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dimanche 05 septembre 2021 13:18

Adrien Gallo en interview : "Cet album, c'est le lien entre mon père et mes enfants"

Par Julien GONCALVES | Rédacteur en chef
Enfant des années 80 et ex-collectionneur de CD 2 titres, il se passionne très tôt pour la musique, notamment la pop anglaise et la chanson française dont il est devenu un expert.
En marge des BB Brunes, Adrien Gallo sort son deuxième album "Là où les saules ne pleurent pas". En interview pour Pure Charts, le chanteur raconte comment la naissance de ses deux enfants a chamboulé sa vie, ses chansons écrites en hommage à son père, son envie de travailler avec Clara Luciani ou encore ses duos avec Vanessa Paradis. Rencontre.
Crédits photo : DR
Propos recueillis par Julien Gonçalves.

Cela fait sept ans déjà que ton premier album solo "Gemini", que j'aime beaucoup, est sorti. Qu'est-ce que tu en retiens ?
Ah merci ! C'était une super expérience. Je l'ai un peu vécu comme une parenthèse entre deux albums du groupe, j'avais très envie de le faire. Ça me tenait à coeur. C'était une sorte de récréation. J'ai eu la chance de travailler avec des super musiciens, dont Jannick Top, le bassiste historique de Michel Berger, qui a fait toutes les tournées de France Gall. C'était assez émouvant pour moi. Je suis encore très fier de cet album, je suis content quand des gens me disent qu'ils l'ont aimé.

Il y avait aussi ce truc, à l'époque, de se dire : "Je peux le faire" ?
Peut-être me sentir libre de faire ce que j'ai envie de faire, artistiquement parlant. Je pense que c'était important aussi d'aller au bout de mon idée. Ces chansons, je les avais et je les imaginais en solo. C'était une manière de m'autoriser à faire des choses. J'essaie de ne pas perdre ça de vue, de ne pas réfléchir, de toujours faire les choses avec l'instinct et le coeur.

L'arrivée de mes deux enfants, ça bouleverse tout
Quand est-ce que ce 2ème solo "Là où les saules ne pleurent pas" a germé dans ton esprit ?
Ça a germé vraiment sept mois après la sortie de "Visage" des BB Brunes. Après, ces chansons étaient déjà présentes pour la plupart. Je savais que j'allais les utiliser un jour ou l'autre. Il y avait 3/4 chansons que j'avais écrites pendant la période d'écriture pour le dernier album de Vanessa Paradis. C'était une famille de chansons très chanson française, plus doux, un appel à la tendresse. Je me suis dit que c'était peut-être le moment de le faire et c'était génial à faire.

Les confinements ont-ils eu un impact sur sa création ?
Je l'ai fait entre le premier et le deuxième. La tournée du groupe s'est annulée donc j'ai eu le temps de me consacrer à ça. D'être en studio, de prendre le temps... J'ai eu la chance de pouvoir travailler alors que tout était à l'arrêt. C'était une période étrange, très flippante aussi. D'avoir pu cathartiser tout ça dans la musique, ça m'a beaucoup aidé.

Tu ne t'arrêtes jamais d'écrire j'imagine ?
Je m'y attèle un peu quotidiennement. Après, je t'avoue, l'arrivée de mes deux enfants, ça change énormément, ça bouleverse tout dans une vie. C'est une réorganisation. C'est réapprendre à vivre aussi, avec deux êtres dont il faut s'occuper. Mais bien sûr je pense déjà à la suite, je continue d'écrire.

Regardez le clip "Chut" par Adrien Gallo :
Le player Dailymotion est en train de se charger...



Devenir père, ça a changé quelque chose dans ta création ? J'imagine que tu dois réorganiser tes sessions de travail, quand ils dorment notamment...
Oui, je peux bosser la nuit, mais je dors beaucoup moins du coup. (Rires) Pendant deux ans, j'ai très peu dormi. Mais à la fois, c'est extrêmement inspirant et ça donne une force incroyable. Ça donne beaucoup de tendresse et beaucoup de force d'avoir des enfants. Et en même temps, on est épuisé. C'est un savant mélange. (Rires)

J'ai écrit en pensant fort à mon père, disparu en 2012
La tendresse de l'album vient aussi d'eux ?
Oui, je pense. Pratiquement toutes les chansons de l'album, je les ai écrites en pensant fort à mon père, qui est disparu en 2012. Par exemple, je relisais beaucoup ses poèmes avant de me mettre à écrire. Il en a écrit beaucoup. J'avais envie d'être à la hauteur de son écriture, car il écrivait vraiment très bien. Cet album, c'est un peu le lien entre mon père et mes enfants, vu qu'ils ne se connaitront jamais. C'est beaucoup d'influences que lui écoutait, de la chanson française comme Barbara ou George Brassens, qu'il a interviewé d'ailleurs. Il m'a beaucoup fait lire le poète René Char. C'est un peu son héritage, ses valeurs et sa tendresse que j'ai voulu transmettre dans cet album à mes enfants. L'album est dédié à mes enfants, clairement.

C'est un album très intime, à l'écoute on se sent comme dans une bulle...
Oui, complètement. Je l'ai écrit et composé dans mon home studio. Je me suis concentré sur le piano, ça devait être le coeur de l'album. Mon père m'a offert mon piano à cinq ans, il m'a encouragé à faire de la musique. Je leur avais demandé un piano et ils m'ont offert un jouet, alors que j'étais très sérieux. (Rires) Il me l'a offert un matin. J'ai composé pas mal de morceaux sur ce piano-là en particulier, un vieux Pleyel. C'était une manière d'entrer en dialogue avec mon père, j'avais l'impression. C'était une expérience un peu mystique, assez émouvante. C'est pas mal de souvenirs... Et puis, c'est la chanson avec laquelle j'ai été bercé : Michel Berger, Barbara, Anne Sylvestre, George Moustaki... Cette chanson est immortelle, elle n'a pas pris une ride, elle a toujours du propos aujourd'hui.

J'ai vécu une rupture hyper douloureuse et violente
L'intemporalité, c'est quelque chose que tu recherches dans tes projets ?
Sur cet album, oui. Par exemple, "Gemini", j'ai l'impression qu'il est très ancré 80. Là, j'ai voulu quelque chose qui ne correspondait pas forcément à une époque. Ce sont des sons très organiques, tout est joué par des musiciens, il y a très peu d'ordinateur. Ça aurait pu être fait dans les années 60 ou 70. J'aime bien son côté anachronique. J'avais envie de ça.

Tu me parlais de ton père, mais en lisant les paroles de l'album, j'y ai vu beaucoup de solitude, d'absence. J'ai pensé à une rupture tout de suite...
Oui, il y avait ça. L'absence, énormément. En fait, "Des adieux", je l'ai écrite trois jours après une rupture hyper douloureuse et violente avec la femme qui chante sur le premier album, Ella. Il y a eu beaucoup de douleur, j'ai été vraiment sonné par cette rupture. Ça raconte les six-sept dernières années de ma vie. Il y a cette rupture, ce vide, et je re-rencontre la mère de mes enfants. C'est pour elle que j'ai écrit "Houna" (titre des BB Brunes sorti en 2007, ndlr). On s'est connu, c'était mon amour de jeunesse. C'était un peu ma Muse à l'époque. (Rires) On ne s'est pas vu pendant 10-12 ans. On est retombé amoureux. Elle m'a un peu sauvé de mon mal-être. (Sourire) Il y a cette renaissance et l'arrivée des enfants. Cet album résume plein de phases de ma vie.

Regardez le clip "Les clochettes de mai" d'Adrien Gallo et Vanessa Paradis :



Les textes de l'album sont très soignés, très poétiques. Comment t'est venu le goût des mots ?
Je crois que c'est dans mon sang. Mon père a toujours adoré écrire. La lecture, c'est arrivé tard, j'avais du mal à lire. Le premier livre qui m'a fait adorer la littérateur c'est "Mr Vertigo" de Paul Auster, j'avais 15 ans. Mais j'ai toujours aimé écrire, écrire des chansons. Au début, c'était vachement de l'anglais. L'amour des mots en français, ça s'est réveillé vers 16-17 ans.

Ma soeur chante sur l'album
Les voix féminines sont très présentes sur tes albums. Pourquoi c'est si important de les avoir en invitées, comme des fantômes qui passent ?
Oui c'est le fil d'Ariane de l'album aussi. J'adore... Ça apporte beaucoup de douceur, de sensibilité. Une sensibilité qui me plait beaucoup. Je chante très grave sur l'album donc j'avais besoin d'éclaircir un peu tout ça avec des voix féminines. Il y a même des voix un peu lyriques, je trouvais ça hyper beau. Vu que j'ai une voix grave, pas très chantée, je trouvais intéressant d'aller vers l'opposé. Il y a notamment ma soeur qui chante sur "L'un aime l'autre, et l'autre un autre". (Rires) On chante ensemble depuis assez longtemps. J'avais pensé à elle pour la chanson, elle est venue, ça l'a fait. Elle n'est pas chanteuse mais c'est ça que j'aime bien.

Et il y a Vanessa Paradis qui est présente sur deux duos, "Les jolies choses" et "Les clochettes de mai" !
Elle m'a fait ce cadeau-là. Ça s'est fait naturellement, on est en contact, on a déjà travaillé ensemble. Ces deux chansons, je savais qu'elles les aimait beaucoup car elles étaient écrites pour elle à la base. Elle les avait gardées jusqu'au bout et finalement elles n'avaient pas été retenues sur son dernier album. Ça m'avait beaucoup encouragé dans mon métier d'auteur-compositeur. Donc elle est venue, on a fait ça dans un studio à Oberkampf, c'était comme toujours assez magique elle, ça s'est fait dans la douceur et la simplicité. On s'est mis tous les deux au micro, c'était très impressionnant pour moi de chanter en même temps qu'elle. Elle met très à l'aise mais elle a une aura, quelque chose de magique, de très inspirant. Chanter avec elle, c'était quelque chose. C'est une voix qui m'a bercé depuis tout petit. C'était la cerise sur le gâteau. Ça a vraiment embelli les chansons.

J'aimerais beaucoup collaborer avec Clara Luciani
Vous avez parlé de retravailler ensemble ?
J'aimerais beaucoup. On n'en a pas vraiment reparlé. Mais elle m'a fait un autre immense cadeau, de tourner le clip des "Clochettes" avec moi. On a beaucoup rigolé, c'était très joyeux. Tout se passe autour d'un piano surréaliste en forme de rivière, il y a beaucoup d'eau, on est au-dessus de l'eau, tout est très blanc. Elle est magnifique.

Les femmes t'inspirent beaucoup. Il y a une artiste féminine avec laquelle tu aimerais travailler ?
J'aimerais beaucoup collaborer avec Clara Luciani, qui est une copine. Elle écrit et compose très bien, je l'admire beaucoup, donc je ne sais pas si elle a vraiment besoin de moi. (Rires) Mais ça me ferait extrêmement plaisir de co-écrire une chanson avec elle par exemple. Même sur un prochain album solo, qu'elle vienne m'aider à écrire mes chansons, ça me ferait vraiment plaisir.

J'ai pensé à Charlotte Gainsbourg aussi en écoutant l'album...
Ah ouais, j'adorerais, bien sûr ! Musicalement, il n'y a pas une erreur, tout est classe. Elle s'entoure extrêmement bien. C'est de l'ordre du rêve !



BB Brunes, c'est en pause pour le moment
Tu me dis si je me trompe mais je sens l'âme d'un Christophe sur "Ils solitudes". Sa disparition t'a marqué j'imagine ?
Complètement. J'ai l'impression qu'il n'a pas disparu tellement il est présent, je pense souvent à lui. J'ai eu la chance de passer quelques moments avec lui. Une fois, on s'est retrouvé vers 22 heures dans un restaurant de couscous. (Rires) Ensuite, on est allé chez lui, on a passé du temps ensemble, j'ai bu un whisky. Je voulais travailler avec lui sur deux chansons des BB Brunes, "Terrain vague" et "Celesta", pour qu'il chante dessus. Il aimait beaucoup les chansons, il voulait le faire, mais il était sur son voilier quand il a fallu enregistrer. (Rires) C'était vraiment un personnage incroyable, très inspirant, dans sa liberté, sa folie. Il avait quelque chose de virtuose, d'extrêmement élégant.

J'ai aussi immédiatement pensé à Michel Berger à l'écoute de "Capitale triste". C'était voulu ?
C'est vrai que tous ces artistes sont présents en écho. Ils m'ont ému à un moment ou à un autre par leurs chansons. C'est comme un petit grésillement de l'âme à chaque fois. J'ai un peu envie de faire la même chose, de restituer, de procurer cette émotion là, c'est peut-être inconscient aussi. On m'a aussi dit que cette chanson faisait penser à Louis Chedid que j'aime beaucoup. Ce sont des artistes immenses.

Et la scène, tu y penses pour cet album ?
On est en train de préparer une tournée en mars 2022, avec un Trianon le 9 avril. C'est nouveau pour moi parce qu'en solo, j'ai fait très peu de concerts. Là, c'est un peu se jeter dans le vide mais c'est excitant. Cet album c'est ça aussi. C'est étrange de sortir quelque chose d'aussi intime. Je vais essayer de rendre les deux albums cohérents sur scène. Et je pense qu'il y aura de nouvelles chansons que j'aurais écrites entre temps, des titres plus dansants, pour apporter un peu de rythme aux concerts.

Et, pour finir, est-ce qu'un nouvel album des BB Brunes est en préparation ?
Pour l'instant, c'est vraiment entre parenthèses, en pause. Pour le moment, non.

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