CalogeroVariete Francaise » Variété française
samedi 26 août 2017 12:00
Calogero en interview : "Ma fonction, c'est de donner du plaisir aux gens"
Par
Yohann RUELLE
| Journaliste
Branché en permanence sur ses playlists, il sait aussi bien parler du dernier album de Kim Petras que du set de techno underground berlinois qu'il a regardé hier soir sur TikTok. Sa collection de peluches et figurines témoigne de son amour pour les grandes icônes de la pop culture.
Calogero fait cette semaine son grand retour avec l'album "Liberté Chérie". Autour d'un café, le chanteur s'est confié à Pure Chars sur la genèse de ce disque en forme d'exutoire, son admiration pour les Beatles et Michel Berger, l'héritage rock et variété qu'il revendique et les Enfoirés. Rencontre avec un artiste simple et généreux.
Crédits photo : Laurent Seroussi / Polydor
Propos recueillis par Yohann Ruelle. Votre premier album solo est sorti il y a 18 ans. Félicitations, vous êtes majeur ! Déjà ? Ah mais oui, c'est vrai. (Rires) Quand j'ai des choses à dire, je le dis Le parallèle est amusant car "Liberté Chérie" sonne comme l'album de l'émancipation. Vous avez décidé de vous faire plaisir et ça s'entend !Dès le départ, j'avais dans l'idée de faire un album positif, dansant... et surtout ne pas m'enfermer dans la case "chanteur social", vers laquelle je m'étais dirigé avec le précédent. Quand j'ai des choses à dire, je le dis. Mais ma fonction, c'est d'être chanteur pop et de donner du plaisir aux gens avec la musique. J'avais envie dès le premier single que ce soit joyeux et que ça tape du pied ! Basse, batterie et guitare ont été enregistrés à Abbey Road, dans le studio mythique des Beatles. C'était génial parce que même quand on n'enregistrait pas, je restais à l'intérieur avec ma guitare et je marchais entre ces murs. Le studio est intact de l'époque. J'essayais de m'imprégner des ondes... Les Beatles ont enregistré tous leurs albums dans cet endroit ! Je les imaginais en studio, comme dans un film en noir et blanc, c'était assez dingue. C'était un rêve de gosse ? Oui. Je pense que c'est le rêve de tous les musiciens. Le studio B d'Abbey Roard, c'est le temple de la pop. Michel Berger était un artiste d'exception Vous avez souvent décrit les Beatles comme votre premier choc musical. Qu'est ce qu'ils vous ont appris ?Ils m'ont donné le goût de composer des morceaux. J'ai beaucoup d'admiration pour les gens qui savent écrire des chansons, ce qui n'est pas facile. Il y a des artistes qui sont de véritables performeurs sur scène mais qui ne font pas forcément des bonnes chansons. Tous les groupes que j'aime, tous les chanteurs que j'admire, ce sont des gens qui savent faire des chansons. Il y a un autre artiste auquel on pense en écoutant "Je joue de la musique" par exemple, c'est Michel Berger. Quelle était d'après vous sa grande force ? Encore un qui savait faire des chansons ! Les mélodies comme les textes. Sa force, c'était de réussir à toucher les gens. Il faisait des chansons à la fois populaires et élégantes, chics, avec un rythme toujours enjoué. C'était un artiste exceptionnel ! Il créait toutes ses compositions au piano. Et vous, comment procédez-vous ? Je commence toujours par la musique. D'abord le son, avec ma basse et mon piano, puis le texte, que je travaille avec des collaborateurs. Regardez le clip "Je joue de la musique" de Calogero : Quand on regarde l'album dans son ensemble, il paraît plus léger et moins engagé, vous l'avez dit, que "Les Feux d'artifice", qui évoquait notamment le drame d'Échirolles et l'acceptation de l'homosexualité. Pourtant, il s'ouvre avec un texte fort : "Voler de nuit". C'est vrai. C'est une chanson rassembleuse sur la paix, sur Saint-Exupéry. La musique a un rôle social Vous dites très joliment "Je rêve dans mon ciel solitaire, qu'on soit tous un peu solidaire". Ce n'est pas anodin en ces temps d'incertitude. Vous pensez que la musique a le pouvoir de secouer les consciences ?Pas assez, malheureusement. La musique elle change les choses, elle rassemble. Elle fait du bien. Certaines personnes se font soigner en écoutant de la musique classique, c'est là où la musique a un rôle social. Tout comme quand un gamin ou une gamine apprend à jouer de la guitare et découvre une relation fusionnelle avec son instrument, qui va lui éviter de faire des conneries et de fumer 15 pétards par jour parce qu'il fasse son temps à s'entraîner pour progresser. C'est là son rôle social. Après, politiquement, c'est une autre paire de manches. Je ne suis pas sûr qu'on puisse dire que la musique a changé l'histoire. L'Histoire, justement, vous la racontez avec un grand H dans "Le vélo d'hiver". Quel était le piège à éviter quand on veut aborder un sujet aussi sensible et poignant que la rafle du Vel d'Hiv ? J'avais envie que les jeunes écoutent cette chanson et me voit comme un conteur. Le Vel d'Hiv, c'était comme Bercy à l'époque. C'était LA salle de fête : Yvette Horner y jouait de l'accordéon, Piaf montait sur scène, on y organisait des combats de boxe... Moi je chante la chanson en me mettant à la place de l'édifice. Je dis "Regardez ce qu'il se passait chez moi, il y avait des choses géniales mais il y a eu ça, aussi". Le devoir de mémoire il est important. Moi je suis un passionné d'Histoire. Et je pense que c'est important de savoir que ça s'est passé en France. Le texte de Marie Bastide, il est pudique dans sa manière de le raconter. Il ne faut pas oublier le passé C'est la dernière piste de l'album. Doit-on y voir une symbolique ?Bien sûr. Je commence par une chanson sur la paix et je termine par une chanson qui relate les ravages de la guerre. Ça veut dire quelque chose. Malgré les horreurs qui se passe, on est dans un monde de paix. On n'a pas connu la guerre mais il y a pourtant eu une ici même, dans le quartier. Il faut se souvenir. Certains pays sont en guerre mais en Europe, cette période de paix est exceptionnellement longue. Et pourvu qu'elle dure. Alors, "Voler de nuit" parle de l'avenir, ça bouge à l'intérieur, il y a plein de thèmes abordés comme la solitude avec "Julie", la séparation avec "On se sait pas coeur", et puis on finit avec le passé. Ce pays libre, ce pays de l'amour, ce pays de la fraternité... Oui ! Mais il s'est passé ça aussi. Il ne faut pas l'oublier. Se souvenir, c'est une des clés pour comprendre votre album. Sur "1987" ou "Fondamental", on vous sent submergé par la nostalgie. Pourquoi avoir ressenti ce besoin de regarder en arrière ? Si on n'a pas de repère, on est perdu. "Fondamental" parle des choses sur lesquelles on s'appuie et qui nous aident à construire l'avenir. On est dans un pays où il s'est passé plein d'événement ! La Coupe du Monde 1998, la France était un état de grâce ! Ça a rassemblé la jeunesse. Les films de Louis de Funès... Toutes ces petites choses-là font notre force. C'est important. Après, je ne suis pas quelqu'un qui vit dans le passé. Je suis dans l'avenir, j'ai quatre enfants, je suis dans le présent. Ma nostalgie, elle se concentre surtout sur "1987". C'est tout mon adolescence ! (Sourire) C'est l'année où j'ai monté mon groupe, Les Charts, avec mon frère. Forcément, elle a beaucoup de signification. Regardez Calogero chanter "Fondamental" : Je n'essaie pas de faire jeune ! Vous avez peur de vieillir ?Pas du tout. Absolument pas. C'est pour ça que je ne suis pas du tout favorable au jeunisme. Je vais vous dire, ma maison de disques m'a dit "Oh c'est dingue, dans ton public, depuis "Face à la Mer", depuis "Le Portrait", depuis "Un jour au mauvais endroit" et cette chanson-là, "Je joue de la musique", elle plaît beaucoup aux enfants". Je ne l'ai pas calculé, je n'ai pas essayé de draguer un public jeune. C'est juste... Je ne sais pas ! Peut-être un côté ludique qui donne envie aux enfants de venir. Le public est plus intelligent que les radios, qui catégorisent leur auditorat en fonction des tranches d'âge... Parfois, je rentre dans un taxi, le chauffeur a à peine 20 ans et il écoute "Nostalgie" ! Je ne pense pas qu'il faut ranger les gens dans des cases. C'est un très mauvais calcul. Moi j'ai 46 ans et j'écoute encore des artistes très actuels comme Radio Elvis, que j'adore. Je trouve très rassurant qu'il existe encore des groupes comme ça en France. Et en même, quand j'étais môme, j'écoutais les Beatles et ce n'était pas du tout ma génération... A part les Beatles, qui étaient vos héros d'adolescence ? U2. The Cure. Depeche Mode, énormément. Vince Clark ! Le fondateur de Depeche Mode, qui a créé le groupe Yazoo plus tard. Ça fait partie de mes grosses références. Après dans la chanson français, il y a Michel Berger et Julien Clerc, avec lequel je suis très heureux de collaborer sur son prochain album. Les Beatles sont mes maîtres Vous faites du rock, de la chanson française, de la pop... Cette versatilité, c'est le secret de votre longévité ?C'est ce qu'on me disait au départ. Quand je suis arrivé avec mon premier album "Au milieu des autres", tout le monde me donnait son avis - normal - et certains disaient : "Il n'y arrivera jamais car il a le cul entre deux chaises". Mais c'est exactement pour ça que j'y suis arrivé ! Mon influence de Julien Clerc et des Cure, elle s'entend ! Elle est là. J'ai digéré ce mélange, je l'ai fusionné à l'intérieur de moi et c'est ce qui fait ma musique. Aujourd'hui on reconnait tout de suite mon style. Mais comment il s'appelle ce style ? J'en sais rien. Pop-rock, ça me va. Mon plus bel exemple, ce sont les Beatles. Les Beatles, ça pouvait être "Yesterday", très classique, "Strawberry Fields Forever", un titre complètement barré, ou "Helter Skelter", d'une violence inouïe. Ce sont mes maîtres. J'espère avoir hérité, à mon niveau, cette dimension hétéroclite. C'est pour ça que sur scène, je m'amuse comme un fou. Ma culture rock s'entend mais je le force pas ce trait-là. On est quatre, je suis bassiste donc musicien et en même temps chanteur. Il y a forcément une attitude plus rock. Pour les puristes par contre, je ne suis pas rockeur. (Rires) Mais je m'en fous ! Je sais où je suis. Je ne cours pas après une crédibilité. Je suis bien dans mes baskets. Quand parfois, je lis ou j'entends qu'on me compare à Michel Berger, Jean-Jacques Goldman ou Julien Clerc, en disant que s'ils ont fait des enfants j'en suis un, mais moi je suis tellement plus fier de ça que d'avoir une crédibilité rock ! "Liberté Chérie" ne contient pas de duo, vous en faites assez rarement d'ailleurs. Pour quelle raison ? C'est vrai ! J'aimerais bien... Je n'ai pas eu d'idées de duos, ça aurait pu être sympa. "On ne sait pas coeur" aurait pu en être un. On n'y a pas pensé. J'avais dans l'idée, plus tard, de faire un album de duos... On verra bien ! Je travaille avec Zazie La rumeur voudrait que vous travailliez sur le prochain album de Jenifer avec Jean-Jacques Goldman. Est-ce vrai ? (Surpris) Vraiment ? C'est complètement faux. J'ai déjà collaboré avec Jean-Jacques Goldman mais je ne travaille pas avec lui sur l'album de Jenifer, non. Pas du tout. Mais alors pas du tout ! Je collabore en ce moment avec une personne que j'admire beaucoup et qui est Zazie, sur son prochain album à elle. On essaye en tout cas. Dernier question : vous reverra-t-on un jour aux Enfoirés ? Je l'ai fait quatre fois et je trouve ça super. Je suis toujours ému de savoir que Coluche a eu une idée aussi simple pour donner à manger aux gens qui ont faim. Il l'a dit, il l'a fait ! C'est extraordinaire. Je ne pense que du bien des Enfoirés. Peut-être que j'y participerai à nouveau, peut-être. En tout cas, je suis fier et heureux qu'il existe quelque chose comme Les Enfoirés dans notre pays.
Pour en savoir plus, visitez calogero.fr et la page Facebook de Calogero.
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