Crédits photo : Simon Procter

1. Moins de tubes et trop d'attente

C'est en 2009 qu'Elly Jackson aka La Roux s'est fait connaître avec son premier album éponyme, un recueil de tubes électro-pop efficaces comme le premier extrait "Quicksand", "I'm Not Your Toy", "In For The Kill" ou encore "Bulletproof" -écoulé à 2 millions d'exemplaires aux Etats-Unis- qui fait encore danser les fêtards un peu partout dans le monde. Un succès retentissant récompensé par un Gammy Award du meilleur album dance. Lorsqu'elle revient 5 ans plus tard, une éternité pour l'industrie musicale de la pop, tout a changé. Doutes, problèmes de voix, et conflits avec le partenaire et co-producteur de ses débuts. Exit Ben Langmaid, son compagnon de route avec qui elle formait le duo La Roux. Les tubes ont été troqués contre de bonnes chansons pop aux sonorités très 80's mais pas vraiment originales et loin d'être aussi mémorables que les hits imparables des premiers jours malgré le lead single "Uptight Downtown". Résultat ? Les radios la délaissent et l'album entre en sixième position au Royaume-Uni pour disparaître des classements deux semaines plus tard. La poignée d'exemplaires vendue en France ne permettra pas à La Roux de retrouver le sourire...

Regardez le clip de "Bullettproof" de La Roux (2009)

2. Victime de la mode, tel est son nom de code

Pas facile d'affronter la hype pour La Roux... Et ses collègues Little Boots, Lady Hawke ou Ting Tings ne diront pas le contraire. Il y a 5 ans, la presse spécialisée s'emparait de ses nouvelles venues dont les chansons n'ont pas mis beaucoup de temps à envahir les playlists des amateurs d'electro-pop. Hormis Lykke Li, il n'y a pas beaucoup de survivant(e)s de cette nouvelle scène dont La Roux fait partie. Plutôt que d'évoquer une malédiction, ne faudrait-il pas aller chercher du côté de l'obsolescence programmée des artistes émergents dans une bulle blogo-hype ? Dans l'univers impitoyable de la "musique tendance", un artiste n'est pas éternellement une "next best thing" et l'infidélité des fans en intérim est cruelle. Charlie XCX, Icona Pop, Jessie Ware, Chvrches et Ellie Goulding ont explosé entre temps et comme le dit Kylie Minogue : "Dans la pop, il n'y a pas de place pour tout le monde".

3. Il y a trop de gens qui t'aiment

Elly Jackson a toujours eu un problème avec la notoriété de sa musique. A l'époque de son premier album, elle ne cachait pas sa détresse et son dégoût quand elle évoquait ses chansons reprises dans les télé-crochets à succès du Royaume-Uni et toute l'exercice promotionnel qu'on lui a infligé : « Quand on m’a annoncé que j’allais partir en tournée aux USA, je me suis enfermée dans mon ancienne chambre chez mes parents et j’ai pleuré pendant deux semaines. Je ne le voyais pas comme du succès, mais comme un phénomène qui m’a ôté ma vie. Ça m’a terrifié » a t-elle déclaré à Brain Magazine. La rousse a donc très mal vécu le succès de son premier album. Et la suite encore plus. Car après un tel plébiscite, la pression qui pèse sur ses épaules est palpable. Faut-il assumer de faire des tubes ? Personne n'a la réponse et la sortie d'un deuxième album est toujours un exercice périlleux... Par exemple, MGMT fait des albums moins accessibles, qui se vendent donc beaucoup moins mais toujours de très bonne facture et salués par la critique.

Ecoutez "Uptight Downtown" de La Roux (2014)

4. Qui es-tu La Roux ?

Pas facile de s'attacher et de comprendre cette popstar peu souriante et globalement avare d'informations en interview. Comme beaucoup d'artistes introvertis, c'est en live qu'elle se révèle. Si elle intériorise beaucoup sur scène, la Londonienne a embrasé le Bataclan à Paris ce week-end. Son "Trouble in Paradise" prend alors une autre dimension et beaucoup de titres s'avèrent plus forts que dans leur version studio. Samedi soir, la Britannique a d'ailleurs remercié le publie d'être toujours présent et semblait véritablement émue de la ferveur et de l'accueil que le public parisien lui avait réservé. A l'inverse, les ventes de "Sheezus", le dernier album de sa compatriote Lily Allen, n'ont pas explosé après ses coups de gueule et clashs avec la terre entière. Il ne s'agit donc pas de donner son avis à tort et à travers mais Elly Jackson est une artiste qui gagnerait à laisser entrer plus de monde dans son univers sans dénaturer son personnage singulier qui fait du bien à un paysage pop souvent trop aseptisé.

5. Un disque de transition

Après avoir montré du doigt son label Polydor, qu'elle accuse de ne pas avoir fait le maximum pour soutenir l'album notamment en matière de dispositif promotionnel, La Roux a finalement admis que cette ère "Tropical Paradise" était une expérience intéressante. « Ça semble curieux mais ce qui a été positif dans tout ça, c'est que j'ai réalisé ce que je voulais vraiment faire. [...] Bien sûr j'aurais aimé que plus de personnes écoutent "Trouble..." mais ça n'a pas d'importance. Ce qui compte c'est que les gens qui l'ont écouté me comprennent différemment. Une partie de moi a toujours su que ce serait un disque de transition. C'est seulement un petit morceau de quelque chose de plus important qu'il faut que je continue à construire, et c'est la partie la plus excitante » a-t-elle analysé dans les colonnes du magazine musical britannique NME. Le meilleur est à venir ?

Regardez le clip de "Let Me Down Gently" de La Roux (2014)