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samedi 07 mai 2022 11:24

Alvan & Ahez (Eurovision) : "On chante en breton mais on représente la France entière"

Par Julien GONCALVES | Rédacteur en chef
Enfant des années 80 et ex-collectionneur de CD 2 titres, il se passionne très tôt pour la musique, notamment la pop anglaise et la chanson française dont il est devenu un expert.
Dans une semaine, c'est le groupe Alvan & Ahez qui représentera la France à l'Eurovision 2022 avec sa chanson en breton "Fulenn". Leur rencontre, les paroles du titre, leurs chances de gagner, la pression, les critiques... Les quatre artistes se confient en interview à Pure Charts !
Crédits photo : DR
Propos recueillis par Julien Gonçalves.

Comment vous êtes-vous rencontrés tous les quatre ?
Sterenn : Toutes les trois on se connaît depuis de nombreuses années, depuis le collège avec Marine et depuis le lycée avec Sterenn. Dans le cadre de ces écoles-là, on a commencé à chanter le kan ha diskan, le chant traditionnel breton. On a continué à chanter ensemble, à faire des scènes, des festivals... Ensuite, l'été dernier, Marine et Alvan se sont rencontrés dans un bar à Rennes, évidemment !

Alvan : Je compose des trucs qui mélangent un peu tout, l'électro, les musiques du monde et le rock. Je voulais faire un titre qui mélange l'électro avec des voix ethniques mais de chez nous. J'ai testé plein de trucs, avec la voix de mon arrière grand-mère qui chantait en breton, celle de ma mère aussi, mais ça ne collait pas, donc j'ai laissé le projet de côté. Trois semaines après, je rencontre Marine dans un bar, le destin a fait qu'on a très vite parlé de musique, et tu m'as dit que tu chantais en breton avec des potes. Je me suis dit : "Oh la la, la vie est trop belle. Vas-y on fait un truc". Les filles sont venues à l'appart, elles ont écouté et trouvé ça génial, du coup Marine a écrit les paroles en deux jours. Le process a été méga rapide !

On nous a proposé l'Eurovision, on s'est dit "Let's go !"
Comment l'Eurovision est arrivée dans vos vies ?
Alvan : On a fini le track, on le trouvait cool, et d'ailleurs, petite info, sur la première version, il n'y avait pas ma voix. On se disait qu'avec les filles, ça suffisait, que la chanson était efficace. Après, j'ai écouté un peu l'entourage et j'ai ajouté ma voix pour avoir un peu plus de surprise, de contenu dans la chanson. On l'a envoyée à mon manager Seb et une semaine après, il tombe sur une pub qui dit : "Candidatez pour l'Eurovision". Il nous a proposé, et on s'est dit "Let's go !".

Ça ne vous faisait pas peur ?
Sterenn : On s'est dit que ça n'allait pas marcher du tout ! (Rires) Donc c'était vraiment un défi à relever. Une chanson en breton, c'était très important pour nous, mais on ne s'attendait pas à ce que ça prenne comme ça !

C'est un concours qui fait évoluer les mentalités
Vous étiez familiers avec l'Eurovision jusqu'ici ?
Marine : Pas tant que ça. Ce qui m'a marqué, ce sont surtout les prestations de Conchita Wurst et de Bilal Hassani, car ce sont des prestations qui, au-delà d'avoir marqué l'histoire de l'Eurovision, elles ont aussi fait bouger les choses notamment pour la communauté LGBTQIA+. Au-delà d'être un concours de chant, c'est aussi un moyen de faire évoluer les mentalités. C'est l'image que j'avais de l'Eurovision.

Alvan : Personnellement, l'Eurovision c'était vraiment l'émission que ma mamie regardait tous les ans pendant que j'étais à côté sur le canapé en train de jouer à "Pokémon" sur la Game Boy. C'est des souvenirs hyper importants. Je me souviens qu'en 2006, c'était Lordi, un groupe finlandais qui faisait du gros metal avec des masques, qui avait gagné. Ça me parlait de ouf !

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Chanter en breton, ça pouvait nous desservir
En proposant une chanson en breton, "Fulenn", vous n'aviez pas peur que cette originalité ne colle pas avec ce concours ?
Alvan : On s'est pas dit que c'était de l'originalité forcément. Nous, on a fait quelque chose avec le coeur donc peu importe si on était gardé ou pas. On a fait ce qu'on voulait faire, la chanson on la kiffe, elle ressemble à aucune autre selon nous. Justement, au début, on ne se disait pas que c'était original, on se disait que ça pouvait nous desservir.

Sterenn : On n'était pas parti dans l'optique de gagner non plus. Donc c'était déjà une victoire même avant le 5 mars !

Vous pensez que ce côté OVNI de "Fulenn" peut se démarquer ? C'est votre force finalement !
Sterenn : Ah oui ! Ce qui parle aux gens et ce qui caractérise cette chanson, c'est le gros chaudron dans lequel on a mélangé plein de choses, tout l'univers éclectique d'Alvan, nos voix sur du chant breton, les valeurs qu'on souhaite défendre avec le thème du texte. On a mis plein de choses qui nous ressemblent et qui nous tiennent à coeur. Le but pour nous c'est vraiment de faire une musique qui nous plaît, dans laquelle on se retrouve, en espérant qu'on arrive à communique ça aux gens. Après quand on fait de la musique, ça ne peut pas plaire à tout le monde mais ce n'est pas l'objectif non plus.

Les critiques ? Ça nous fait marrer
Vous vous attendiez aux critiques sur la langue bretonne ?
Alvan : Oui oui c'était sûr ! Quand on a su qu'on était gardé pour les auditions, on s'est dit : "Imaginez une seule seconde que ce soit des Bretons qui représentent la France !". Forcément, ça allait faire parler. On a imaginé tout de suite les gros titres : "Oh la la, scandale, des Bretons représentent la France en breton !". Nous, ça nous fait marrer en vrai.

Sterenn : Et ça fait partie du patrimoine ! C'est la langue qu'on a toujours chanté, c'est très naturel de l'écrire en breton, c'est une langue qui nous tient beaucoup à coeur. On la parle toutes les trois tout le temps, ce qui pose problème à Alvan d'ailleurs ! (Rires)

Alvan : Moi je comprends que dalle !

Sterenn : C'est pratique parfois ! (Rires) Non mais ça représente aussi toutes les autres langues régionales qu'on a en France. Ce n'était pas forcément quelque chose d'attendu sur la scène de l'Eurovision. Peut-être qu'à l'étranger, on considère la France comme si elle était réduite à Paris ou un truc très frenchy, chic. Mais on a la chance d'avoir un pays super riche, en termes de diversité culturelle, de musique, de langues de paysages... On porte notre langue qui est le breton mais on représente la France toute entière et la richesse des régions !




Marine, tu t'es inspirée d'une légende bretonne pour écrire les paroles de "Fulenn". Tu avais envie d'évoquer le féminisme ?
Marine : Ce n'est pas la première fois que je reprends une légende bretonne pour la remettre au goût du jour. C'est une légende qui m'a interloquée et un peu indignée, parce que l'héroïne est plutôt une anti-héroïne, une figure négative, elle est brimée parce qu'elle aime aller danser. Elle meurt de fatigue parce qu'elle a dansé toute la nuit après le diable. Je voulais faire de cette figure-là au contraire une figure émancipatrice pour les femmes. C'est quelqu'un qui ose, qui embrasse son désir, représenté dans la légende par le diable. Quand on dit "Elle danse avec le diable et alors ?", en réalité on dit : "Elle fait ce qu'elle veut, et alors ?". C'était important de raconter cette histoire là et de la remettre au goût du jour.

On va essayer de faire au moins aussi bien que Barbara Pravi
Est-ce que c'est dur de marcher dans les pas de Barbara Pravi ? Ça vous met la pression ?
Alvan : C'est l'attente qui nous tue. Elle a fini deuxième, c'est un beau score pour la France ! Donc les gens ont encore l'image de Barbara Pravi. Nous, derrière c'est une contre-proposition complètement différente. C'est à nous maintenant de montrer que la France c'est aussi ça. Elle a beaucoup de talent, elle chante vraiment très très bien, sa chanson déchire. En passant derrière Barbara, on va essayer de faire au moins aussi bien !

Beaucoup disent que les jeux sont déjà faits et que l'Ukraine est assurée de gagner l'Eurovision en raison de l'actualité. L'enjeu reste le même pour vous ?
Marine : Ce qui nous importe le plus, et même avant de participer aux castings de l'Eurovision... Pour nous, la scène c'est le partage avec le public, c'est ce qui nous fait vibrer. Et de défendre les valeurs dans la chanson, de chanter en breton. Le simple fait d'être à Turin c'est une immense fierté. Les enjeux compétitifs autour, c'est un peu secondaire pour nous, même si c'est un concours. Ce qui nous importe le plus c'est de partager notre histoire, notre musique, notre passion.

Sterenn : Et c'est aussi l'objectif de l'Eurovision, c'est un concours construit entre la paix entre les peuples, la diversité etc... La musique, c'est une langue universelle, ça parle à tout le monde, ça rassemble tout le monde. Donc oui c'est important dans des moments comme ceux qu'on traverse en ce moment, de se servir de la musique pour fédérer, pour être dans le collectif, et ça bien au-delà du concours et le fait de gagner ou non.

Perso, je m'en fiche des notes
Mais vous y allez quand même avec une envie de gagner ? Vous l'avez dans un coin quelque part ?
Alvan : On serait content mais on veut vraiment incarner la chanson au mieux, plus que tout. Et que ça pète. Personnellement, je m'en fiche des notes et de l'avis d'untel ou untel. Le plus important c'est que je regarde notre presta après et que je me dis : "Ok !".

Sterenn : Et que les gens soient fiers. On représente un pays ! On aura gagné quand on aura rendu fiers les gens qui nous suivent et ceux qui nous attendent au tournant aussi. Au-delà du score en tant que tel, c'est cette victoire-là qu'on veut aller chercher. C'est pour ça qu'on va se mettre énormément de pression et qu'on va être exigeant envers nous-mêmes.

Vous regardez un peu les bookmakers ?
Alvan : Mais on n'a même pas le temps ! Et après tu es matrixé, tu rentres dans un truc, ça te prend la tête...

Alvan, j'ai remarqué de nombreux commentaires élogieux des fans de l'Eurovision sur ton physique. Qu'est-ce que ça te fait ?
Alvan : (Rires) Je ne m'y attendais pas du tout, je trouve ça absolument ouf que ça devienne un sujet. Je n'ai jamais eu l'occasion d'avoir une image. Quand je faisais mon projet solo, je ne jouais pas du tout là-dessus, mon image n'était pas du tout travaillée, si j'avais envie de mettre un jean déchiré, je le mettais, je faisais mon truc. C'est très flatteur mais après c'est les goûts et les couleurs... On m'a sorti que je ressemblais à Chris Evans, ça j'étais flatté !

Ah il y a un petit air...
Sterenn : Il ne faut pas lui dire ça, il va prendre le melon ! (Rires)

Alvan, tu sors un album solo "Magma" le 13 mai, donc est-ce que le groupe Alvan & Ahez va durer ensuite ou chacun va reprendre son chemin ?
Sterenn : Pour l'instant, on se focalise vraiment à fond sur l'Eurovision, et après on verra si on continue à créer des trucs avec Alvan, même entre nous, on va essayer de faire quelque chose. Mais là on est à fond sur "Fulenn" et le 14 mai, et même les concerts et autres événements qu'il y aura à Turin.

Sterenn : On a suffisamment de travail en ce moment !

Vous travaillez sur un projet avec Ahez ?
Sterenn : Oui mais EP ou album, on ne sait pas, c'est encore en travail, mais il y aura d'autres chansons !
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