dimanche 25 septembre 2022 12:57
November Ultra en interview : "Ma plus grande pression ? Ne pas décevoir le public"
Par
Théau BERTHELOT
| Journaliste
Passionné par la musique autant que le cinéma, la littérature et le journalisme, il est incollable sur la scène rock indépendante et se prend de passion pour les dessous de l'industrie musicale et de l'organisation des concerts et festivals, où vous ne manquerez pas de le croiser.
November Ultra est sans aucun doute la révélation francophone de ces derniers mois. Dans les coulisses de Rock en Seine, Purecharts a rencontré l'artiste folk qui nous a parlé de son premier album "Bedroom Walls", qui vient de remporter le premier Prix Joséphine, et son rapport à la notoriété. Interview !
Crédits photo : Pauline Darley
Propos recueillis par Théau Berthelot. Comment s'est passée cette tournée d'été ? C'est assez incroyable et à la fois assez curieux. C'est très nouveau pour moi de passer des concerts en salles à des concerts à l'air libre avec des gens qui ne me connaissent pas forcément. Aussi, le fait de jouer dans des festivals incroyablement importants pour moi parce que j'y allais quand j'étais plus jeune, comme Solidays, ou de vivre des rêves comme le Montreux Jazz Festival, Rock en Seine... Ça a été assez fou, comme de se rendre compte qu'on est capable de créer des bulles, de recréer une chambre, un intime à l'air libre avec beaucoup de gens au milieu d'une place. Je trouve ça assez magique le pouvoir de la musique. Justement, pour toi c'est facile d'adapter tes chansons intimistes dans un aussi grand espace qu'un festival ? Franchement, je ne dirais pas que c'est facile car je l'ai senti, pour ma confiance en moi. Des fois, je me disais que ça pouvait manquer de batterie, ou de quelque chose d'un peu plus spectaculaire. On est dans un festival, et parfois tu sens que les gens en ont sous les pieds, ils ont envie de danser ou de sauter. Et finalement tu arrives et tu te dis que dans ce que tu proposes, il y a une radicalité parce que c'est de la folk et des berceuses. Quelque part, je ne peux pas être les Rolling Stones ou Arctic Monkeys ! (Rires) Ce n'est pas la musique que je fais. C'est drôle parce que je pense que ça ne tient qu'à moi et à la perspective que j'ai. Le fait de dire : "C'est comme ça, c'est ce que je fais, et voilà ce que je vous propose". Tout le monde est libre. J'ai vu des gens pleurer et être là. Donc cet intime se crée alors que j'étais terrifiée d'y arriver au début. Il y a une radicalité dans ce que je propose Ce côté intime est justement au coeur de ta musique. C'est évident de partager au plus grand nombre des textes qui sont aussi personnels ?Je crois que je ne m'en suis pas rendue compte. (Sourire) Quand on écrit des morceaux, moi en tout cas je n'ai pas pensé à qui allait les écouter ou que tout simplement les gens allaient les écouter. C'est presque le processus d'après. Tu fais l'enfant, you're pregnant et puis tu te rends compte que cet enfant va voir le monde et qu'il va devenir ce qu'il deviendra. Au début, je ne me suis jamais posée ces questions car il y a des trucs que je ne me serais pas autorisée à sortir. Et je me rends compte que c'est salvateur, c'est presque comme aller voir une psy. Tu te dis : "Ok, j'ai compris ce que je ressentais à ce moment-là, c'est bon je peux passer à autre chose". Et ça fonctionne car quand on écoute ton premier album "Bedroom Walls", on a vraiment l'impression d'être dans ta chambre ! C'est l'impulsion que tu cherchais avec ce premier album ? C'est marrant car ce n'est pas l'impulsion que j'ai cherchée. Je pense que l'album est devenu ce qu'il est devenu. De base, il ne devait pas s'appeler comme ça. J'ai écouté l'album et j'ai surtout composé "Bedroom Walls" qui était le dernier morceau, et c'était presque le point à la fin d'une phrase. C'est là que je me suis dit : "C'est ça l'album !". C'est ça que j'ai créé pendant trois et ans et demi. C'est plus un moment où j'ai pris de la hauteur, mais pas pendant le processus, plutôt après. Je n'ai pas pensé à qui allait écouter mes morceaux Il devait s'appeler comment ?Au départ, l'album ne devait pas s'appeler comme ça mais "Will This Be Real If No One Will Listen To It ?", un titre un peu à la The 1975. (Sourire) C'était vraiment ma question, de me demander si l'art, la création devient réelle quand il y a une deuxième personne autour de toi qui l'entend et qui la voit, qui la valide comme existante. Je me disais que ces chansons, tant qu'elles sont dans mon ordinateur, ces souvenirs, ces émotions, existent que pour moi. Est-ce que ce sera réel si personne ne l'entend un jour ? Le player Dailymotion est en train de se charger... Donc j'imagine que tu as été ravie de l'accueil que l'album a reçu, que ça ait pu toucher des gens... Je trouve ça toujours surprenant. Dès qu'il y a quelqu'un d'autre que ma mère qui vient à mes concerts, en fait. (Rires) Je trouve ça fou, mais je le vois autant avec moi qu'avec les artistes que j'aime. Je me dis à quel point ce sont des chansons personnelles pour eux ou elles, et à quel point ça me semble personnel à moi quand j'écoute des artistes que j'adore. Je me dis que c'est fou à quel point cet album est personnel pour moi et peut parler à d'autres personnes. C'est magnifique ce que ça renvoie ! C'est salvateur, presque comme aller voir une psy Au départ, tu faisais partie du trio Agua Roja. Qu'est-ce qui t'a poussée à te lancer en solo ?Je pense que le déclic est arrivé en 2018. A un moment, on s'est rendus compte qu'on était à la croisée des chemins. Clément était très heureux en studio, il est réal et il a mixé mon album, Benjamin était très heureux sur scène, puisqu'il est désormais guitariste pour Clara Luciani. C'est un peu notre guitar hero français ! Et moi j'avais très envie de tout faire, de mettre les mains dans l'ordinateur, de composer. C'était finalement assez logique et on a splitté en bons termes parce qu'à un moment, on s'est juste rendus compte qu'on était à ces endroits-là. Tu as construit ta popularité sur les réseaux sociaux, notamment sur Instagram à travers tes reprises. Aujourd'hui, quel est ton rapport à tout cela ? Ça n'a pas changé pour moi. Avant, j'étais blogueuse musicale pendant sept ans, ce qui était un ancien réseau social finalement. J'aborde les réseaux sociaux de la même manière que j'ai abordé les blogs : tant que ça me rend heureuse, que ça m'amuse ou que j'ai quelque chose à dire, je le fais. Puis les jours où ça me prend la tête, que ça me crée du stress, de l'angoisse ou de la tristesse, ces jours-là il vaut mieux que je supprime quelques jours les réseaux. J'ai un rapport qui essaie d'être le plus sain possible parce qu'en même temps, je m'amuse énormément. Je suis sur une création d'album qui a duré trois ans et demi, et en même temps j'aime tellement chanter et partager avec les gens que cette double vitesse m'a permis non seulement de partager des chansons d'autres personnes, mais aussi mes propres chansons. Parce que c'est ce qui s'est passé sur Instagram ou TikTok. Les acoustiques de mes chansons "Miel" ou "Come Into My Arms" ont été des chansons grâce auxquelles les gens m'ont découverte. Il y a aussi cette idée de pouvoir être plus spontanée que ce que la création d'un album qui dure trois ans et demi peut te permettre. J'ai un rapport aux réseaux sociaux qui essaie d'être le plus sain possible On te décrit souvent comme la nouvelle Pomme. Qu'est-ce que ça te fait ? Wow ! C'est incroyable. Je pense qu'après, Pomme c'est Pomme et she is the queen. Son album "Consolation" est incroyable. Si je peux faire et avoir un quart de la carrière qu'elle a, je serais heureuse. Et aujourd'hui, cette étiquette d'artiste révélation, c'est une pression pour toi ? C'est une pression qui est positive, car tu te dis que les gens ont envie de t'entendre. C'est une pression de ne pas vouloir décevoir le public, c'est la seule que je me mets. Les gens qui viennent à mes concerts, j'aimerais qu'ils en ressortent heureux, qu'ils passent un bon moment. C'est la seule pression que je me mets. Après, je ne suis pas en train de passer mon bac. Faire un concert, ce n'est pas passer devant un jury. Je fais mon concert, je fais ma vie, et j'ai beaucoup de chance que les gens parlent de moi et disent aux gens de venir me voir. J'essaie que ça ne me mine pas, parce qu'après ça enlève tout le kiff de faire de la musique. J'aimerais beaucoup avoir une Victoire ou un Grammy C'est quoi la prochaine étape pour toi ? Les Victoires de la Musique ?Oh là là ! Moi j'en sais rien, mais si tu as des infos tu me dis ! (Rires) En un sens, j'aimerais beaucoup, juste parce que tu te dis que ça peut valider quelque part ton travail. Et en même, ce qui valide ton travail, ce sont les gens qui écoutent l'album, qui m'en parlent, qui viennent à mes concerts... Donc moi, la suite c'est de continuer à faire beaucoup de concerts, commencer à penser au deuxième album... C'est juste essayer de faire ça jusqu'à la fin de ma vie. Mais dans mes rêves, j'aimerais beaucoup avoir un jour une Victoire ou un Grammy. Ça reste de gros big dreams ! Justement, en parlant de ton deuxième album, tu en es où ? On est aux prémices là. Il y a plein de chansons déjà... Quand je finissais l'album 1, je sentais que j'étais déjà en train de composer d'autres morceaux. Il y en a que j'ai déjà chanté en live parce que c'est quand même trois ans et demi de ma vie et qu'à un moment j'ai entériné tout ça. Mais ça m'allège un peu parce que j'étais terrifiée de me demander ce que j'allais raconter sur la suite. Et en fait, les chansons s'écrivent un peu d'elles-mêmes. Après, je pense que ça va être plus comment le mettre en forme. Mais je me laisse le temps : j'ai mis trois ans et demi à faire mon album, j'ai 33 ans, ça fait 10 ans que je fais ce métier... Il n'y a que mon tempo qui sera le bon. Podcast
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