 8 décembre prochain.

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