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samedi 09 mars 2019 11:16

Canine en interview : "Je veux montrer que le féminin est multiple"

Par Julien GONCALVES | Rédacteur en chef
Enfant des années 80 et ex-collectionneur de CD 2 titres, il se passionne très tôt pour la musique, notamment la pop anglaise et la chanson française dont il est devenu un expert.
Canine a longtemps entretenu le mystère. Homme, femme, artiste solo, groupe, français, anglais ? Aujourd'hui, l'artiste sort de l'ombre et dévoile un premier album brillant "Dune". Pure Charts a rencontré Canine pour en savoir plus.
Crédits photo : Ojoz
Propos recueillis par Julien Gonçalves.

Comment as-tu commencé la musique ?
J'ai commencé très très tôt, j'avais trois ans. Ma mère n'a pas eu du tout d'enseignement artistique mais, à mon avis, en elle, c'est une artiste. J'ai eu la chance qu'elle m'inscrive dans des cours de découverte puis au Conservatoire. J'ai été initiée au piano d'abord.

Michael Jackson a été mon influence première
Tu écoutais quoi plus jeune ?
J'ai écouté beaucoup Michael Jackson. Ça a été mon influence première. Vers dix ans, j'ai découvert Björk, puis après je suis allée vers l'expérimental pour l'électronique, le jazz... Un spectre assez large.

Tu t'es dit rapidement que tu voulais en faire ton métier ?
Au début, je voulais juste être chanteuse mais en découvrant le jazz et l'électro, la composition m'a semblé quelque chose de génial à faire. Canine, même si on a beaucoup travaillé sur les productions après, c'est à la base un projet de home studio. C'est génial le home studio, ça permet de tout faire. Pour la musique électronique, j'ai lu des bibles, des tutos etc... Pour le jazz, j'ai fait une école pour le chant, en impro, en harmonie.

Ça t'a beaucoup formé ?
Pour la voix, ça aide énormément. Et surtout pour la technique vocale. Mais aussi pour la composition. Le jazz, il y a beaucoup de consonances, de dissonances, c'est vraiment un langage, quand on l'écrit, qui est cool.

Regardez le clip "Sweet Sway" de Canine :



Comment est né Canine ?
Je me suis dit ça il y a à peu près quatre ans, donc c'est long. (Sourire) C'est un projet solo malgré les apparences. Mais ce qui me plait justement dans la façon de l'avoir conçu, c'est d'avoir été seule dans tout ce qui est compo et ensuite sur scène, de pouvoir illustrer tout ce que j'imaginais, même dans les clips. D'avoir du monde avec moi. Quatre ans de solitude, ça fait qu'au bout d'un moment on n'en peut plus. On devient fou quand même ! (Rires)

Je n'ai aucun problème avec la solitude
Tu as tout fait toute seule ?
Les textes et les musiques, c'est moi. Pour les prods, j'ai bossé avec deux autres personnes, on a tout co-produit à trois. Un Hollandais, Reyn Ouwehand, a fait tout ce qui est cordes, tous les arrangements. Et ensuite, j'ai bossé en duo avec Benjamin Lebeau de The Shoes. Puis j'ai tout récupéré et j'ai tout refait. C'est pour ça que ça a pris du temps. J'ai produit ça en un peu plus d'un an.

Pourquoi avoir travaillé majoritairement seule ?
Je pense que c'est un truc de caractère. Là, ça va mieux... Mais j'ai beaucoup de mal à demander des choses aux gens, je suis super timide. C'était plus facile pour moi de me retrouver face à mon piano. Je n'ai aucun problème avec la solitude.

Et c'est aussi une façon de se prouver à soi-même qu'on peut le faire ?
Oui il y a de ça aussi, bien sûr. Et puis quand on est à plusieurs, si tout le monde est sur le même pied d'égalité, il y a forcément des discussions et donc des compromis. Là, il n'y en a pas. (Sourire)

Pourquoi le nom Canine ?
Je voulais que ce soit plus grand que la petite personne que je suis. Je voulais que ce soit comme un emblème qui puisse ensuite accueillir des musiciennes, et le public évidemment. Il y a le côté canin, les animaux mais aussi notre propre animalité. Le féminin, évidemment. Et aussi le combat. Une canine, c'est incisif. Je me suis dit que c'était parfait ! Ce mot s'est imposé quasiment au même moment que quand j'ai travaillé sur le premier morceau.

Regardez "Twin Shadow", le clip de Canine :



Avec Canine, il y a une volonté de brouiller les pistes. Au début, tu ne montrais pas ton visage donc on ne savait pas qui tu étais. C'était quoi le but : ne pas se mettre en avant ou laisser les gens s'approprier le concept ?
Un peu tout ça. L'idée c'était de revenir... Car j'en avais un peu marre de voir des projets de musique qui sont quasiment des projets de mode, avec un culte de la personnalité. Où la personne est plus importante que la musique. Là, je voulais mettre la musique au centre, ensuite mettre les valeurs que j'ai envie de défendre. Là, je sens que pour que ces valeurs puissent passer, il faut commencer à les incarner. C'est pour ça que je dévoile plus.

J'ai travaillé sur une voix sans âge, ni sexe
Tu ne donnais pas du tout d'interview d'ailleurs...
Au début, il y avait une méfiance. Et je voulais partir sur le mystère. On perd beaucoup ça aujourd'hui. Pourtant, dans l'art ou dans la vie, il y a quelque chose d'invisible dans le mystère qui suscite le désir. Je trouvais ça intéressant d'utiliser ce moyen-là pour communiquer sur mon projet.

Tu chantes aussi bien en français qu'en anglais sur l'album.
Ce n'est pas la même façon d'envisager le chant. Je suis une passionnée du chant donc je voulais faire les deux. L'anglais, c'est une langue ouverte, on peut ouvrir les vannes. Le français, il y a une poésie, parce que dans sa musicalité, il faut être en retenue. Je ne voulais pas trop choisir. C'est vraiment la musicalité qui m'a intéressée, la technique de chant.

On est plus exigeant avec soi-même quand on écrit en français ?
C'est vrai que c'est une autre façon d'écrire. J'ai la sensation que pour compenser ce truc dans le chant qui doit être un peu retenu, il faut que dans les mots ce soit un peu plus travaillé. En anglais, dans le jazz, il y a beaucoup de "I love you", de "I miss you". Alors qu'en français, ça ne sonnerait pas bien. C'est vraiment la musicalité qui doit choisir les mots.

Je voulais qu'il y ait de la violence, de la brutalité
On se demande en écoutant l'album si Canine est un homme ou une femme, ou même un groupe. Il y a un vrai travail sur la voix !
Je viens de la musique électronique. Il y a des synthés, des machines... Tout un truc de traitement de son. Et d'un coup, je me suis dit pourquoi ne pas penser la voix comme un instrument à vent et la tordre dans tous les sens ? Je me suis dit : "Qu'est-ce que ce serait une voix sans âge, ni sexe, qui viendrait de moi mais qui ne serait pas moi ?". Je l'ai concoctée, cuisinée. Comme des dialogues intérieurs. J'ai toujours la sensation d'être plusieurs. Je suis souvent, dans la solitude, en dialogue permanent avec moi-même. Et je voulais que dans ma musique il puisse y avoir ces moments-là.

Mais sur scène comment tu fais ?
Je suis la voix Canine, la voix centrale. Et j'ai un choeur de chanteuses qui font ma voix non modifiée.

Dans l'imagerie et sur scène, tu es entourée de femmes. C'est une démarche féministe ?
J'avais surtout cette volonté de montrer plusieurs choses des femmes. Les femmes ne sont pas forcément douces, fortes et intelligentes. Je voulais qu'il y ait de la violence, de la brutalité. Qu'on ne soit pas tout le temps sur la même image stéréotypée des femmes. En live, c'était important pour moi de prendre des physiques très différents. Comme dans mes clips. Je ne veux pas prendre que des nanas blanches qui font du 36. Je voulais montrer que le féminin est multiple.
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