samedi 04 mars 2017 14:00
Peter Peter en interview : "Je suis un félin à l'intérieur"
Venu des terres canadiennes mais adopté par Paris, Peter Peter revient accompagner nos nuits mélancoliques avec "Noir Éden", disque de pop et de coton. Sa mutation électronique, ses influences et le félin qui sommeille en lui : rencontre détendue dans un café de la capitale.
Crédits photo : Pochette de l'album "Noir Éden"
Propos recueillis par Yohann Ruelle. Ton premier album est paru il y a déjà quatre ans au Canada. Qu'as-tu fait pendant tout ce temps ? Pendant les deux premières années, j'ai fait la promo de "Une version améliorée de la tristesse" au Canada, puis je l'ai assurée en décalé en France. J'avais pas beaucoup de chansons d'avance à vrai dire : j'ai déménagé souvent, j'ai eu moins le réflexe d'écrire... et un matin je me suis réveillé et j'ai fait ce nouvel album. Je me suis aménagé un petit studio chez moi, dans mon appart et j'ai commencé à écrire les chansons tout en produisant moi-même l'album. Puis je suis allé à Montréal faire les trucs en studio, puis je suis retourné en France pour peaufiner les morceaux, ensuite je suis revenu en studio à Paris pour finalement le terminer à Montréal. C'est un disque qui a beaucoup voyagé en fin de compte ! Ecrire est un mode de vie C'est facile de reprendre la plume après une pause ?Pas du tout ! En fait, je ne devrais jamais m'arrêter car c'est un réflexe, ça peut se perdre. Ecrire, c'est un mode de vie, c'est une hygiène. Donc ça n'a pas été simple mais maintenant que c'est revenu, j'ai tout intérêt à ne pas le laisser repartir. (Sourire) Est-ce que tu avais une idée très concrète de ce à quoi allait ressembler "Noir Éden" ? Je ne savais pas vraiment pas où je voulais aller... Mais je ne voulais pas le savoir non plus ! L'idée c'était de me laisser porter par les choses, naturellement. Je ne suis pas quelqu'un de très calculateur. En revanche, je me doutais qu'il y aurait des synthés. En définitive, j'avais simplement envie que ça me ressemble tout en m'accordant une grande liberté. Bon parfois, la transition entre la maison et le studio était compliquée. (Rires) Tout ne se matérialise pas comme tu l'espères ! En écoutant, j'ai eu le sentiment que tu avais accordé une place encore plus importante aux sonorités électroniques. C'est particulièrement vrai sur "Bien réel" ou l'intro de "Fantôme de la nuit". Est-ce qu'il y a des artistes qui t'ont inspiré ? C'est vrai que j'ai beaucoup écoulé l'album de Caribou, "Our Love". Peut-être qu'indirectement, ça m'a stimulé ! Il faut dire que je n'ai pas arrêté d'acheter du matos. J'ai une curiosité et une fascination envers l'électronique, ça m'est apparu sur le tard car à 21 ans, j'étais sur ma guitare. C'est avec elle que j'ai appris à écrire. Mais ce n'était pas un impératif. Je ne me suis pas dit que je devais faire une version plus électronique de "Une version améliorée de la tristesse" ! Comment tu construis tes morceaux ? Je suis un peu old school. L'ordinateur, il me sert juste de magnétophone ! Je ne passe par aucun logiciel, sauf celui pour enregistrer le son. Je n'utilise quasiment pas d'instrument virtuel, j'ai des claviers branchés partout chez moi, j'ai ma chaîne et tout est en MIDI (ndlr : un langage qui permet de récolter et synchroniser les données de plusieurs instruments). Je joue des instruments et après, je change les sons, je module et j'envoie ça dans le magnéto. Tu fais ça es autodidacte ? Oui ! Pour cet album, j'ai vraiment appris le métier de producteur. Je ne connaissais rien ! La courbe d'apprentissage est un peu lente à s'élever mais maintenant, je suis un peu meilleur. Et puis ça va plus vite. Au début, faire une maquette c'était long. Très long... J'ai un lien très fort avec Elliott Smith Ton héritage musical, il te vient d'où ?Je ne viens pas d'une famille spécialement branchée musique. Au départ moi ce qui me passionnait, c'était la poésie ! Et puis j'ai des potes qui faisaient de la musique, c'est comme ça que je m'y suis mis. Mais je m'inspire aussi de la littérature, du cinéma... Se nourrir d'autres oeuvres, c'est important parce que ça apporte des couleurs à ton identité. "Nosferatu", c'est donc un hommage à Dracula ? Pas du tout. (Rires) Bizarrement, pendant la conception de "Noir Eden", je n'ai pas vu beaucoup de films. J'ai lu beaucoup de livres par contre, dont des livres de science-fiction et je pense qu'on retrouve du Philip K. Dick dans l'album, avec la notion de rêve et de réalité comme dans "Ubik"... ou Charles Burns et sa BD "X'ed out". Quel est l'album culte qui ne te quitte jamais ? C'est difficile de n'en choisir qu'un ! Il y a "Either/Or" d'Eliott Smith. Je ne sais pas comment me l'expliquer mais j'ai un lien hyper fort avec ce disque. Tu l'acceptes facilement l'image de chanteur pop mélancolique que tu renvoies ? Je ne suis pas que ça mais je suis ça, donc ça me va ! C'est une partie de mon identité que je ne peux pas réfuter, c'est en moi. Je ne sais pas trop d'où ça vient d'ailleurs... En revanche, qu'on ne vienne pas me dire que je fais toujours pareil. On pourra penser ce qu'on veut sur l'art que je choisis de proposer mais je ne pense pas me répéter. Tokyo ? C'était trop cher ! Pourquoi cette pochette avec un chat ? Très beau poil d'ailleurs !N'est-ce pas ? (Rires) Mais ce n'est pas le mien. Je suis resté un moment avec une copine qui avait cette chatte, Vénus, et elle traînait toujours dans mes pattes pendant que je composais l'album. C'était comme un anti-stress ! Elle m'a aidé à relativiser beaucoup de choses. Elle avait toujours l'air d'être souveraine, émancipée de ce monde de douleur... Je l'ai encore en fond d'écran de mon portable, d'ailleurs ! (Il sort son téléphone) Tu vois ? Bon c'est la photo, ce n'est pas elle. Mais ça représente mon félin à l'intérieur ! Ça s'est fait par hasard en fait. Je faisais un shooting pour des photos presse et puis Paul, le photographe, me dit : "Ah j'ai amené un chat, tu es très chat, amenons le chat". Mais moi je ne voulais pas ! J'avais un peu peur d'être tourné en ridicule sur internet, un chat... Bon. Et puis au final j'ai accepté de faire les photos et j'ai trouvé celle-ci très belle, donc je l'ai gardée. Le clip de "Noir éden", le premier extrait du disque, a été tourné à Berlin. Que représente cette ville pour toi ? L'inconnu ! Je n'y étais jamais allé avant. Ça m'intriguait. Au départ, l'idée c'était de tourner un plan-séquence dans une ville que je ne connaissais pas. J'avais pensé à Tokyo mais c'était plus cher d'aller là-bas. (Rires) Au final, on a fini à Berlin car on avait des amis sur place. Je n'ai pas trop prémédité. Je sortais du studio, j'avais besoin de prendre l'air. Le choix de chanter en français, ça te tenait à coeur ? Disons que ce n'est pas facile de faire semblant d'être un anglophone ! C'est plus difficile, en fait, que de faire de la pop en français, un exercice assez périlleux de base. Dans les premiers groupes dont j'ai fait partie, je chantais en anglais et j'en ai eu marre. Ça me complexait d'avoir un mauvais accent ! Donc je suis repassé dans ma langue natale. Au début c'était pas terrible mais ça m'a libéré de cette angoisse de mal faire. Les duos, ça m'énerve Pourquoi il n'y a jamais de duo sur tes disques ?Il y en a eu ! Enfin presque... Sur mon premier album, j'ai invité Coeur de pirate à faire les choeurs sur le titre "Tergiverse" mais ce n'est pas un vrai featuring. Autrement, c'est un nouveau standard qui m'énerve un peu. Je trouve ça intéressant mais on dirait que c'est devenu systématique d'écrire "feat", surtout dans la pop américaine. Ça doit être mon esprit rebelle ! L'écriture, c'est une démarche assez intimide et ce n'est pas évident d'introduire quelqu'un dans ce processus. Mais l'un n'est pas obligé de rentrer dans l'univers de l'autre et vice-versa. Vous pouvez aussi créer quelque chose de nouveau ensemble... Bien sûr. Pendant un moment, je voulais demander à Baxter Dury qu'on travaille ensemble. Je n'ai pas osé mais un duo avec lui, par exemple, je pense que ça l'aurait fait !
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