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Zaz en interview : "Je n'ai pas envie de devenir l'ambassadrice de la chanson française"

Par Jonathan HAMARD | Rédacteur
Zaz publie cette semaine son troisième album "Paris", à travers lequel elle rend hommage à la ville lumière qui continue de l'inspirer, bien que sa carrière internationale l'oblige à beaucoup se déplacer désormais. C'est à cette occasion que nous avons rencontré la chanteuse, qui se confie sur sa passion du jazz, sa rencontre avec Quincy Jones, et qui donne son point de vue sur les télé-crochets lorsqu'elle ne rappelle pas Dave à l'ordre.
Crédits photo : Yann Orhan
Propos recueillis par Jonathan Hamard.

Je ne pensais pas qu'on se reverrait si tôt !
Zaz : Tu as vu comme ça arrive vite ! (sourire)

On a même l'impression qu'il arrive un peu à l'improviste ce projet...
Complètement ! Il est arrivé par hasard, lors d'une réunion avec mon label et mon directeur musical. D'un coup, tout le monde a commencé à balancer des idées. Moi, j'ai parlé de Paris et des personnes avec lesquelles j'avais envie de travailler en France ou à l'étranger. C'est vrai qu'on m'avait déjà demandé plusieurs fois un album de reprises de vieilles chansons. On m'a notamment parlé d’Édith Piaf. Mais je n'avais pas envie d'enfoncer le clou. (sourire) Je n'ai pas envie de devenir l'ambassadrice de la chanson française à l'étranger. Ne me mettez pas ce poids sur les épaules ! (sourire)

Par-dessus tout, j'aime la mixité !
Pourtant, tu es bel et bien la chanteuse française qui vend le plus de disques à l'étranger.
En fait, c'est surtout le terme qui me dérange. J'ai l'impression que ça fait un peu élitiste. Je ne représente pas la chanson française. Je n'en représente qu'une toute petite partie. Moi, j'ai simplement envie de faire plaisir tout en me faisant plaisir. Et donc l'idée d'un disque jazz est vite arrivée. Et moi j'ai évoqué le nom de Quincy Jones !

Qui est le réalisateur de cet album. Pourquoi lui ? C'était un rêve de petite fille ?
La première fois que j'ai prononcé son nom, tout le monde s'est foutu de moi. Je l'avais déjà demandé sur mon deuxième album "Recto verso", mais on ne m'avait pas prise au sérieux. Et là, je me suis dit que, quitte à faire un disque de reprises de chansons françaises avec du jazz, il fallait le faire avec Quincy. J'avais cette envie en moi depuis longtemps. Parfois, j'ai des visions. Et je sais qu'elles sont justes. Je peux douter de beaucoup de choses dans ma vie, mais quand j'ai une vision, je sais que ça va arriver. On a fait la demande. Tout le monde avait peur d'être déçu. Mais on a finalement reçu une réponse positive. L'équipe de Quincy elle-même était assez surprise parce qu'il a refusé pas mal de projets ces derniers temps.

Tu ne parles pas très bien anglais à ma connaissance. Comment avez-vous communiqué avec Quincy Jones ?
Bizarrement, je pense que notre enthousiasme a tout fait... (rire) C'était le fait d'être content de faire de la musique ensemble. Comme si on s'était reconnu ! C'est quelqu'un de très espiègle. On a commencé par faire des conférences par Skype avec John Clayton, qui est son bras droit. C'est d'ailleurs lui qui a dirigé le big band. Il a aussi arrangé quelques morceaux. Dès que j'ai rencontré Clayton, on s'est sauté dans les bras. J'avais l'impression d'avoir quatre ans. Lui et Quincy sont deux personnes d'un certain âge mais qui ont su rester curieuses comme des enfants.

Crédits photo : DR.
Ce projet d'album de reprises aurait-il vu le jour sans Quincy Jones ?
Ça faisait longtemps que j'avais envie de faire du jazz. Avec mes musiciens, on a vraiment abordé ce projet comme un album de compos. Pendant une semaine, on s'est tous retrouvé à la Frette-sur-Seine. On a joué, mangé et dormi ensemble. On n'avait pas d'horaires. On a pris toutes les chansons qu'on avait retenues et on s'est amusé à les emmener dans différentes directions. Pour te dire, "Sous le ciel de Paris" a même pris des accents slaves ! (sourire) Il y a des idées qui ont germé et donné des choses vraiment bien. Et puis, il y a eu des essais infructueux aussi. Avec mes ziquos, on a fait un vrai travail d'arrangements.

On connaissait le jazz de Zaz en live, pendant tes concerts. Mais là, avec "Paris", c'est une nouvelle étape.
J'ai toujours fait du jazz. Mais j'ai l'impression que c'est nouveau pour les gens. Il y en a qui me disent que c'est une belle évolution. Ceux qui n'écoutent que mes albums ou la radio ne connaissent que la partie plus variété de ce que je fais. Mais ceux qui m'ont vue sur scène savent que je peux chanter sur de la salsa. Aujourd'hui, il y a même un pop up qui s'ouvre sur scène pour planter le décor d'un club de jazz. Par-dessus tout, j'aime la mixité. C'est pour ça que je trouvais l'idée de "Paris" bien. Parce que c'est une ville où l'on retrouve cette mixité culturelle. D'ailleurs, "Paris" n'est pas un album de jazz pur ! (sourire) Il y aussi du gospel, du swing-manouche...

Je ne vais quand même pas me justifier sur le fait de me laver ou pas
Enregistrer des duos avec Charles Aznavour et Thomas Dutronc, c'était aussi allonger la liste des grands noms avec lesquels tu as collaborés. Il y avait eu Jean-Jacques Goldman et Grand Corps Malade sur "Recto verso". Pourquoi eux plutôt que d'autres ?
Charles Aznavour, c'est quand même une icône de la chanson française. C'est l'un des derniers de cette génération-là. Je l'ai rencontré, c'était un livre ouvert. Il est très enthousiaste. A 90 ans, il est encore curieux de tout. C'est fascinant !

Crédits photo : DR.
On a d'un côté ces artistes respectés qui acceptent de travailler avec toi, des albums qui s'arrachent, et de l'autre des critiques de plus en plus vives à ton égard. Comment l'expliques-tu ?
Je me dis que c'est inévitable. A partir du moment où t'es aimé, tu es détesté aussi. J'arrive mieux à passer au-dessus maintenant. Il y a des personnes qui ne me supportent pas. Je ne comprends pas ça. Parce que j'ai joué dans la rue ? Avec tout le respect que j'ai pour les punks à chien, je n'ai jamais habité dans la rue. Je ne sais pas ce qui peut faire croire ça.

Tant pis si les gens n'aiment pas cet album
Tu es même moquée ! Dave s'est quand même demandée publiquement si tu te lavais sous les bras. Pourquoi ?
Dave, il dit beaucoup de conneries (sourire). Comme tous les gens qui parlent beaucoup, à un moment, il dit des conneries. C'est tellement ridicule ! Je ne vais quand même pas me justifier sur le fait de me laver ou pas. C'est même grotesque ! Tout le monde me fait passer pour la petite causette qui a commencé dans la rue. Mais ça ne s'est pas passé comme ça. J'ai commencé bien avant. J'ai chanté dans plein de groupes. J'ai fait du piano-bar aussi. Et lorsque j'ai décidé de quitter cette vie-là parce que j'étais malheureuse, même si je gagnais de l'argent, je me suis mise à jouer dans les rues. C'est une expérience dont j'ai eu besoin. Je suis très contente de gagner de l'argent aujourd'hui, de pouvoir faire plein de choses avec et de voyager.

Le Paris que tu chantes aujourd'hui dans ce nouvel album, colle-t-il vraiment à la réalité ou n'est-il finalement plus qu'un simple fantasme ?
J'ai remarqué que toutes ces chansons sont encore très actuelles. Moi, j'ai besoin de me nourrir de la joie. Quand je chante, ça me connecte à ma joie. En France, j'ai l'impression qu'on se focalise un peu trop sur les choses négatives, alors qu'à côté de ça il y a beaucoup de personnes qui réinventent la société et proposent d'autres choses. Et ces gens-là ne sont pas mis en lumière. Je trouve ça déplorable ! A Paris, sous l'occupation, il y avait une forme de légèreté. On chantait la liberté alors qu'on ne l'était pas totalement. Pour moi, c'est ça Paris. C'est là où tout est possible, là où on innove.

C'est là aussi où tu es devenue célèbre.
Cet album, c'est aussi pour rendre hommage à cette ville qui m'a permis d'avoir accès à tout ce que je fais aujourd'hui. A Paris, il y a beaucoup de poésie et de connexions. On peut enfoncer plein de portes. Quand je suis arrivée, j'ai tout de suite compris qu'il y avait plein d'expériences à vivre.

Découvrez le clip du nouveau single "Champs Élysées" de Zaz :



Quel est ton premier souvenir à Paris ?
C'est quand je suis venue voir ma meilleure amie qui était danseuse. Mais on s'est croisée seulement. Parce que, quand je suis arrivée, elle est partie à Bruxelles. (sourire) Il y avait un truc hyper-excitant. Je me suis sentie happée par une énergie. J'avais envie d'être là à ce moment-là. J'avais l'impression qu'il y avait tout à découvrir !
Ça me dérange d'être observée


Quel est l'endroit où tu te sens le mieux dans la capitale ?
Je déplore le fait qu'il n'y ait pas assez d'espaces verts. C'est là où je me sens le mieux. Là où il y a des espaces verts.

Est-ce que tu continues à déambuler dans les rues de Paris malgré la notoriété ?
Oui, mais je t'avoue que je ne le fais pas trop. Lorsque ça m'arrive de sortir dans Paris, je sens que je suis observée. C'est inhérent à la notoriété mais ça me dérange. En plus, je suis très en empathie avec tout ce qui se passe. Donc, dès qu'il y a des mouvements autour de moi, je le capte direct. Les gens qui commencent à faire du cinéma ou qui prennent des photos sans me demander... Je préfère qu'on vienne me parler en me demandant : "Est-ce que je peux prendre une photo ?". Plutôt que de me prendre en se cachant ! J'ai l'impression que c'est un manque de respect. Je peux comprendre. Je suis une image pour eux, plus un être humain. Il y a aussi ceux qui chuchotent dans l'oreille de leur voisin : "T'as vu, c'est Zaz". En plus, mon nom, on l'entend très bien. C'est très bizarre comme sensation.

Crédits photo : Yann Orhan
Est-ce que Paris te manque lorsque tu pars à l'étranger ?
Quand je reviens de l'étranger, que je suis à Paris dans un taxi, je me rends compte combien c'est beau. Tu sais comme moi qu'on s'habitue aux choses. C'est important d'avoir un regard nouveau. C'est pour ça que j'aime partir en voyage. Parce que, quand tu rentres, ta sécurité ou les choses dans lesquelles tu t'enfermes se cassent la gueule. Tu te rends compte que l'essentiel tu le retrouves dans des petites choses finalement. Quand je pars à l'étranger pour des concerts ou pour des vacances, c'est totalement différent. Je ne suis pas dans la même attitude. Mais chaque fois, j'ai un regard nouveau sur Paris et sur la France.

Tu ne crains pas d'être taxée d'opportunisme en publiant un album de reprises, comme beaucoup le font actuellement ?
Je sais que je serai jugée. Nous, on a travaillé les arrangements. Ils n'ont pas fait un concept sur lequel je n'aurais eu qu'à poser ma voix. J'ai travaillé dessus du début à la fin. Je me suis impliquée. J'espère qu'il y aura des gens qui vont voir le travail qu'on a fait. Je suis très fière de cet album. On a pris beaucoup de plaisir. Et tant pis si les gens n'aiment pas cet album ! L'expérience que j'ai vécue avec ce projet a été très enrichissante. Je suis contente. (sourire)

On ne me verra pas coach dans "The Voice"
Avant de te quitter, je voulais évoquer la chanson "Éblouie par la nuit", dont on a beaucoup parlé il y a quelques semaines avec la victoire de Carla dans "The Voice Kids". As-tu entendu sa reprise ? Qu'en as-tu pensé ?
Bien sûr ! Elle a une voix incroyable. Elle est juste et sincère.

Ça ne te donne pas envie de devenir coach ?
J'ai beaucoup de mal avec ce genre d'émissions. Et encore plus quand c'est fait avec des enfants. Qu'est-ce qui se passe derrière ? Qu'est ce qu'on fait de cette petite fille ? Elle n'a pas encore le recul. J'espère qu'elle est bien encadrée. Déjà pour un adulte, ça peut être très déstabilisant et destructeur. J'ai du mal quand on utilise des enfants. Alors, non, on ne me verra pas coach !
Pour en savoir plus, visitez le site internet officiel de Zaz et sa page Facebook.
Ecoutez et/ou téléchargez la discographie de Zaz sur Pure Charts.

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